Fifth bullfighting of the popular festivals in Madrid, Spain – 01 Sept 2023

« Une proposition de cohérence vis-à-vis de la protection de l’enfance » : au Sénat, une loi veut interdire la corrida aux moins de 16 ans

Une proposition de loi visant à interdire la corrida et les combats de coqs aux mineurs de moins de 16 ans sera examinée le 14 novembre dans la niche parlementaire du groupe RDPI (Renaissance) au Palais du Luxembourg. Si le texte a peu de chance de passer, le sujet électrise souvent les débats.
Quentin Gérard

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Parler de corrida est souvent propice à la polémique. Cette proposition de loi visant à interdire aux mineurs de moins de 16 ans d’assister aux corridas et aux combats de coqs ne devrait pas faire exception. Elle émane du groupe RDPI (Renaissance) qui a décidé de l’inscrire dans sa niche parlementaire du 14 novembre au Sénat. Au préalable, le texte a été déposé par Samantha Cazebonne, sénatrice RDPI des Français établis hors de France et cosigné par des élus de droite comme de gauche. L’objectif est de « protéger les enfants en évitant de les exposer à la violence », explique Samantha Cazebonne.

« Je ne comprends pas qu’on puisse encore tolérer ça dans notre société »

Pour Arnaud Bazin, sénateur Les Républicains du Val-d’Oise et cosignataire du texte, c’est « une proposition de cohérence vis-à-vis de la protection de l’enfance ». La corrida est déjà interdite en France, considérée comme « des actes de cruauté envers l’animal et des sévices graves ». Cependant, une dérogation existe depuis 1951, l’autorisant « lorsqu’une tradition locale ininterrompue peut être invoquée ». C’est notamment le cas dans le sud de la France. Arnaud Bazin, souhaite donc « au moins protéger les mineurs de cette exception ».

Si le sénateur Daniel Salmon veut interdire la corrida pour tout le monde, cette proposition de loi « va dans le bon sens ». L’élu écologiste d’Ille-et-Vilaine s’étonne que la législation soit très forte pour les animaux domestiques, mais par pour les taureaux à la corrida. « Je ne comprends pas qu’on puisse encore tolérer ça dans notre société. C’est de la torture », peste-t-il. L’argument de la tradition ? « Ce n’est pas ancestral en France. Ça vient du XIXe siècle, c’est quelque chose de relativement récent », souffle l’élu.

« On ne peut pas continuer à organiser des combats d’animaux »

Le texte vise aussi à interdire aux moins de 16 ans les combats de coqs. Une pratique qui se perpétue surtout dans les Outre-mer. Elle consiste à faire s’affronter deux coqs domestiqués. « Un spectacle très féroce », selon Daniel Salmon. « On ne peut pas avoir un discours de respect de l’animal et continuer à organiser des combats d’animaux. Avant, on avait des combats de chiens, ça a bien été interdit », poursuit le sénateur écologiste.

La corrida est un sujet récurrent au Parlement. L’année dernière, un texte similaire, visant à « interdire les corridas et les écoles taurines aux mineurs de moins de 16 ans », avait été déposé par Raymonde Poncet Monge, sénatrice écologiste du Rhône, sans qu’il ne soit examiné. L’année précédente, Aymeric Caron, député La France Insoumise, souhaitait « abolir la corrida ». Il avait dû retirer sa proposition de loi face à « l’obstruction » de ses opposants au Palais Bourbon. En 2021, c’est Daniel Salmon qui avait déposé un texte. Il n’avait pas été conservé dans la niche de son groupe. Et en 2019, Samantha Cazebonne, alors députée, avait déposé une proposition de loi, similaire à celle qui sera débattue le 14 novembre prochain.

« Une interdiction grave pour la démocratie »

Laurent Burgoa, sénateur Les Républicains du Gard, votera contre ce texte. « Interdire à un jeune de participer à ce spectacle est grave pour la démocratie », lance-t-il. « Je défends toutes les traditions. Et cette loi empêcherait la transmission des adultes vers les plus jeunes », indique l’ancien conseiller départemental du Gard. Si le Sénat est la chambre des territoires, « elle se doit de les protéger et par conséquent de protéger ses traditions ». Pour lui, assisté à la corrida est « plus normal pour un mineur que de regarder des films violents ou pornographiques ».

Une opinion partagée par Bernard Buis, sénateur RDPI de la Drôme. « Les parents sont suffisamment matures pour savoir s’ils peuvent emmener leurs enfants à la corrida. On n’a pas besoin de légiférer », justifie l’élu. « C’est dans l’air du temps de vouloir interdire », se désole l’ancien maire de Lesches-en-Diois (Drôme). Le texte va-t-il obtenir une majorité au Palais du Luxembourg ? S’il y a peu de chance, Bernard Buis se veut prudent. « Dans mon groupe, des personnes sont favorables, d’autres non. C’est comme ça dans presque tous les groupes », indique l’élu Renaissance. Composé de vingt-et-un sénateurs, le groupe RDPI est peut-être le plus divisé sur le sujet. Si leur président, François Patriat, a accepté de mettre cette proposition de loi dans la niche parlementaire, il ne l’a pas signé pour autant.

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