IVG dans la Constitution : « Le Sénat est une étape compliquée », mais Laurence Rossignol se dit « confiante »

Une nouvelle étape a été franchie, mercredi 24 janvier 2024, avec le vote dans la soirée par l’Assemblée nationale de l’article unique du projet de loi d’inscription dans la Constitution de l’interruption volontaire de grossesse. Prochaine étape : le vote solennel des députés le 30 janvier avant que le Sénat ne soit saisi. A la Chambre Haute, une partie de la droite est hostile à cette constitutionnalisation.
Quentin Calmet

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« C’est un adage connu chez les féministes : une bonne féministe est une féministe morte », ironise Laurence Rossignol. Hier, le débat a repris à l’Assemblée nationale, sur l’introduction de l’interruption volontaire de grossesse (IVG), dans la Constitution. Une séance marquée par un échange entre le LR Aurélien Pradié et plusieurs élues de gauche. Le député du Lot les a accusées « d’hystériser les débats » (L’échange est à voir dans cet article de LCP-AN)

« Les féministes qualifiées d’hystériques »

« On adore les féministes d’hier, et on déteste celles d’aujourd’hui », réagit ce jeudi 25 janvier 2024, Laurence Rossignol avant de continuer : « Ce qu’Aurélien Pradié ignore c’est qu’au moment de la bataille pour la légalisation de l’IVG, [à l’hiver 1974, ndlr], les féministes étaient déjà qualifiées ‘d’hystériques’. Donc toute féministe est toujours qualifiée d’hystérique au temps dans lequel elle s’exprime, et après on s’est habitué, et on les regrette. »

 

Que va faire le Sénat ?

A l’Assemblée nationale, le texte du gouvernement doit encore faire l’objet d’un vote solennel, le 30 janvier. Mais en séance hier, une large majorité s’est dessinée, parmi les parlementaires présents en séance. L’article unique du projet de loi a été adopté par 99 voix « pour » et 13 « contre ».

Le plus compliqué reste à faire, avec l’examen du texte au Sénat, la Chambre Haute du Parlement. Mardi 23 janvier 2024, le président de l’institution, Gérard Larcher, s’est dit opposé à l’inscription de l’IVG dans la Constitution. L’interruption volontaire de grossesse « n’est pas menacée dans notre pays. S’il était menacé, croyez-moi, je me battrai pour qu’il soit maintenu. Mais je pense que la Constitution n’est pas un catalogue de droits sociaux et sociétaux », a expliqué sur France Info, le président du Sénat.

« Je ne vois pas pourquoi cela bloquerait », argumente aujourd’hui Laurence Rossignol, en réponse aux propos de Gérard Larcher. « Il y a des droits garantis, ou des libertés garanties. » Elle  ajoute : « Il y a un an, sur la base de l’amendement déposé par Philippe Bas, nous avons adopté la proposition de loi. » Le vote en février 2023 était alors de 166 voix « pour » et 152 voix « contre ». « Je ne vois pas pourquoi aujourd’hui, il y aurait moins de sénateurs qui la voteraient que la fois précédente. D’autant que la rédaction retenue par le gouvernement est quand même très très proche de la rédaction du Sénat », analyse Laurence Rossignol.

Quant à l’argument d’une absence de danger pour le droit à l’IVG, l’ancienne ministre des familles, de l’enfance et des droits des femmes (2014-2017) ajoute : « J’observe simplement que dans tous les pays où l’extrême droite, où les droites dures, populistes, sont au pouvoir, partout où ils gouvernent, les droits des femmes, et en particulier les droits à l’IVG mais aussi à la pilule du lendemain sont attaqués et mis en cause. Nous avons une situation où la menace de l’extrême droite est une réalité politique. Je ne crois pas à l’exception française ».

Le texte arrive le 28 février en séance au Sénat.

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« On va de la cage d’escalier à l’international », explique le nouveau directeur général de la police nationale, Louis Laugier, devant la commission des lois du Sénat lorsqu’il évoque la lutte contre le narcotrafic. Si la nomination de Louis Laugier a fait l’objet de négociations entre Bruno Retailleau et Emmanuel Macron, l’audition portait essentiellement sur la proposition de loi relative au narcotrafic qui sera examinée à partir de janvier au Sénat. Le texte fait suite à la commission d’enquête présidée par Etienne Blanc (LR) et dont le rapporteur était Jérôme Durain (PS). Un texte particulièrement attendu alors que le ministre de l’intérieur, Bruno Retailleau, a multiplié les gages de fermeté dans la lutte contre le trafic de drogue et la criminalité organisée.   Comme les sénateurs, le Directeur général de la police nationale décrit un phénomène en hausse, un « marché des stupéfiants en expansion, une forte demande des consommateurs et une offre abondante ». La criminalité organisée connaît d’ailleurs un certain nombre d’évolutions comme la multiplication des violences liées au trafic y compris dans des villes moyennes, ou encore le rajeunissement des acteurs.  « Je souhaiterais préciser que la France n’est pas dans une situation singulière. En effet, tous les Etats de l’UE sont confrontés à des situations identiques », prévient néanmoins Louis Laugier. Néanmoins, les chiffres présentés sont vertigineux avec notamment 44,8 tonnes de cocaïne saisies en 2024 (contre 23,2 tonnes en 2023). Le directeur général rapporte également que 434 000 amendes forfaitaires délictuelles ont été dressées depuis septembre 2020 pour stupéfiants.   « Certaines observations du rapport relatif à l’action de la police nationale me paraissent un peu sévères »   Pour répondre à ce phénomène massif, l’Office anti-stupéfiants (Ofast) a été mis en place en 2019. Cette agence regroupe des effectifs issus de différents services, notamment des douanes et de la police judiciaire. Alors que le rapport sénatorial propose de revoir le fonctionnement de l’Ofast pour en faire une « DEA à la française », Louis Laugier défend l’efficacité de l’agence. « Certaines observations du rapport relatif à l’action de la police nationale me paraissent un peu sévères […] le rôle de coordination de l’Ofast est réel, grâce à son caractère interministériel et son maillage territorial dense », avance le directeur général de la police nationale. Ce dernier souligne également le doublement des effectifs depuis 2020 et la présence des services sur tout le territoire grâce aux 15 antennes de l’Ofast et aux cellules de renseignement opérationnel sur les stupéfiants (CROSS) présentes dans chaque département. Louis Laugier a également défendu la souplesse de ce dispositif, affirmant qu’il n’était pas nécessaire d’inscrire les CROSS dans la loi.   Le sénateur Jérôme Durain regrette néanmoins la faible implication des services de Bercy dans l’Ofast et souligne la nécessité de les mobiliser pour continuer de développer les enquêtes patrimoniales. « L’aspect interministériel de l’Ofast, est déjà pris en compte avec les douanes, mais on peut continuer à renforcer la coopération avec les services de Bercy », reconnaît Louis Laugier. Toutefois, le directeur général de la police nationale met en exergue la progression des saisies d’avoirs criminels. « 75,3 millions d’euros d’avoirs criminels ont été saisis en 2023. Il y a eu une hausse de 60 % entre 2018 et 2023, traduisant une inflexion profonde de la stratégie de la police en ce domaine avec un développement des enquêtes patrimoniales », argumente Louis Laugier. Interrogé par la présidente de la commission des lois, Muriel Jourda (LR), sur les améliorations législatives à apporter, Louis Laugier évoque la possibilité de recourir à des confiscations provisoires tout en prenant soin d’insister sur la difficulté juridique d’une telle évolution et notamment son risque d’inconstitutionnalité.   Le directeur général de la police nationale défend l’utilité des opérations « place nette »   Dans leur rapport, les sénateurs Jérôme Durain et Etienne Blanc mettaient en avant la nécessité de renforcer la lutte contre la criminalité en augmentant la capacité de saisies des avoirs plutôt qu’en démantelant les points de deal. Les sénateurs n’avaient pas manqué d’égratigner l’efficacité des opérations « places nettes » déplorant les faibles niveaux de saisies (moins de 40 kg de cocaïne et quelques millions d’euros) au regard des effectifs mobilisés (50 000 gendarmes et policiers) entre le 25 septembre 2023 et le 12 avril 2024. Des réserves renouvelées par Jérôme Durain pendant l’audition. « En un an les services de la DGPN ont initié 279 opérations de cette nature qui ont conduit à l’interpellation de 6 800 personnes, la saisie de 690 armes, de 7,5 millions d’euros d’avoirs criminels et plus d’1,7 tonne de stupéfiants », avance Louis Laugier. « Le fait d’avoir une opération où on affiche un effet ‘force’ sur le terrain est important », poursuit le directeur général de la police nationale qui dit avoir conscience que ces opérations « ne se suffisent pas à elles-mêmes ».   Plusieurs pistes absentes de la proposition de loi   Au-delà de l’approche matérielle, Louis Laugier insiste sur le besoin de renforcement des moyens d’enquêtes et de renseignement, notamment humains ainsi que l’adaptation du cadre législatif. Devant la commission des lois, le directeur général de la police nationale a tenu à saluer l’intérêt d’une réforme du statut de repenti, proposée par les sénateurs, pour élargir son périmètre aux crimes de sang. Le fonctionnaire détaille plusieurs mesures, absentes de la proposition de loi qui, selon lui, peuvent favoriser la lutte contre la criminalité organisée. Il souhaite notamment augmenter la durée des gardes à vue en matière de crime organisé pour les faire passer à 48 heures au lieu de 24, généraliser la pseudonymisation des enquêteurs ou encore faire entrer la corruption liée au trafic dans le régime de la criminalité organisée. Des propositions qu’il lie à une meilleure capacité d’écoute des policiers sur le terrain. « Il faut parler avec les personnes, vous avez entièrement raison. Ce travail-là peut avoir été occulté par l’action immédiate en réponse à la délinquance. Et donc oui je crois qu’il faut créer un lien. J’ai transmis des consignes dès que je suis entré en fonction », affirme Louis Laugier en réponse à une question de la sénatrice Corinne Narassiguin (PS).   Enfin, le directeur général de la police nationale plaide pour la création d’un nouveau cadre juridique et « d’une technique spéciale de captation des données à distance, aux fins de captation d’images et de sons relevant de la criminalité ou de la délinquance organisée ». Dans une décision du 16 novembre 2023, le Conseil constitutionnel avait néanmoins jugé inconstitutionnelle l’activation à distance des téléphones portables permettant la voix et l’image des suspects à leur insu. 

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