Le Sénat rejette le budget 2024 du Sport, « pas à la hauteur des enjeux »

Les sénateurs n’ont pas voulu approuver les crédits de la mission « sport, jeunesse et vie associative » ce 11 décembre 2023. L’après Jeux olympiques constitue un sujet d’inquiétude tout comme les financements pour développer la pratique du sport dans la population.
Guillaume Jacquot

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Nouveau coup de sifflet au Sénat, dans l’examen du projet de loi de finances pour 2024. Les parlementaires, dans la dernière ligne droite de leur marathon budgétaire, ont rejeté ce 11 décembre 2023 à la mi-journée, les crédits de la commission « sport, jeunesse et vie associative ». De nombreux groupes, aussi bien la majorité sénatoriale de droit et du centre, que les trois groupes de gauche, ont refusé d’apporter leur soutien à ce budget. Tout un symbole à quelques mois des Jeux olympiques et paralympiques. Beaucoup reconnaissent que les chantiers et la préparation de cet évènement international se déroulent de façon satisfaisante. Mais c’est sur les moyens accordés au sport du quotidien que les parlementaires ont exprimé leur désapprobation.

« Les crédits sont en décalage avec l’objectif de bâtir une nation sportive », a déploré le rapporteur pour avis Jean-Jacques Lozach (PS). Pour lui et ses collègues de la commission de la culture et de l’éducation, ce budget n’est « pas à la hauteur des enjeux », encore moins des engagements pris par Emmanuel Macron après son arrivée à l’Élysée. L’an prochain, le sport ne représentera que 0,2 % des dépenses de l’État.

« Vaste opération de communication »

Si les orientations sont jugées bienvenues, leur ampleur est très loin de répondre aux besoins, aux yeux de toutes les oppositions représentées au Sénat. L’augmentation de près de 8 %, des moyens dédiés au sport, « est une hausse en trompe-l’œil qui compense à peine l’inflation », s’est inquiété le sénateur LR Michel Savin.

Le porte-drapeau des Républicains sur la thématique doute qu’avec ces moyens, « qui ne sont pas au rendez-vous, la France pourra répondre à sa grande cause nationale pour l’année 2024, à savoir la promotion de l’activité physique et sportive ». « L’opération s’apparente à une vaste opération de communication, sans fondations solides, plutôt qu’un projet structurant pour notre nation », s’est exclamé le sénateur de l’Isère.

« Nous voyons plutôt la piscine olympique à moitié vide, plutôt qu’à moitié pleine »

Patrick Kanner, l’ancien ministre des Sports, a n’est guère non plus été enthousiaste face à la copie du gouvernement. « Ce n’est pas acceptable pour le groupe socialiste, écologiste et républicain que j’ai l’honneur de présider. Nous voyons plutôt la piscine olympique à moitié vide, plutôt qu’à moitié pleine. »

Même forme d’interrogations face aux promesses d’une « nation sportive », dans le groupe Union centriste. « La grande cause nationale, dotée de 10,5 millions d’euros en verra la moitié consacrée à des campagnes de communication. Il en faudra bien plus pour mettre les Françaises et les Français sur le chemin de la pratique sportive », a plaidé le sénateur Claude Kern.

D’un banc à l’autre, les mêmes reproches ont fusé. Impossible de provoquer une réelle démocratisation du sport. « Il est temps Madame la ministre, de rappeler au président de la République, que le sport ne se résume pas à de la communication politique entre grands évènements sportifs et réconfort de Kylian Mbappé », a raillé l’écologiste Mathilde Ollivier.

Au Sénat, c’est bien le cri d’alarme du sport éducatif et des clubs amateurs qui a été relayé. Les infrastructures en « piteux état », selon les mots de Jérémy Bacchi (groupe communiste), en sont l’exemple. L’Agence nationale du sport estime que 60 % des équipements sportifs, soit 180 000 d’entre eux, sont vétustes. Michel Savin a plaidé pour un « véritable Plan Marshall sur les équipements structurants, notamment sur les piscines », comme dans les années 1970. Pour ne rien arranger, le nombre de licenciés dans les clubs a baissé de 15 % en 2021, et plus de 3 000 clubs ont mis la clé sous la porte la même année. La hausse du Service national universel (SNU) passe d’autant plus mal dans ce contexte. « Le SNU, lui, ne connaît pas la crise », s’est agacé Jérémy Bacchi.

« Jamais un gouvernement n’aura mené une politique sportive aussi ambitieuse pour notre pays »

Face ce tableau, une critique est souvent revenue dans les débats, au sujet des moyens de l’Agence nationale du sport (ANS). Les recettes des paris sportifs ont beau augmenter, le plafond du montant des taxes affectées à l’ANS n’a pas été modifié.

De son côté, le gouvernement a insisté sur les investissements entrepris ces dernières années. « Jamais un gouvernement n’aura mené une politique sportive aussi ambitieuse pour notre pays », a affirmé la ministre des Sports Amélie Oudéa-Castéra. « La hausse des crédits de mon ministère depuis 2020, elle atteint 68 %. Mais qui a fait cela avant ? » Elle a également promis un milliard d’euros d’investissements en matière d’équipements entre 2017 et 2027.

Les critiques de la majorité de l’hémicycle ont également été mal vécues du côté des sénateurs macronistes. « Esprit olympique, es-tu là ? La course au dénigrement bat son plein. Arrêtons de tirer contre notre camp », a encouragé le sénateur Renaissance de l’Isère, Didier Rambaud.

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« On va de la cage d’escalier à l’international », explique le nouveau directeur général de la police nationale, Louis Laugier, devant la commission des lois du Sénat lorsqu’il évoque la lutte contre le narcotrafic. Si la nomination de Louis Laugier a fait l’objet de négociations entre Bruno Retailleau et Emmanuel Macron, l’audition portait essentiellement sur la proposition de loi relative au narcotrafic qui sera examinée à partir de janvier au Sénat. Le texte fait suite à la commission d’enquête présidée par Etienne Blanc (LR) et dont le rapporteur était Jérôme Durain (PS). Un texte particulièrement attendu alors que le ministre de l’intérieur, Bruno Retailleau, a multiplié les gages de fermeté dans la lutte contre le trafic de drogue et la criminalité organisée.   Comme les sénateurs, le Directeur général de la police nationale décrit un phénomène en hausse, un « marché des stupéfiants en expansion, une forte demande des consommateurs et une offre abondante ». La criminalité organisée connaît d’ailleurs un certain nombre d’évolutions comme la multiplication des violences liées au trafic y compris dans des villes moyennes, ou encore le rajeunissement des acteurs.  « Je souhaiterais préciser que la France n’est pas dans une situation singulière. En effet, tous les Etats de l’UE sont confrontés à des situations identiques », prévient néanmoins Louis Laugier. Néanmoins, les chiffres présentés sont vertigineux avec notamment 44,8 tonnes de cocaïne saisies en 2024 (contre 23,2 tonnes en 2023). Le directeur général rapporte également que 434 000 amendes forfaitaires délictuelles ont été dressées depuis septembre 2020 pour stupéfiants.   « Certaines observations du rapport relatif à l’action de la police nationale me paraissent un peu sévères »   Pour répondre à ce phénomène massif, l’Office anti-stupéfiants (Ofast) a été mis en place en 2019. Cette agence regroupe des effectifs issus de différents services, notamment des douanes et de la police judiciaire. Alors que le rapport sénatorial propose de revoir le fonctionnement de l’Ofast pour en faire une « DEA à la française », Louis Laugier défend l’efficacité de l’agence. « Certaines observations du rapport relatif à l’action de la police nationale me paraissent un peu sévères […] le rôle de coordination de l’Ofast est réel, grâce à son caractère interministériel et son maillage territorial dense », avance le directeur général de la police nationale. Ce dernier souligne également le doublement des effectifs depuis 2020 et la présence des services sur tout le territoire grâce aux 15 antennes de l’Ofast et aux cellules de renseignement opérationnel sur les stupéfiants (CROSS) présentes dans chaque département. Louis Laugier a également défendu la souplesse de ce dispositif, affirmant qu’il n’était pas nécessaire d’inscrire les CROSS dans la loi.   Le sénateur Jérôme Durain regrette néanmoins la faible implication des services de Bercy dans l’Ofast et souligne la nécessité de les mobiliser pour continuer de développer les enquêtes patrimoniales. « L’aspect interministériel de l’Ofast, est déjà pris en compte avec les douanes, mais on peut continuer à renforcer la coopération avec les services de Bercy », reconnaît Louis Laugier. Toutefois, le directeur général de la police nationale met en exergue la progression des saisies d’avoirs criminels. « 75,3 millions d’euros d’avoirs criminels ont été saisis en 2023. Il y a eu une hausse de 60 % entre 2018 et 2023, traduisant une inflexion profonde de la stratégie de la police en ce domaine avec un développement des enquêtes patrimoniales », argumente Louis Laugier. Interrogé par la présidente de la commission des lois, Muriel Jourda (LR), sur les améliorations législatives à apporter, Louis Laugier évoque la possibilité de recourir à des confiscations provisoires tout en prenant soin d’insister sur la difficulté juridique d’une telle évolution et notamment son risque d’inconstitutionnalité.   Le directeur général de la police nationale défend l’utilité des opérations « place nette »   Dans leur rapport, les sénateurs Jérôme Durain et Etienne Blanc mettaient en avant la nécessité de renforcer la lutte contre la criminalité en augmentant la capacité de saisies des avoirs plutôt qu’en démantelant les points de deal. Les sénateurs n’avaient pas manqué d’égratigner l’efficacité des opérations « places nettes » déplorant les faibles niveaux de saisies (moins de 40 kg de cocaïne et quelques millions d’euros) au regard des effectifs mobilisés (50 000 gendarmes et policiers) entre le 25 septembre 2023 et le 12 avril 2024. Des réserves renouvelées par Jérôme Durain pendant l’audition. « En un an les services de la DGPN ont initié 279 opérations de cette nature qui ont conduit à l’interpellation de 6 800 personnes, la saisie de 690 armes, de 7,5 millions d’euros d’avoirs criminels et plus d’1,7 tonne de stupéfiants », avance Louis Laugier. « Le fait d’avoir une opération où on affiche un effet ‘force’ sur le terrain est important », poursuit le directeur général de la police nationale qui dit avoir conscience que ces opérations « ne se suffisent pas à elles-mêmes ».   Plusieurs pistes absentes de la proposition de loi   Au-delà de l’approche matérielle, Louis Laugier insiste sur le besoin de renforcement des moyens d’enquêtes et de renseignement, notamment humains ainsi que l’adaptation du cadre législatif. Devant la commission des lois, le directeur général de la police nationale a tenu à saluer l’intérêt d’une réforme du statut de repenti, proposée par les sénateurs, pour élargir son périmètre aux crimes de sang. Le fonctionnaire détaille plusieurs mesures, absentes de la proposition de loi qui, selon lui, peuvent favoriser la lutte contre la criminalité organisée. Il souhaite notamment augmenter la durée des gardes à vue en matière de crime organisé pour les faire passer à 48 heures au lieu de 24, généraliser la pseudonymisation des enquêteurs ou encore faire entrer la corruption liée au trafic dans le régime de la criminalité organisée. Des propositions qu’il lie à une meilleure capacité d’écoute des policiers sur le terrain. « Il faut parler avec les personnes, vous avez entièrement raison. Ce travail-là peut avoir été occulté par l’action immédiate en réponse à la délinquance. Et donc oui je crois qu’il faut créer un lien. 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