European Election Farmers

Agriculture : que proposent les principaux candidats aux élections européennes ?

Public Sénat vous résume les propositions clefs des huit principales têtes de listes pour les élections européennes en matière d’agriculture. Une thématique que la grogne du monde paysan a placé au cœur de la campagne.
Romain David

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À moins d’une semaine des élections européennes, les agriculteurs sont de nouveau mobilisés. Ce lundi 3 juin, agriculteurs français et espagnols faisaient front commun pour bloquer la frontière le long des Pyrénées. Une initiative spontanée, prise en dehors des syndicats, avec pour objectif de mettre la pression sur les candidats au Parlement européen avant le scrutin de dimanche. Les manifestants réclament des mesures face au prix de l’énergie, l’instauration de clauses miroirs pour les produits importés, ou encore la fin de l’inflation normative.

La crise du monde agricole, qui a secoué l’Hexagone il y a un peu plus de trois mois avec de nombreux blocages à travers le pays, s’est imposée comme l’un des principaux thèmes des élections européennes. La remise en cause des traités de libre-échange, la nécessité de réformer le système d’aides de la politique agricole commune (PAC) ou encore l’élaboration d’outils d’encadrement des prix pour garantir un revenu décent aux agriculteurs sont devenues, au fil des jours des marottes de campagne. Tour d’horizon des principaux engagements pris par les candidats sur l’agriculture :

Jordan Bardella – Le Rassemblement national

Le Rassemblement national veut garantir « une rémunération digne » aux agriculteurs et aux pêcheurs. Après de multiples couacs sur « le prix plancher », soit un tarif minimum d’achat, une idée défendue par Marine Le Pen pendant la présidentielle, mais critiquée par Jordan Bardella, la tête de liste du parti pour ces élections européennes, il est désormais question de « prix garanti » dans le vocable du candidat. « Le prix garanti est un dispositif un peu différent. Une fois par an il y a des négociations commerciales entre la grande distribution et le producteur au cours desquelles on fixe un prix. Quand la grande distribution et le producteur n’arrivent pas à se mettre d’accord sur un prix d’équilibre, alors l’Etat peut intervenir, jouer un rôle d’arbitre et fixer un prix », a expliqué Jordan Bardella sur Public Sénat, faisant valoir la « souplesse » de ce système.

Le RN veut en finir avec la stratégie européenne « De la Ferme à la Fourchette » qui vise notamment à réduire de 50 % l’utilisation de pesticides d’ici à 2030, et à avoir un quart de surfaces cultivées en agriculture biologique. Le parti de Marine Le Pen réclame un moratoire sur la négociation de nouveaux accords de libre-échange par l’UE et souhaite imposer « le respect des normes environnementales et sociales européennes » dans les importations.

Suivant le principe de la « préférence nationale », un concept politique porté par le RN depuis les années 1980, Jordan Bardella défend l’instauration d’une grande loi « Mangeons français » afin d’assurer aux producteurs tricolores une priorité d’accès aux marchés publics.

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Valérie Hayer – La majorité présidentielle

La liste pilotée par Valérie Hayer, qui rassemble les composantes de la majorité présidentielle mais aussi les centristes de l’UDI, prône une simplification des procédures d’attribution des aides de la PAC et une uniformisation des contrôles entre pays européens.

Le camp macroniste défend également l’idée d’un « Egalim européen », du nom d’une série de textes votés sous la présidence d’Emmanuel Macron, et qui régulent en France les relations commerciales entre le secteur agricole, les industriels et la grande distribution. L’un des objectifs affichés est d’empêcher les distributeurs de se tourner vers des centrales d’achats basées à l’étranger pour contourner les obligations de la législation française.

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Valérie Hayer défend également un assouplissement des règles des marchés publics et de libre concurrence, afin de « privilégier les circuits courts et les produits locaux ».

Raphaël Glucksmann – Place Publique-Parti socialiste

Le programme de l’essayiste est l’un des plus prolixes sur l’agriculture, notamment avec un important volet consacré à la pêche. Raphaël Glucksmann veut transformer la Politique Agricole Commune (PAC) en une Politique Agricole et Alimentaire Commune (PAAC), qui prenne davantage en compte les liens entre agriculture et transformation des denrées.

Il souhaite notamment réformer le système d’attribution des aides de la PAC, qui s’appuie actuellement sur les surfaces d’exploitation, pour passer à un système d’« aides à l’emploi agricole et à l’utilité écologique », afin de favoriser la transition vers une agriculture plus respectueuse de l’environnement. Le programme du candidat évoque notamment la mise en place d’une « aide transitoire au revenu » pour aider les agriculteurs à « passer la crise et éviter les déconversions ».

Raphaël Glucksmann milite pour une « révision de la législation sur les conditions d’élevage, de transport et d’abattage des animaux dans l’UE ». De manière générale, il prône un renforcement des productions végétales et le développement d’un élevage moins intensif mais plus durable.

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Comme une large partie des autres candidats, il réclame l’instauration de prix planchers pour sécuriser la rémunération des agriculteurs et la mise en place de clauses miroirs sur les importations. De manière générale, Raphaël Glucksmann souhaite que l’agriculture soit sortie des accords de libre-échange.

Concernant la pêche, le candidat défend l’inscription dans le droit européen d’« un principe de réciprocité selon lequel seuls les navires étrangers obéissant aux mêmes exigences que celles imposées aux navires européens pourront pêcher dans les eaux EU ». Il demande aussi l’exclusion « des méga chalutiers » de nos eaux côtières.

Manon Aubry – La France insoumise

La candidate insoumise veut réorienter une partie de l’argent de la PAC vers les petits producteurs. Elle s’attaque aussi au système d’aides à l’hectare, à la faveur d’un système d’aides plafonnées intégrant des critères sociaux et environnementaux. Elle souhaite aussi que les aides aux éleveurs tiennent compte du bien-être animal.

Manon Aubry propose l’instauration de « contrats de transition » pour pousser à la conversion vers « des modèles agroécologiques ». Mais aussi la reprise de la dette agricole des producteurs qui s’engagent vers le 100 % bio.

L’eurodéputée LFI promet de bloquer l’ensemble des accords de libre-échange en cours de négociation et d’abroger ceux qui sont déjà entrés en vigueur. Elle entend interdire l’importation de tout produit dont la fabrication a nécessité l’usage de phytosanitaires prohibés dans l’UE. Elle souhaite favoriser les productions nationales et européennes dans les marchés publics.

Marie Toussaint – Les écologistes

L’eurodéputée plaide pour une nouvelle politique agricole commune. Tordant elle aussi le cou au système de répartition des aides selon le nombre d’hectares, elle propose une distribution « par unité de main-d’œuvre », afin de favoriser « les pratiques agricoles qui créent de l’emploi ».

Sur le volet de la rémunération, Marie Toussaint se prononce également pour les prix planchers et l’élaboration d’un « Egalim européen ».

Les écologistes entendent diminuer de 50 % la consommation de viande et de poisson d’ici 2030, mettre fin à l’élevage en cage et améliorer les conditions de transport des animaux. Ils veulent réduire de 80 % le recours aux pesticides d’ici la fin de la décennie et lancer un fonds de transition agricole pour accompagner les agriculteurs vers de nouvelles pratiques.

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François-Xavier Bellamy – Les Républicains

Le programme agricole de cet ancien professeur de philosophie fait aussi partie des plus fournis de la campagne, avec huit pages consacrées à cette question. François-Xavier Bellamy demande la création d’un cadre dérogatoire au droit européen de la concurrence pour soutenir les agriculteurs français et renforcer la portée des lois Egalim. Dans la même optique, il souhaite que les Etats-membres puissent avoir la liberté d’appliquer des taux de TVA « super réduits » pour les produits alimentaires les moins polluants ou consommés en circuit court.

Il milite pour une augmentation du budget de la PAC – 53,7 milliards en 2023 – pour permettre au continent européen de se hisser à un niveau équivalent à celui des Etats-Unis ou de la Chine. Il propose pour cela de réorienter les dépenses allouées à certains fonds européens de cohésion, des instruments financiers destinés à réduire les écarts de richesse entre régions. En outre, François-Xavier Bellamy souhaite consacrer davantage de fonds à la recherche de solutions alternatives aux pesticides et aux produits phytosanitaires, notamment en développant « les nouvelles techniques génomiques ».

La tête de liste LR réclame la fin de la stratégie européenne « De la ferme à la fourchette », qui favorise selon lui « la décroissance agricole », ainsi qu’un moratoire sur toute nouvelle norme pour le secteur agricole ou celui de la pêche.

Comme la plupart de ses concurrents, il réclame la mise en place de clauses miroirs dans les accords de libre-échange. Pour éviter que les importations ukrainiennes de denrées agricoles, en forte augmentation depuis le début du conflit avec la Russie, ne déstabilisent le marché européen, François-Xavier Bellamy demande l’élargissement des clauses de sauvegarde déjà mises en place par la Commission européenne.

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Marion Maréchal – Reconquête

Comme l’ensemble des candidatures de droite, Marion Maréchal veut elle aussi en finir avec la stratégie « De la ferme à la fourchette » ; au nom du principe de « souveraineté alimentaire », la nièce de Marine Le Pen entend bannir toute législation qui entraînerait une baisse de la production agricole. Elle souhaite introduire un « principe de sobriété normative » : « Pour une norme créée, deux normes supprimées ».

En l’absence d’alternative efficace, la tête de liste réclame un moratoire sur les interdictions de produits phytosanitaires, tout en favorisant le développement de nouvelles pratiques. À titre d’exemple, son programme évoque les « lasers désherbants ». Elle veut aussi abolir la prise en compte des nouvelles règles environnementales dans la répartition des aides de la PAC.

Marion Maréchal réclame des clauses miroirs dans les accords de libre-échange et le rétablissement des droits de douane sur les produits agricoles ukrainiens.

Léon Deffontaines – Parti communiste Français

La tête de liste du PCF défend la création « d’un fonds communautaire d’intervention sur les prix et les volumes » pour garantir à la fois une rémunération digne au producteur et un prix de revente plafonné au consommateur. Sans surprise, le communiste rejette les accords de libre-échange.

Face au dérèglement climatique, Léon Deffontaines propose l’instauration d’un régime public d’assurance et de gestion des risques. Il souhaite accorder des « bonifications de crédit », garanties par la BCE, aux installations favorables à l’agroécologie. Son programme défend la réduction du recours aux pesticides et aux engrais minéraux, ainsi que l’interdiction de l’arrachage des haies.

Il milite également pour une plus grande féminisation du secteur agricole, notamment à travers « une meilleure représentation des femmes dans les instances de décision ».

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