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Abrogation de la réforme des retraites : «Lorsqu’un vote déplaît à la Nupes, elle n’a qu’une réponse, l’obstruction », raille Elisabeth Borne
Par Romain David
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Les députés de la majorité et de droite ont supprimé mercredi, à quatre voix près, l’article phare d’une proposition de loi (PPL) visant à abroger le recul de l’âge légal de départ à la retraite, lors de l’examen de ce texte par la commission des affaires sociales. Toutefois, les élus d’opposition auront encore la possibilité de réintroduire la mesure de suppression, sous forme d’amendement, lors de l’examen en séance publique, le 8 juin, de cette PPL portée par le petit groupe LIOT et soutenue par l’ensemble de la gauche. Une véritable bataille procédurale s’est engagée depuis plusieurs semaines autour de ce texte, dont le camp présidentiel cherche à faire reconnaître l’irrecevabilité financière pour éviter de raviver le brasier encore tiède des retraites.
L’examen en commission, qui s’est ouvert ce mercredi matin, s’est poursuivi dans des conditions particulièrement houleuses jusqu’à la pause méridienne. Le refus par la présidente Renaissance de la commission d’examiner plus de 1 000 sous-amendements déposés par la Nupes a mis le feu aux poudres. Le député LIOT Charles de Courson a ensuite tenté d’introduire des amendements de suppression pour faire sauter le reste du texte ; une manœuvre plutôt habile, car si l’examen en commission n’aboutit pas, ou si la proposition de loi est rejetée à l’issue de cette première étape législative, c’est la version initiale du texte qui sera soumise à la discussion dans l’hémicycle la semaine prochaine.
« Le gouvernement avance en écrasant toute contestation »
La séquence a suscité l’émoi jusqu’au Sénat, occupé ce mercredi après-midi par sa séance hebdomadaire des questions au gouvernement. Guillaume Gontard, le président des sénateurs écologistes, n’a pas manqué d’interpeller la Première ministre Élisabeth Borne, reprochant à la majorité présidentielle de vouloir tuer le débat dans l’œuf en cherchant coûte que coûte à museler les oppositions. « Au regard des événements consternants intervenus ce matin à l’Assemblée, c’est avec une profonde gravité que je m’adresse à vous. Madame la Première ministre, les droits des oppositions politiques sont le fondement même de la démocratie, c’est à l’aune de ces droits que l’on juge la qualité d’une démocratie », a-t-il lancé.
« Le gouvernement avance en écrasant toute contestation devant lui. Depuis ce matin, c’est bien plus que la bataille des retraites qui se joue à l’Assemblée nationale. En torpillant une initiative parlementaire de l’opposition, en bafouant le droit d’amendement, en transformant le corset de l’article 40 de la Constitution [qui limite le droit d’amendement selon des motifs budgétaires, ndlr] en véritable étau, vous créez un précédent délétère », a-t-il averti. Plus largement, le sénateur de l’Isère a voulu pointer « l’hypertrophie du pouvoir exécutif » face au Parlement : « Notre régime politique est une incongruité, pour ne pas dire une aberration », a-t-il dénoncé.
« Lorsque le résultat d’un vote déplaît à la Nupes, elle n’a qu’une seule réponse : l’obstruction »
Dans sa réponse, Élisabeth Borne a voulu rappeler que la proposition de loi LIOT n’offrait pas de garanties financières satisfaisantes à la suppression de la réforme des retraites. « Elle aggraverait considérablement les charges publiques et réduirait les recettes, cela contrevient de façon évidente à l’article 40 de notre Constitution. Ce texte, vous le savez, est anticonstitutionnel, et personne n’est dupe de la manœuvre qui se joue », s’est-elle agacée, ciblant les manœuvres de la gauche pour faire échouer l’examen en commission. « La commission des affaires sociale a voté et supprimé l’article qui visait à abroger la réforme des retraites, c’est un vote clair et démocratique », a estimé la cheffe du gouvernement. « La réalité, c’est que lorsque le résultat d’un vote déplaît à la Nupes, elle n’a qu’une seule réponse : l’obstruction », a encore accusé Élisabeth Borne. Et d’ironiser : « Je suis souvent surprise d’entendre les mêmes qui se disent défenseurs du Parlement être les premiers à en refuser les règles. »
Reprenant la parole pour quelques secondes, Guillaume Gontard a encore reproché à la majorité de dévoyer l’esprit de la Constitution et les règles du Parlement. « L’obstruction c’est vous ! Tordre les règles, ce n’est pas les appliquer ! », s’est-il étranglé. Avant de lâcher, en guise de conclusion : « Vous pouvez entrer dans notre histoire en ouvrant une page nouvelle de notre République parlementaire. Mais vous y entreriez, hélas, comme une fossoyeuse de la démocratie. »
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