Irruption de Gabriel Attal à France Info : « La patronne de Radio France l’a contraint à venir sur le plateau », affirme Rachida Dati
Par Alexis Graillot
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Une réponse pour le moins inattendue, sous les cris de « Libérez le Premier ministre ! », face à des sénateurs qui ne s’attendaient pas probablement à une telle réponse. Alors que l’irruption de Gabriel Attal au cours d’une interview de Valérie Hayer, au sein du groupe public, a déclenché une vaste polémique, l’actuelle ministre de la Culture a livré une explication, déclenchant les rires de la chambre haute.
« Je suis assez inquiet d’apprendre que le Premier ministre ait été victime d’un kidnapping dont nous n’avons pas été au courant », a alors ironisé, Ian Brossat, réponse qui a fait sourire Gabriel Attal.
« Plus l’échéance approche, moins vous semblez sereins »
Tout avait pourtant bien commencé. L’élu communiste de Paris interrogeait le gouvernement sur l’omniprésence médiatique du pouvoir exécutif au cours de la campagne des élections européennes. Une omniprésence marquée par l’interview du chef de l’Etat au cours des journaux télévisés de 20 heures, ce jeudi 6 juin, mais également l’arrivée soudaine du Premier ministre, Gabriel Attal, sur le plateau de Radio France, pour soutenir sa candidate, en difficulté dans les sondages.
« Plus l’échéance approche, moins vous semblez sereins », tance le conseiller de Paris, dénonçant le « débat sur mesure » entre Jordan Bardella et Gabriel Attal, il y a deux semaines sur France 2, échange qu’il qualifie de « factice » et visant à « appauvrir le débat public ».
« Vous tentez maladroitement de sauver votre candidate de la noyade », déplore-t-il, accusant Emmanuel Macron de « monopoliser les journaux télévisés à 24 heures de la fin de la campagne », ce qui a déclenché une « mise en garde de l’ARCOM », qui dans sa décision rendue ce mardi 4 juin, expliquait que « tout ou partie des propos tenus lors de cette interview pourra être pris en compte » dans le décompte des temps de parole.
Pour la ministre de la Culture, il n’y a pas lieu à s’émouvoir. « Je vous renvoie aux explications de la patronne de Radio France, qui lui a proposé, voire l’a contraint à venir sur ce plateau », explique Rachida Dati, sous les rires de nombreux sénateurs.
Un contexte de tension entre l’exécutif et les salariés de l’audiovisuel public
Sur le fond, le sénateur de Paris est également revenu sur la réforme décriée de l’audiovisuel public (lire notre article), qui a déclenché un large mouvement de grève au sein des équipes du groupe public. « Le bon vieux temps de l’ORTF semble déjà revenu », déclare-t-il, faisant référence aux propos de la ministre de la Culture, qui avait déclaré en conférence de presse : « On me dit retour à l’ORTF. Mais l’ORTF, pardon, je vais peut-être vous choquer, mais ça permettait quoi ? » s’était-elle demandée. « Quand vous avez un parent ouvrier qui a regardé « Les Dossiers de l’écran » et que le lendemain, il pouvait parler dans son usine avec son chef du dossier de l’écran parce qu’il l’avait regardé, vous ne croyez pas que c’est très fort d’avoir une culture commune ? », invoquait Rachida Dati. « A quel naïf voulez-vous faire croire que votre réforme est autre chose qu’une tentative de reprise en main par le pouvoir de l’audiovisuel public ? », interroge pour sa part, Ian Brossat.
« La télévision et la radio publiques ne sont pas des médias comme les autres », répond la locataire de la rue de Valois, qui souhaite rappeler son « attachement » à l’audiovisuel public. « Le paysage de l’audiovisuel public a changé depuis l’ORTF », défend Rachida Dati, qui rappelle que depuis la disparition de l’organisme en 1974, « 27 chaînes privées » ont été créées.
« Dans ce paysage, les plateformes numériques captent de plus en plus les spectateurs et de recettes publicitaires », alerte Rachida Dati, pour qui « partout en Europe, l’audiovisuel public a rassemblé ses forces ». « La concurrence est de plus en plus vive », souligne la ministre, qui parle de « révolution technologique » subie par l’audiovisuel public. « Le vieillissement des audiences l’atteste », observe-t-elle, s’alarmant de « générations futures qui subissent la désinformation ».
Une réponse qui n’a pas franchement convaincu Ian Brossat. « Il est paradoxal d’expliquer que les temps sont très différents de l’ORTF et en même temps, d’engager une réforme qui y revient ».
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