France : Grand froid et neige a Paris

Réquisition des logements vacants : une proposition de loi pour élargir la marge de manœuvre des maires

Le groupe communiste au Sénat s’apprête à déposer une proposition de loi, portée par Ian Brossat, pour rendre effective la réquisition de logements vides depuis un certain temps, une prérogative préfectorale qui n’est que très rarement mise en œuvre.
Romain David

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La vague de froid qui s’est abattue sur l’Hexagone en début de semaine devrait continuer à se faire sentir jusqu’à la fin du week-end, avec un mercure autour des – 5 degrés dans certaines régions. En réaction, plusieurs départements ont déclenché le « plan grand froid », qui prévoit des opérations de veille pour la protection des plus fragiles, notamment l’ouverture temporaire de places d’hébergements d’urgence supplémentaires, en plus des 203 000 déjà disponibles, généralement dans des bâtiments publics comme des gymnases. En parallèle, Patrice Vergriete, le ministre du Logement, a annoncé lundi 8 janvier le déblocage d’une enveloppe de 120 millions d’euros, soit l’équivalent de 10 000 places en plus.

Mais les communistes entendent aller plus loin. Le sénateur de Paris Ian Brossat doit déposer ce jeudi 11 janvier une proposition de loi pour faciliter la réquisition des logements vacants depuis plus d’un an. La législation permet déjà aux préfets de procéder à de telles réquisitions, pour « les personnes dépourvues de logement ou logées dans des conditions manifestement insuffisantes ». Le représentant de l’Etat doit d’abord obtenir l’accord du maire de la commune concernée. Sauf dérogation, la durée totale d’une réquisition ne peut excéder cinq ans. Elle est de deux ans s’il s’agit d’assurer l’hébergement d’urgence de personnes sans-abri.

Le bénéficiaire du logement est tenu de verser « une indemnité d’occupation » au propriétaire. Par ailleurs, ce dernier peut s’opposer à la réquisition en mettant fin à la vacance du logement ou en faisant la démonstration de son utilisation dans un délai donné.

« Laissons les élus locaux faire ! »

L’objectif du texte rédigé par les communistes : étendre ce pouvoir de réquisition aux maires pour faciliter son application. Une décision du 29 décembre 1997 du Conseil d’Etat considère qu’un édile, au nom des pouvoirs de police dont il dispose, possède déjà cette capacité, mais ne peut en faire usage « qu’en cas d’urgence et à titre exceptionnel, lorsque le défaut de logement de la famille dont il s’agit est de nature à apporter un trouble grave à l’ordre public ».

« Les élus locaux demandent régulièrement aux préfets de procéder à des réquisitions, pas nécessairement de logements ou de copropriétés, mais tout du moins de bâtiments vides, comme les bureaux par exemple. Or celles-ci ne sont jamais appliquées, pas parce que les conditions de la réquisition ne sont pas réunies mais par manque de volonté politique », assure Ian Brossat auprès de Public Sénat. « Je dis : laissons les élus locaux faire ! ». Il promet un texte court pour davantage d’efficacité.

Augmentation du nombre de logements vides

Indirectement, cette proposition de loi vise aussi la situation particulière de plusieurs grandes villes, dont Nice, Aix-en Provence et Paris où l’augmentation très marquée du nombre de logements vides soulève une inquiétude croissante dans les couloirs de la mairie. La capitale a perdu plus de 120 000 habitants en dix ans. À Paris, près d’un logement sur cinq, soit 19 % du parc d’habitations, est inoccupé, selon un rapport de L’Atelier parisien d’urbanisme (Apur) présenté en décembre. Ce chiffre englobe à la fois les résidences secondaires (10 %) laissées vides une large partie de l’année, et les habitations vacantes (9 %). Entre 2011 et 2020, la part de logement inoccupés a augmenté de 6 % pour un total de 262 000 logements vides.

Ce chiffre est toutefois à prendre avec précaution, car il englobe aussi ce que l’on appelle les vacances « frictionnelles », liées à la conjoncture du marché de l’immobilier, c’est-à-dire la rotation induite par la mobilité des familles, qui déménagent d’un appartement à un autre. « On estime plutôt à 130 000 le nombre de logements réellement vides », corrige Ian Brossat, qui a été en charge du logement auprès de la maire de Paris jusqu’à son élection au Sénat en septembre dernier.

Les arrondissements centraux sont les plus touchés (Ier, IIe, IIIe, IVe, mais aussi les Ve, VIe, VIIe et VIIIe arrondissements). La part de logements vides peut représenter dans certains cas plus d’un tiers du parc immobilier. Outre la mobilité des ménages, diverses raisons expliquent la montée en puissance du phénomène, en particulier la multiplication des résidences secondaires et l’expansion des meublés touristiques, dans le collimateur de la majorité municipale depuis plusieurs années déjà. À ce titre, le nouveau plan local d’urbanisme présenté fin mai par Anne Hidalgo prévoit d’interdire la transformation des locaux commerciaux ou de bureaux en meublés touristiques dans les secteurs les plus en tension.

330 000 personnes à la rue

La proposition de loi portée par Ian Brossat ne permettra pas de réquisitionner directement ces logements touristiques, puisqu’ils sont utilisés par leurs détenteurs. En revanche, il espère un effet dissuasif sur certains multipropriétaires. « Notre priorité, avant de se lancer dans la réquisition de logements, ce sont les bâtiments vacants », souligne l’élu. « Nous visons un double objectif avec ce texte : répondre à une urgence sociale dans un premier temps, puis pousser les propriétaires à remettre les biens qu’ils laissent dormir sur le marché. »

Accusé d’inertie face à la crise inédite que traverse le secteur du logement, le gouvernement se défend en brandissant régulièrement les efforts qui ont été fournis en matière d’hébergement d’urgence, avec la création de 40 000 places depuis 2020, pour atteindre 203 000. De son côté, la Fondation Abbé Pierre estime à 330 000 le nombre de personnes dormant à la rue, un chiffre en hausse de 9 % sur un an.

» LIRE AUSSI – Crise du logement : quelles sont les propositions des organisations du secteur ?

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« On va de la cage d’escalier à l’international », explique le nouveau directeur général de la police nationale, Louis Laugier, devant la commission des lois du Sénat lorsqu’il évoque la lutte contre le narcotrafic. Si la nomination de Louis Laugier a fait l’objet de négociations entre Bruno Retailleau et Emmanuel Macron, l’audition portait essentiellement sur la proposition de loi relative au narcotrafic qui sera examinée à partir de janvier au Sénat. Le texte fait suite à la commission d’enquête présidée par Etienne Blanc (LR) et dont le rapporteur était Jérôme Durain (PS). Un texte particulièrement attendu alors que le ministre de l’intérieur, Bruno Retailleau, a multiplié les gages de fermeté dans la lutte contre le trafic de drogue et la criminalité organisée.   Comme les sénateurs, le Directeur général de la police nationale décrit un phénomène en hausse, un « marché des stupéfiants en expansion, une forte demande des consommateurs et une offre abondante ». La criminalité organisée connaît d’ailleurs un certain nombre d’évolutions comme la multiplication des violences liées au trafic y compris dans des villes moyennes, ou encore le rajeunissement des acteurs.  « Je souhaiterais préciser que la France n’est pas dans une situation singulière. En effet, tous les Etats de l’UE sont confrontés à des situations identiques », prévient néanmoins Louis Laugier. Néanmoins, les chiffres présentés sont vertigineux avec notamment 44,8 tonnes de cocaïne saisies en 2024 (contre 23,2 tonnes en 2023). Le directeur général rapporte également que 434 000 amendes forfaitaires délictuelles ont été dressées depuis septembre 2020 pour stupéfiants.   « Certaines observations du rapport relatif à l’action de la police nationale me paraissent un peu sévères »   Pour répondre à ce phénomène massif, l’Office anti-stupéfiants (Ofast) a été mis en place en 2019. Cette agence regroupe des effectifs issus de différents services, notamment des douanes et de la police judiciaire. Alors que le rapport sénatorial propose de revoir le fonctionnement de l’Ofast pour en faire une « DEA à la française », Louis Laugier défend l’efficacité de l’agence. « Certaines observations du rapport relatif à l’action de la police nationale me paraissent un peu sévères […] le rôle de coordination de l’Ofast est réel, grâce à son caractère interministériel et son maillage territorial dense », avance le directeur général de la police nationale. Ce dernier souligne également le doublement des effectifs depuis 2020 et la présence des services sur tout le territoire grâce aux 15 antennes de l’Ofast et aux cellules de renseignement opérationnel sur les stupéfiants (CROSS) présentes dans chaque département. Louis Laugier a également défendu la souplesse de ce dispositif, affirmant qu’il n’était pas nécessaire d’inscrire les CROSS dans la loi.   Le sénateur Jérôme Durain regrette néanmoins la faible implication des services de Bercy dans l’Ofast et souligne la nécessité de les mobiliser pour continuer de développer les enquêtes patrimoniales. « L’aspect interministériel de l’Ofast, est déjà pris en compte avec les douanes, mais on peut continuer à renforcer la coopération avec les services de Bercy », reconnaît Louis Laugier. Toutefois, le directeur général de la police nationale met en exergue la progression des saisies d’avoirs criminels. « 75,3 millions d’euros d’avoirs criminels ont été saisis en 2023. Il y a eu une hausse de 60 % entre 2018 et 2023, traduisant une inflexion profonde de la stratégie de la police en ce domaine avec un développement des enquêtes patrimoniales », argumente Louis Laugier. Interrogé par la présidente de la commission des lois, Muriel Jourda (LR), sur les améliorations législatives à apporter, Louis Laugier évoque la possibilité de recourir à des confiscations provisoires tout en prenant soin d’insister sur la difficulté juridique d’une telle évolution et notamment son risque d’inconstitutionnalité.   Le directeur général de la police nationale défend l’utilité des opérations « place nette »   Dans leur rapport, les sénateurs Jérôme Durain et Etienne Blanc mettaient en avant la nécessité de renforcer la lutte contre la criminalité en augmentant la capacité de saisies des avoirs plutôt qu’en démantelant les points de deal. Les sénateurs n’avaient pas manqué d’égratigner l’efficacité des opérations « places nettes » déplorant les faibles niveaux de saisies (moins de 40 kg de cocaïne et quelques millions d’euros) au regard des effectifs mobilisés (50 000 gendarmes et policiers) entre le 25 septembre 2023 et le 12 avril 2024. 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Devant la commission des lois, le directeur général de la police nationale a tenu à saluer l’intérêt d’une réforme du statut de repenti, proposée par les sénateurs, pour élargir son périmètre aux crimes de sang. Le fonctionnaire détaille plusieurs mesures, absentes de la proposition de loi qui, selon lui, peuvent favoriser la lutte contre la criminalité organisée. Il souhaite notamment augmenter la durée des gardes à vue en matière de crime organisé pour les faire passer à 48 heures au lieu de 24, généraliser la pseudonymisation des enquêteurs ou encore faire entrer la corruption liée au trafic dans le régime de la criminalité organisée. Des propositions qu’il lie à une meilleure capacité d’écoute des policiers sur le terrain. « Il faut parler avec les personnes, vous avez entièrement raison. Ce travail-là peut avoir été occulté par l’action immédiate en réponse à la délinquance. Et donc oui je crois qu’il faut créer un lien. J’ai transmis des consignes dès que je suis entré en fonction », affirme Louis Laugier en réponse à une question de la sénatrice Corinne Narassiguin (PS).   Enfin, le directeur général de la police nationale plaide pour la création d’un nouveau cadre juridique et « d’une technique spéciale de captation des données à distance, aux fins de captation d’images et de sons relevant de la criminalité ou de la délinquance organisée ». Dans une décision du 16 novembre 2023, le Conseil constitutionnel avait néanmoins jugé inconstitutionnelle l’activation à distance des téléphones portables permettant la voix et l’image des suspects à leur insu. 

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