« L’avenir de la France et de la gauche ne peut pas être dépendant de l’avenir électoral de M. Mélenchon », estime Patrick Kanner

Afin de sortir de l’ornière budgétaire, les parlementaires socialistes et écologistes proposent de discuter d’un accord permettant à la gauche de gouverner avec le soutien du bloc central. Mais les contours d’un tel accord restent flous, et LFI a d’ores et déjà écarté cette possibilité.
Louis Mollier-Sabet

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« Le Nouveau Front populaire n’est qu’une alliance électorale […]. L’avenir de la France et de la gauche ne peut pas être dépendant de l’avenir électoral de M. Mélenchon », estime Patrick Kanner, président du groupe socialiste au Sénat, qui n’a jamais caché sa distance à la stratégie politique développée par la France Insoumise. Dans une lettre signée aux côtés de Boris Vallaud, président du groupe à l’Assemblée et d’Olivier Faure, Premier secrétaire, les responsables socialistes proposent au Président de la République « que les partis ayant participé en juillet dernier au Front Républicain, bâtissent une méthode en mesure de faire émerger des majorités texte par texte au Parlement. »

Les dirigeants du PS réaffirment par ailleurs « leur volonté de voir appelé aux responsabilités un Premier ministre de gauche, ouvert au compromis » et qui renonce à l’usage du 49-3, tout en admettant « ne pas avoir reçu de chèque en blanc » lors des dernières élections qui ont placé le NFP en tête, mais pas majoritaire. Une chose est sûre, en n’appelant pas le Président de la République à démissionner, comme le demande LFI, mais au contraire à recevoir les chefs de partis et présidents de groupe parlementaires en ces termes, le Parti socialiste – mais aussi Les Écologistes, qui ont rédigé un courrier semblable – ouvrent la porte à la formation d’une majorité mêlant la gauche et le « socle commun. »

Une main tendue qui a fait réagir Manuel Bompard, coordinateur de LFI, dans les colonnes de Libération ce jeudi : « J’ai bien vu ces derniers jours les mains tendues au bloc macroniste pour constituer une coalition. Je pense effectivement au PS ou aux déclarations de Yannick Jadot, qui propose une grande coalition allant du NFP aux macronistes. C’est une impasse et une chimère. Elle conduirait à l’abandon de l’essentiel de notre programme de rupture puisque les macronistes ont fait la démonstration qu’ils n’étaient prêts à accepter aucun compromis. »

« Une majorité de la droite modérée à la gauche républicaine »

Sans LFI donc, quelle forme prendrait cette nouvelle majorité ? D’après Patrick Kanner, la censure du gouvernement Barnier démontre que « le coup de barre à droite du Président a échoué lamentablement », et qu’ainsi, « la logique voudrait que ce soit un coup de barre à gauche qui permette de dégager cette majorité ponctuelle pour rassurer le pays. » Pour autant, le sénateur du Nord ne se fait pas d’illusions sur la probabilité d’une nomination d’un Premier ministre de gauche par Emmanuel Macron, mais assume « clairement » que « le PS portera soutien à des mesures positives qui iront dans le bon sens », comme il l’avait fait lors de l’examen de la LOPMI « visant à renforcer les moyens de la police et de la gendarmerie » portée par Gérald Darmanin, rappelle le président du groupe socialiste au Sénat.

Du côté des forces du fameux « socle commun » qui rassemble parlementaires macronistes et LR, on accueille cette proposition plutôt favorablement, mais avec des interrogations. « On est en train d’assister à la victoire de cette secte de gauchistes dirigée par un gourou colérique » tacle Claude Malhuret, président du groupe Les Indépendants et membre d’Horizons. « Ce qui me navre c’est que le PS se soit laissé enfermer par ce gourou, mais peut être que ça changera à court terme je l’espère », poursuit ce proche d’Edouard Philippe, qui a toujours défendu la création « d’une majorité depuis la droite modérée jusqu’à la gauche républicaine. »

Il est rejoint par Christine Lavarde, sénatrice LR, qui estime que si « l’idéal » serait de s’accorder sur un programme de gouvernement, l’urgence des textes budgétaires l’empêchait. Et qu’il était donc temps de « faire travailler ensemble un nombre de députés et de sénateurs qui suffisent pour avoir une majorité stable. » La sénatrice des Hauts-de-Seine met, elle aussi, un préalable à la constitution de cette majorité : « Je n’ai toujours pas entendu de la part de M. Kanner que le PS se détacherait de LFI et de tous ces politiques qui ne respectent pas notre droit, et qui font des happenings quand ça ne leur plaît pas. »

« Je ne suis pas à l’école », lui répond Patrick Kanner, qui renvoie à la position exprimée par la lettre envoyée ce jour au Président de la République, qui s’exprimera à 20h dans une allocution.

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