Budget : le ministre assure que le SNU ne sera pas supprimé, haro des sénateurs sur « un dispositif très coûteux »

Devant le Sénat, le ministre des Sports a expliqué que le contexte budgétaire ne permettrait pas de déployer la généralisation du Service national universel, annoncée pour 2026. Face à lui, les parlementaires de tous bords, très critiques sur les dépenses de ce dispositif voulu par le président de la République, réclament carrément sa suppression.
Romain David

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Il n’y aura pas de généralisation du Service national universel (SNU) d’ici deux ans, comme prévu initialement par l’exécutif. Ce dispositif lancé en 2019, issu d’une promesse de campagne d’Emmanuel Macron, sera directement percuté par la rigueur budgétaire qu’impose le dérapage du déficit public. « La généralisation annoncée pour 2026 demande un engagement financier, aujourd’hui inatteignable, en tout cas les crédits 2025 ne nous permettront pas d’aller au-delà de ce qui a été fait en 2024 », a déclaré Gil Avérous, le Ministre des Sports, de la Jeunesse et de la Vie associative, lors d’une audition devant le Sénat, ce mercredi 30 octobre.

Dans le projet de loi de finances (PLF) 2025, le budget alloué au SNU marque une très nette baisse, passant de 160 millions à 128 millions d’euros. En conséquence, le dispositif qui pouvait cibler 80 000 volontaires en 2024, ne serait plus en mesure d’en accueillir que 66 000 en 2025. « Sauf coup de rabot supplémentaire… », précise le ministre. En effet, le gouvernement espère encore dégager 5 milliards d’euros d’économies dans le budget général. Dans ce cadre, Gil Avérous évoque un nouvel effort de 55 millions d’euros sur son ministère.

Si c’est le cas, cette nouvelle baisse sera « redirigée à hauteur de 49 millions d’euros vers le SNU », précise le ministre. Ce qui réduirait à nouveau le nombre de stages prévus à seulement 40 000. Actuellement, « les inscriptions pour 2025 sont à hauteur de 35 700 », a tenu à préciser l’ancien LR.

Les remontrances de la Cour des comptes

Inspirée du service militaire, le SNU se divise en deux volets : une « mission d’intérêt général » et un « séjour de cohésion », centré notamment sur des activités sportives et culturelles. L’objectif affiché : le rendre obligatoire pour toute une classe d’âge, soit environ 800 000 personnes. Mais en septembre dernier, la Cour des comptes a livré un rapport particulièrement sévère sur ce service civil, épinglant son déploiement laborieux et un coût « largement sous-estimé ».

« Le SNU est un sujet qui fait débat », a reconnu Gil Avérous devant les sénateurs. « Les finalités recherchées par le dispositif sont infiniment louables : promouvoir l’engagement, la cohésion autour des valeurs de la République et la mixité sociale. Toutefois, il convient de s’interroger sur le format du dispositif, son contour et son coût. »

Une petite phrase qui a aussitôt fait réagir les parlementaires, le SNU faisant pratiquement l’unanimité contre lui sur les bancs de la Chambre haute. Un « dispositif très coûteux » pour le socialiste Yan Chantrel qui se « réjouit » de la baisse des crédits. Son collègue communiste Pierre Ouzoulias évoque un « éléphant blanc ». « Est-ce que l’exécutif n’a pas « imaginé une suppression sèche du SNU » ?, interroge la centriste Annick Billon devant la réduction des crédits.

Pas de suppression du SNU

Finalement, c’est la sénatrice écologiste Mathilde Ollivier, benjamine du Sénat, qui finit par mettre les pieds dans le plat : « Est-ce que ce n’est pas le moment de faire entendre raison au président, de lui dire stop, et de réorienter les fonds vers d’autres programmes ? »

« À un moment, il faut faire des choix. On ne peut pas entendre d’un côté des discussions de responsabilisation sur les finances publiques et de l’autre des circonvolutions – si je peux ainsi qualifier vos propos -, nous disant que l’on va rediscuter du contour, du format et du coût… », a abondé Colombe Brossel, élue PS de Paris. « Actons le fait que c’est un échec, cela arrive parfois avec les politiques publiques. »

« Non, pas de suppression sèche envisagée », a assuré Gil Avérous qui, après cette exécution en règle, n’avait plus qu’un seul argument pour tenter de défendre le dispositif : « 94% de ceux qui y participent trouvent que c’est une bonne formule. » Un satisfecit qui, vraisemblablement, n’empêchera pas les élus de tous bords de présenter des amendements de suppression lorsque la discussion budgétaire s’ouvrira au Sénat, le 25 novembre.

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« On va de la cage d’escalier à l’international », explique le nouveau directeur général de la police nationale, Louis Laugier, devant la commission des lois du Sénat lorsqu’il évoque la lutte contre le narcotrafic. Si la nomination de Louis Laugier a fait l’objet de négociations entre Bruno Retailleau et Emmanuel Macron, l’audition portait essentiellement sur la proposition de loi relative au narcotrafic qui sera examinée à partir de janvier au Sénat. Le texte fait suite à la commission d’enquête présidée par Etienne Blanc (LR) et dont le rapporteur était Jérôme Durain (PS). Un texte particulièrement attendu alors que le ministre de l’intérieur, Bruno Retailleau, a multiplié les gages de fermeté dans la lutte contre le trafic de drogue et la criminalité organisée.   Comme les sénateurs, le Directeur général de la police nationale décrit un phénomène en hausse, un « marché des stupéfiants en expansion, une forte demande des consommateurs et une offre abondante ». La criminalité organisée connaît d’ailleurs un certain nombre d’évolutions comme la multiplication des violences liées au trafic y compris dans des villes moyennes, ou encore le rajeunissement des acteurs.  « Je souhaiterais préciser que la France n’est pas dans une situation singulière. En effet, tous les Etats de l’UE sont confrontés à des situations identiques », prévient néanmoins Louis Laugier. Néanmoins, les chiffres présentés sont vertigineux avec notamment 44,8 tonnes de cocaïne saisies en 2024 (contre 23,2 tonnes en 2023). Le directeur général rapporte également que 434 000 amendes forfaitaires délictuelles ont été dressées depuis septembre 2020 pour stupéfiants.   « Certaines observations du rapport relatif à l’action de la police nationale me paraissent un peu sévères »   Pour répondre à ce phénomène massif, l’Office anti-stupéfiants (Ofast) a été mis en place en 2019. Cette agence regroupe des effectifs issus de différents services, notamment des douanes et de la police judiciaire. Alors que le rapport sénatorial propose de revoir le fonctionnement de l’Ofast pour en faire une « DEA à la française », Louis Laugier défend l’efficacité de l’agence. « Certaines observations du rapport relatif à l’action de la police nationale me paraissent un peu sévères […] le rôle de coordination de l’Ofast est réel, grâce à son caractère interministériel et son maillage territorial dense », avance le directeur général de la police nationale. Ce dernier souligne également le doublement des effectifs depuis 2020 et la présence des services sur tout le territoire grâce aux 15 antennes de l’Ofast et aux cellules de renseignement opérationnel sur les stupéfiants (CROSS) présentes dans chaque département. Louis Laugier a également défendu la souplesse de ce dispositif, affirmant qu’il n’était pas nécessaire d’inscrire les CROSS dans la loi.   Le sénateur Jérôme Durain regrette néanmoins la faible implication des services de Bercy dans l’Ofast et souligne la nécessité de les mobiliser pour continuer de développer les enquêtes patrimoniales. « L’aspect interministériel de l’Ofast, est déjà pris en compte avec les douanes, mais on peut continuer à renforcer la coopération avec les services de Bercy », reconnaît Louis Laugier. Toutefois, le directeur général de la police nationale met en exergue la progression des saisies d’avoirs criminels. « 75,3 millions d’euros d’avoirs criminels ont été saisis en 2023. Il y a eu une hausse de 60 % entre 2018 et 2023, traduisant une inflexion profonde de la stratégie de la police en ce domaine avec un développement des enquêtes patrimoniales », argumente Louis Laugier. Interrogé par la présidente de la commission des lois, Muriel Jourda (LR), sur les améliorations législatives à apporter, Louis Laugier évoque la possibilité de recourir à des confiscations provisoires tout en prenant soin d’insister sur la difficulté juridique d’une telle évolution et notamment son risque d’inconstitutionnalité.   Le directeur général de la police nationale défend l’utilité des opérations « place nette »   Dans leur rapport, les sénateurs Jérôme Durain et Etienne Blanc mettaient en avant la nécessité de renforcer la lutte contre la criminalité en augmentant la capacité de saisies des avoirs plutôt qu’en démantelant les points de deal. Les sénateurs n’avaient pas manqué d’égratigner l’efficacité des opérations « places nettes » déplorant les faibles niveaux de saisies (moins de 40 kg de cocaïne et quelques millions d’euros) au regard des effectifs mobilisés (50 000 gendarmes et policiers) entre le 25 septembre 2023 et le 12 avril 2024. Des réserves renouvelées par Jérôme Durain pendant l’audition. « En un an les services de la DGPN ont initié 279 opérations de cette nature qui ont conduit à l’interpellation de 6 800 personnes, la saisie de 690 armes, de 7,5 millions d’euros d’avoirs criminels et plus d’1,7 tonne de stupéfiants », avance Louis Laugier. « Le fait d’avoir une opération où on affiche un effet ‘force’ sur le terrain est important », poursuit le directeur général de la police nationale qui dit avoir conscience que ces opérations « ne se suffisent pas à elles-mêmes ».   Plusieurs pistes absentes de la proposition de loi   Au-delà de l’approche matérielle, Louis Laugier insiste sur le besoin de renforcement des moyens d’enquêtes et de renseignement, notamment humains ainsi que l’adaptation du cadre législatif. Devant la commission des lois, le directeur général de la police nationale a tenu à saluer l’intérêt d’une réforme du statut de repenti, proposée par les sénateurs, pour élargir son périmètre aux crimes de sang. Le fonctionnaire détaille plusieurs mesures, absentes de la proposition de loi qui, selon lui, peuvent favoriser la lutte contre la criminalité organisée. Il souhaite notamment augmenter la durée des gardes à vue en matière de crime organisé pour les faire passer à 48 heures au lieu de 24, généraliser la pseudonymisation des enquêteurs ou encore faire entrer la corruption liée au trafic dans le régime de la criminalité organisée. Des propositions qu’il lie à une meilleure capacité d’écoute des policiers sur le terrain. « Il faut parler avec les personnes, vous avez entièrement raison. Ce travail-là peut avoir été occulté par l’action immédiate en réponse à la délinquance. Et donc oui je crois qu’il faut créer un lien. J’ai transmis des consignes dès que je suis entré en fonction », affirme Louis Laugier en réponse à une question de la sénatrice Corinne Narassiguin (PS).   Enfin, le directeur général de la police nationale plaide pour la création d’un nouveau cadre juridique et « d’une technique spéciale de captation des données à distance, aux fins de captation d’images et de sons relevant de la criminalité ou de la délinquance organisée ». Dans une décision du 16 novembre 2023, le Conseil constitutionnel avait néanmoins jugé inconstitutionnelle l’activation à distance des téléphones portables permettant la voix et l’image des suspects à leur insu. 

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