Illustration : Assemblee Nationale

Pourquoi le poste de président de la commission des finances est très convoité

Très convoitée, la présidence de la puissante commission des finances de l’Assemblée nationale est réservée à un(e) député(e) de l’opposition depuis 2007. Quels sont les pouvoirs associés à ce poste ? Comment sera élu samedi le futur président de la commission ? Mode d’emploi.
Rédaction Public Sénat

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C’est sans doute la plus puissante des huit commissions permanentes de l’Assemblée nationale. La très stratégique « comfi » a aussi pour particularité d’échoir à un élu de l’opposition. Chargée de contrôler et de suivre l’exécution du budget de l’Etat, d’examiner les recettes et les dépenses, à la manœuvre lors de tout l’automne budgétaire, la commission des finances suscite la convoitise de nombreux groupes. Voilà pourquoi.

Une commission aux pouvoirs étendus

La commission des finances contrôle d’abord tous les ans les projets de loi de finances, qui contiennent toutes les recettes et les dépenses de l’année à venir. La commission a aussi pour tâche de surveiller l’application de ce budget. A ce titre et en cas de doute, le président de la commission des finances peut procéder à un contrôle sur place et sur pièces. Exemple récent, le contrôle effectué par la commission des finances du Sénat à Bercy, pour obtenir la communication des documents expliquant la dégradation du déficit de la France en 2023. En cas de défaillance, elle peut convoquer les ministres en audition et exercer essentiellement sur eux une pression médiatique.

Le recours à l’article 40 de la Constitution

Autre pouvoir essentiel du président de la commission des finances, celui de vérifier la recevabilité financière des initiatives des autres députés. L’article 40 de la Constitution dispose que « les propositions et amendements formulés par les membres du Parlement ne sont pas recevables lorsque leur adoption aurait pour conséquence soit une diminution des ressources publiques, soit la création ou l’aggravation d’une charge publique ». Sur ce motif, le président de la commission des finances peut rejeter un amendement à un texte s’il estime qu’il est mal financé.

Il y a donc une part d’appréciation dans le recours à l’article 40. Ainsi, en 2015, Gilles Carrez, alors président de la commission des finances a admis que les députés pouvaient prévoir des dispositions à titre expérimental, ce qui a permis de desserrer l’étau de l’article 40. Éric Coquerel, président (LFI) sortant, eu lui aussi une appréciation souple de la recevabilité financière. L’an dernier, il s’est prononcé en faveur d’une abrogation de cet article 40. Dans une tribune, alors que la majorité présidentielle d’alors voulait pouvoir utiliser cet article pour empêcher l’examen d’une proposition de loi LIOT abrogeant la réforme des retraites, il a considéré que cet article instaurait une « inégalité entre l’exécutif, dont les projets de loi ne sont pas astreints au respect de l’article 40, et le législatif, pour qui c’est le cas. »

Un élu de l’opposition depuis 2007

Depuis 2007, le président de la commission des finances est toujours un élu de l’opposition. Objectif : renforcer le contrôle parlementaire sur les questions budgétaire et financière, un parlementaire de l’opposition portant naturellement un regard plus sévère sur la gestion des finances publiques par le gouvernement. Cette situation était d’abord un usage mis en place par Nicolas Sarkozy en 2007, mais à la suite de la révision constitutionnelle de 2008, elle a fait son apparition dans les règlements des deux Assemblées. En 2024, tous les groupes, à l’exception de ceux qui appartiennent clairement à la majorité présidentielle, se sont inscrits comme groupes d’opposition : le jeu est donc très ouvert pour l’élection de samedi.

Comment se déroule le vote pour élire le président ?

Le président de commission est élu par les membres de la commission, lors d’un vote à bulletins secrets. Comme pour la présidence de l’Assemblée, les deux premiers tours requièrent la majorité absolue pour l’emporter. Au 3e tour, c’est le candidat qui remporte le plus de voix qui l’emporte. En cas d’égalité, le plus âgé l’emporte.

Déjà en 2022, la présidence de la commission des finances a été très disputée car le règlement ne précise pas si la présidence doit échoir à un groupe d’opposition en particulier (par exemple, celui dont les effectifs sont les plus importants). L’abstention de la majorité présidentielle a ainsi abouti à l’élection d’Éric Coquerel (LFI) qui faisait face à Jean-Philippe Tanguy (RN), Charles de Courson (LIOT) et Véronique Louwagie (LR). Cette année encore, on peut se demander si la majorité présidentielle s’abstiendra ou choisira de soutenir la candidate de la Droite républicaine, comme un renvoi d’ascenseur au soutien apporté par le groupe de droite à l’élection de Yaël Braun-Pivet pour le perchoir. Si tel était le cas, ce partage des postes serait forcément analysé comme autant de premières pierres posées à un pacte plus large entre Ensemble et la droite.

 

Tâm Tran Huy

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