Taxation des plus riches : « Ceux qui sont plus à l’aise doivent faire plus d’efforts que les autres », relève Marc Fesneau

Sur le plateau de Public Sénat, le député du Loir-et-Cher Marc Fesneau se sent « très à l’aise » sur la question de la taxation des grandes entreprises et des plus fortunés, une demande portée par le MoDem depuis plusieurs années.
Camille Romano

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Enfin entendu et satisfait. Marc Fesneau, vice-président du MoDem et député du Loir-et-Cher fait partie de ceux qui ont accueilli chaleureusement l’annonce du Premier ministre d’une contribution fiscale exceptionnelle des grandes entreprises et des foyers les plus fortunés. « Je suis très à l’aise, j’aurai aimé être entendu il y a sept ans, parce que cela fait sept ans qu’on le dit », a résumé l’ancien ministre. C’est en effet une mesure que le MoDem porte depuis plusieurs années, brandissant une mesure de « justice fiscale ». Un terme qui a d’ailleurs été employé à plusieurs reprises par Michel Barnier au cours de sa déclaration de politique générale.

Pas de « chasse aux riches »

Dans un contexte budgétaire où le gouvernement a annoncé 60 milliards d’efforts sur les dépenses et recettes l’année prochaine, le député a estimé que « Dans cette situation-là, tout le monde va être appelé à faire des efforts », tout en insistant : « Ceux qui sont le plus à l’aise doivent faire plus d’efforts que les autres ». Pourtant, cette mesure n’est pas une « chasse aux riches », le centriste l’a martelé : « Je déteste cette idée, qui est idiote, parce qu’on a besoin de gens qui puissent investir, et après tout pour beaucoup d’entre eux, ils ont développé des activités. Donc ce n’est pas une chasse aux riches, cela permet aussi d’organiser la paix sociale. »

La mesure ne devrait concerner qu’un nombre très réduit de foyers : le ministre du Budget a annoncé ce jeudi matin que cette contribution exceptionnelle demandée aux « plus fortunés » ne devrait concerner que « 0,3 % des ménages ». Un ciblage avec lequel Marc Fesneau a semblé en accord : « Cela veut donc dire que l’on est sur une cible étroite », a-t-il balayé, renvoyant aux documents budgétaires précis pour répondre plus amplement. Il a ainsi salué une mesure « ciblée et temporaire », tout en mettant en garde sur des mesures temporaires : « On a vu beaucoup de temporaires qui se sont prolongés, des CDD qui deviennent des CDI fiscaux ».

« On ne peut pas vivre à crédit »

Marc Fesneau a également appelé à ce que le budget en préparation pour 2025 « tienne compte d’une réalité : c’est le déficit assez structurel et une dette qui s’accroît. » Sans pour autant qualifier cette trajectoire de « retour de l’austérité », Marc Fesneau a appelé à « tendre vers un équilibre ». « On ne peut pas vivre à crédit comme cela sans attaquer lourdement notre souveraineté. […] Ce n’est pas qu’une question de traités, c’est mieux de respecter les traités et les règles de la copropriété européenne, mais c’est mieux aussi de ne pas vivre à crédit, de ne pas dépenser en permanence plus qu’on a de moyens, et c’est une discipline que l’on a poussée au Mouvement Démocrate depuis longtemps. »

L’ancien ministre en a profité pour adresser une pique à ses collègues parlementaires, toujours en quête de plus de dépenses : « Reconnaissons qu’avec le plan de relance, on a donné des habitudes qui étaient « intéressantes » pour relancer la croissance… et personne à l’Assemblée nationale ne nous a critiqué pour cela. J’ai même plutôt entendu « encore un peu » et jamais personne ne dit « attention, sur la dette et le déficit, il va falloir être sérieux ». A chaque fois, j’ai vu comme ministre des gens qui nous disent « il n’y a pas assez ». »

Et les sénateurs, qui ont pourtant voté l’année passée 7 milliards d’économies, qui n’ont pas été prises en compte par le gouvernement ? L’ancien chargé des Relations avec le Parlement a gentiment balayé la proposition : « Il y avait une part de théorie dans l’affaire. Moi aussi, je suis élu, je peux faire semblant de faire des économies, parce que je sais que je n’aurai pas à les mettre en œuvre ». Des mots doux à l’égard de ses collègues qui promettent une discussion du budget haute en couleurs sur les bancs de l’Assemblée nationale.

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Narcotrafic : face à un « marché des stupéfiants en expansion », le directeur général de la police nationale formule des pistes pour lutter contre le crime organisé 

« On va de la cage d’escalier à l’international », explique le nouveau directeur général de la police nationale, Louis Laugier, devant la commission des lois du Sénat lorsqu’il évoque la lutte contre le narcotrafic. Si la nomination de Louis Laugier a fait l’objet de négociations entre Bruno Retailleau et Emmanuel Macron, l’audition portait essentiellement sur la proposition de loi relative au narcotrafic qui sera examinée à partir de janvier au Sénat. Le texte fait suite à la commission d’enquête présidée par Etienne Blanc (LR) et dont le rapporteur était Jérôme Durain (PS). Un texte particulièrement attendu alors que le ministre de l’intérieur, Bruno Retailleau, a multiplié les gages de fermeté dans la lutte contre le trafic de drogue et la criminalité organisée.   Comme les sénateurs, le Directeur général de la police nationale décrit un phénomène en hausse, un « marché des stupéfiants en expansion, une forte demande des consommateurs et une offre abondante ». La criminalité organisée connaît d’ailleurs un certain nombre d’évolutions comme la multiplication des violences liées au trafic y compris dans des villes moyennes, ou encore le rajeunissement des acteurs.  « Je souhaiterais préciser que la France n’est pas dans une situation singulière. En effet, tous les Etats de l’UE sont confrontés à des situations identiques », prévient néanmoins Louis Laugier. Néanmoins, les chiffres présentés sont vertigineux avec notamment 44,8 tonnes de cocaïne saisies en 2024 (contre 23,2 tonnes en 2023). Le directeur général rapporte également que 434 000 amendes forfaitaires délictuelles ont été dressées depuis septembre 2020 pour stupéfiants.   « Certaines observations du rapport relatif à l’action de la police nationale me paraissent un peu sévères »   Pour répondre à ce phénomène massif, l’Office anti-stupéfiants (Ofast) a été mis en place en 2019. Cette agence regroupe des effectifs issus de différents services, notamment des douanes et de la police judiciaire. Alors que le rapport sénatorial propose de revoir le fonctionnement de l’Ofast pour en faire une « DEA à la française », Louis Laugier défend l’efficacité de l’agence. « Certaines observations du rapport relatif à l’action de la police nationale me paraissent un peu sévères […] le rôle de coordination de l’Ofast est réel, grâce à son caractère interministériel et son maillage territorial dense », avance le directeur général de la police nationale. Ce dernier souligne également le doublement des effectifs depuis 2020 et la présence des services sur tout le territoire grâce aux 15 antennes de l’Ofast et aux cellules de renseignement opérationnel sur les stupéfiants (CROSS) présentes dans chaque département. Louis Laugier a également défendu la souplesse de ce dispositif, affirmant qu’il n’était pas nécessaire d’inscrire les CROSS dans la loi.   Le sénateur Jérôme Durain regrette néanmoins la faible implication des services de Bercy dans l’Ofast et souligne la nécessité de les mobiliser pour continuer de développer les enquêtes patrimoniales. « L’aspect interministériel de l’Ofast, est déjà pris en compte avec les douanes, mais on peut continuer à renforcer la coopération avec les services de Bercy », reconnaît Louis Laugier. Toutefois, le directeur général de la police nationale met en exergue la progression des saisies d’avoirs criminels. « 75,3 millions d’euros d’avoirs criminels ont été saisis en 2023. Il y a eu une hausse de 60 % entre 2018 et 2023, traduisant une inflexion profonde de la stratégie de la police en ce domaine avec un développement des enquêtes patrimoniales », argumente Louis Laugier. Interrogé par la présidente de la commission des lois, Muriel Jourda (LR), sur les améliorations législatives à apporter, Louis Laugier évoque la possibilité de recourir à des confiscations provisoires tout en prenant soin d’insister sur la difficulté juridique d’une telle évolution et notamment son risque d’inconstitutionnalité.   Le directeur général de la police nationale défend l’utilité des opérations « place nette »   Dans leur rapport, les sénateurs Jérôme Durain et Etienne Blanc mettaient en avant la nécessité de renforcer la lutte contre la criminalité en augmentant la capacité de saisies des avoirs plutôt qu’en démantelant les points de deal. Les sénateurs n’avaient pas manqué d’égratigner l’efficacité des opérations « places nettes » déplorant les faibles niveaux de saisies (moins de 40 kg de cocaïne et quelques millions d’euros) au regard des effectifs mobilisés (50 000 gendarmes et policiers) entre le 25 septembre 2023 et le 12 avril 2024. Des réserves renouvelées par Jérôme Durain pendant l’audition. « En un an les services de la DGPN ont initié 279 opérations de cette nature qui ont conduit à l’interpellation de 6 800 personnes, la saisie de 690 armes, de 7,5 millions d’euros d’avoirs criminels et plus d’1,7 tonne de stupéfiants », avance Louis Laugier. « Le fait d’avoir une opération où on affiche un effet ‘force’ sur le terrain est important », poursuit le directeur général de la police nationale qui dit avoir conscience que ces opérations « ne se suffisent pas à elles-mêmes ».   Plusieurs pistes absentes de la proposition de loi   Au-delà de l’approche matérielle, Louis Laugier insiste sur le besoin de renforcement des moyens d’enquêtes et de renseignement, notamment humains ainsi que l’adaptation du cadre législatif. Devant la commission des lois, le directeur général de la police nationale a tenu à saluer l’intérêt d’une réforme du statut de repenti, proposée par les sénateurs, pour élargir son périmètre aux crimes de sang. Le fonctionnaire détaille plusieurs mesures, absentes de la proposition de loi qui, selon lui, peuvent favoriser la lutte contre la criminalité organisée. Il souhaite notamment augmenter la durée des gardes à vue en matière de crime organisé pour les faire passer à 48 heures au lieu de 24, généraliser la pseudonymisation des enquêteurs ou encore faire entrer la corruption liée au trafic dans le régime de la criminalité organisée. Des propositions qu’il lie à une meilleure capacité d’écoute des policiers sur le terrain. « Il faut parler avec les personnes, vous avez entièrement raison. Ce travail-là peut avoir été occulté par l’action immédiate en réponse à la délinquance. Et donc oui je crois qu’il faut créer un lien. J’ai transmis des consignes dès que je suis entré en fonction », affirme Louis Laugier en réponse à une question de la sénatrice Corinne Narassiguin (PS).   Enfin, le directeur général de la police nationale plaide pour la création d’un nouveau cadre juridique et « d’une technique spéciale de captation des données à distance, aux fins de captation d’images et de sons relevant de la criminalité ou de la délinquance organisée ». Dans une décision du 16 novembre 2023, le Conseil constitutionnel avait néanmoins jugé inconstitutionnelle l’activation à distance des téléphones portables permettant la voix et l’image des suspects à leur insu. 

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