Affaire Bygmalion : la droite sénatoriale apporte son soutien à Nicolas Sarkozy

Affaire Bygmalion : la droite sénatoriale apporte son soutien à Nicolas Sarkozy

Nicolas Sarkozy a été condamné aujourd’hui à un an de prison ferme, sous bracelet électronique, dans le cadre de l’affaire Bygmalion. À droite, les témoignages de soutien et d’amitié se succèdent, tandis qu’au Sénat on refuse de « juger le jugement. » Certains remettent tout de même en cause le traitement de l’ancien chef de l’Etat, voire la réglementation du financement des campagnes électorales.
Louis Mollier-Sabet

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Une condamnation sévère, une décision politique d’une institution judiciaire en conflit avec un ancien chef de l’Etat auquel on doit tant… Il y a comme un air de déjà-vu qui plane au-dessus du groupe LR du Sénat en ce jeudi 30 septembre, jour du verdict du procès de Nicolas Sarkozy dans l’affaire Bygmalion. Il y a six mois, en mars dernier, la condamnation en première instance de l’ancien chef de l’Etat dans l’affaire « des écoutes » avait déjà choqué au sein de la droite sénatoriale. Rebelote après la condamnation – Nicolas Sarkozy a annoncé faire appel par l’intermédiaire de son avocat Thierry Herzog – de l’ancien Président de la République dans l’affaire Bygmalion aujourd’hui.

Ne pas « juger le juge, ni le jugement »

Les poids lourds de la droite n’ont pas tardé à réagir sur les réseaux sociaux. Christian Jacob, président de LR l’assure, cette condamnation « ne va pas manquer de choquer beaucoup de nos compatriotes. »

Pour les candidats à l’investiture LR, le soutien à celui qui reste l’un des patrons de la droite, ressemblait à un passage obligé. Xavier Bertrand assure « amitié » et « soutien » à Nicolas Sarkozy et forme même le « vœu que la vérité se fasse en appel. »

Valérie Pécresse rejoint son concurrent dans la course à l’investiture, en estimant que l’ancien chef de l’Etat « se battre jusqu’au bout pour défendre son honneur. »

Michel Barnier, lui aussi, se dit « fier » d’avoir été le ministre et l’ami de Nicolas Sarkozy, tout en lui témoignant « amitié et soutien. »

Éric Ciotti, plus sobre, assure lui aussi son « soutien » à l’ancien Président de la République.

Les soutiens au Sénat se font plus discrets, rares sont ceux qui acceptent de réagir à la condamnation, mais ceux qui le font insistent sur ce que Nicolas Sarkozy représente pour leur famille politique. « Il ne me revient pas de juger le juge, ou le jugement », confie prudemment Sophie Primas. La présidente LR de la commission des Affaires économiques tient tout de même à rappeler son « soutien » comme « femme et citoyenne de droite, militante et élue » à celui qui a « refondé les Républicains. »

Le patron des LR au Sénat, lui, met les pieds dans le plat et ne s’embarrasse pas des précautions consacrées sur les commentaires à propos des décisions de justice, en dénonçant une condamnation « d’une sévérité aussi inhabituelle qu’exorbitante. »

« C’est une décision terrible »

Alain Houpert, sénateur LR de la Côte d’Or, rejoint son président de groupe. Tout en ne voulant pas, lui aussi, « juger le jugement », il estime que la peine prononcée est « excessive » puisque supérieure à ce qu’avait demandé le procureur. Au-delà de l’amitié qu’il porte à Nicolas Sarkozy, Alain Houpert estime qu’il en va de l’intégrité des institutions du pays : « L’âme du Français qui est en moi, se dit, même en tant que citoyen, que ça va un peu loin. »

Si le sénateur ne veut pas « mettre au ban ni accuser des institutions », il juge « terrible » l’évolution du système judiciaire qui se retrouve à « condamner quelqu’un pour l’exemple » et en appelle à retrouver le « bon sens. » Au passage, Alain Houpert remarque quand même qu’il se déroule en ce moment un « autre procès dont on ne parle pas » : le procès Benalla. Le sénateur de la Côte d’Or en profite pour poser une question que l’on devine rhétorique : « Les peines seront-elles beaucoup plus softs ? »

Pour Catherine Procaccia aussi, la peine prononcée n’est pas proportionnée : « On double la peine requise par le procureur, c’est assez étonnant. » La sénatrice du Val-de-Marne trouve vite une explication à sa surprise première : « Il y a un conflit politique entre la justice et Nicolas Sarkozy, on veut en faire un exemple pour montrer ce qu’il ne faut pas faire. »

« Je ne pense pas qu’il ait dit ‘quoi qu’il en coûte’ »

C’est d’autant plus injuste que pour elle, Nicolas Sarkozy ne pouvait être au courant des détails du financement de sa campagne : « Quand vous êtes Président de la République et candidat à la présidentielle, je doute que vous ayez le temps de regarder ce genre de choses. Je pense qu’il a dû dire ‘je veux des meetings avec du monde’, mais qu’il n’a pas dit ‘quoi qu’il en coûte’et qu’ensuite c’est une série de responsabilités, chacun voulant bien faire et certains se croyant au-dessus des lois. » Le coût de la campagne aurait donc dégénéré sans que le Président ait le temps de « mettre les mains dans le cambouis. »

La sénatrice soutient donc Nicolas Sarkozy sur le fond et y voit même plus largement un problème dans la réglementation des campagnes électorales : « On sait combien c’est difficile de tenir les dépenses déjà au niveau local, parce que des militants bien intentionnés font floquer des t-shirts. Alors pour une campagne présidentielle. » Pour elle c’est un crime sans victime : « Bygmalion s’en est peut-être mis plein les poches en gonflant un peu plus la facture, mais il n’y a pas eu de détournement personnel par l’équipe de Nicolas Sarkozy, tous ceux qui ont engagé des dépenses ne l’ont pas fait pour en profiter. » Effectivement. Simplement, les autres candidats se sont a priori tenus à ces règles de financement de la campagne et notamment au plafond de dépenses, n’est-ce pas une rupture d’égalité ?

« Il y a plein de pays où ce n’est pas plafonné », répond Catherine Procaccia, qui y voit une manifestation supplémentaire d’une « vision égalitariste » de la compétition politique. Elle poursuit plus largement en questionnant la réglementation du financement des campagnes électorales : « Après tout, si les gens veulent donner de l’argent à des personnes qui ont un certain capital de sympathie et de confiance… On en est à empêcher les Français de donner de l’argent à qui ils veulent. »

« Finalement ‘la racaille’, c’est lui »

Sans surprise, à gauche, on se montre moins indulgent avec l’ancien chef de l’Etat et on ironise précisément sur les déclarations et les propositions que celui-ci avait pu faire à propos de la délinquance ou l’aménagement des peines. Julien Bayou, secrétaire national d’EELV, ose même un « finalement la ‘racaille’c’est lui. »


Les déboires judiciaires de Nicolas Sarkozy n’ont pas fini d’agiter la classe politique française, puisque le l’ancien chef de l’Etat a fait appel de ses deux récentes condamnations et reste mis en examen dans les soupçons de financement libyen de sa campagne présidentielle de 2007. À suivre donc.

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