Le Senat, Paris.

Discours de politique générale, indépendance des médias, programmation énergétique… Le nouveau calendrier parlementaire du Sénat

La conférence des présidents du Palais du Luxembourg a fixé les premières dates de la session ordinaire. Elle s’ouvre le mardi 1er octobre par le discours de politique générale. Plusieurs propositions de loi sont aussi à l’ordre du jour.
Quentin Gérard

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Cette rentrée est particulière pour les sénateurs. La dissolution de l’Assemblée nationale par Emmanuel Macron en juin dernier a brutalement interrompu les travaux parlementaires. Plus de trois mois après, les élus reviennent dans un environnement politique complexe, avec la nomination du LR Michel Barnier à Matignon. Neuf sénateurs sont entrés au gouvernement, un record sous la Ve République. Avec sa majorité de droite, la chambre-haute fera figure de principal soutien au Premier ministre, contrairement à l’Assemblée nationale qui menace de le censurer. Si aucun projet de loi n’est encore déposé par le gouvernement, les différents groupes ont déjà déposé de nombreuses propositions de loi. Après la prochaine conférence des présidents, le mercredi 2 octobre, l’ordre du jour du Sénat sera dévoilé jusqu’à début décembre.

Un discours de politique générale très attendu

Les choses sérieuses commencent le mardi 1er octobre pour le nouveau premier ministre. Michel Barnier se rendra au perchoir du Palais Bourbon pour présenter son discours de politique générale. L’ancien négociateur du Brexit pour l’Union européenne donnera les grandes orientations de son programme et les principales mesures qu’il compte mettre en œuvre. Un exercice périlleux où le Savoyard devra donner des gages à la fois aux macronistes et au Rassemblement national. Au même moment, selon le protocole, Didier Migaud prononcera mot pour mot le même discours au plateau du Sénat. En 2022, c’est Bruno Le Maire, l’ancien ministre de l’Economie, qui s’y était attelé. Le lendemain, Michel Barnier proclamera son discours de politique générale au Palais du Luxembourg. La tonalité de son allocution sera légèrement différente. Davantage tourné vers les collectivités locales, le Sénat représentant les territoires. Il sera suivi d’un débat où chaque groupe pourra intervenir en fonction de son nombre d’élus.

Des débats thématiques seront organisés la semaine suivante à la demande des groupes. Le premier sera consacré à la croissance de la dette publique, mardi 8 octobre, en début d’après-midi. Un sujet brûlant alors que le projet de loi de finances pour 2025 sera transmis à l’Assemblée nationale le 9 octobre. L’un de ses objectifs est de stabiliser la dette. Elle dépasse aujourd’hui les 3 000 milliards d’euros, soit 112 % du PIB. Un autre débat se portera sur la crise agricole. Un thème qui devrait figurer parmi les priorités de Michel Barnier, lui-même ancien ministre de l’Agriculture (2007 – 2009), aujourd’hui dévolu à Annie Genevard. S’ensuivra un autre sur la nécessité de former davantage de médecins et soignants à la demande du groupe communiste.

Une loi contre la fermeture abusive des comptes bancaires

Les traditionnelles questions au gouvernement reviennent le mercredi 9 octobre. Elles devraient être centrées sur le projet de budget, présenté le même jour. Le reste de la journée est réservé au groupe Union centriste. Une proposition de loi visant à réduire le nombre de conseillers municipaux dans les petites communes de moins de 3 500 habitants sera étudiée. L’objectif du rapporteur, François Bonneau, sénateur socialiste de la Charente, est de « répondre à la crise de l’engagement local » en prenant acte de la « baisse du nombre de candidats aux élections municipales ». Puis, une proposition de loi visant à lutter contre les « fermetures abusives de comptes bancaires » sera examinée. Le texte souhaite imposer une justification aux établissements de la fermeture d’un compte quand le particulier en fait la demande.

Deux propositions de loi socialistes seront présentées en première lecture aux sénateurs le jeudi 10 octobre. La première vise à mettre en place « une imposition des sociétés » qui serait « plus juste et plus écologique ». Ils demandent notamment que les entreprises assujetties au taux d’imposition à 25 % le soient à 30 % quand leur activité s’avère polluante. La deuxième proposition de loi souhaite assurer « la mixité sociale et scolaire » dans les établissements d’enseignement publics et privés sous contrat du premier et du second degré. Mais aussi à garantir davantage de transparence dans les procédures d’affection et de financement des établissements privés sous contrat.

LR propose sa propre loi sur la programmation énergétique

La semaine suivante, Philippe Mouiller, président de la commission des Affaires sociales et Gilbert Bouchet, sénateur Les Républicains de la Drôme, vont présenter une proposition de loi visant l’amélioration de la prise en charge de la sclérose latérale amyotrophique et d’autres maladies évolutives graves. Un vote aura ensuite lieu sur une proposition de loi visant à permettre l’élection du maire d’une commune nouvelle en cas de conseil municipal incomplet. Elle a notamment été portée par le nouveau ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau. L’objectif est d’éviter l’organisation d’une élection complémentaire intégrale, dans le cas où un maire doit être élu, pour ne pas évincer trop vite les élus à l’origine de la commune nouvelle. La journée se terminera avec l’étude d’une proposition de loi sur la programmation nationale et simplification normative dans le secteur de l’énergie. Objectif : combler l’absence d’une loi de programmation sur le sujet pourtant prévue par la loi « Energie-Climat » de 2019.

Sylvie Robert, vice-présidente du Sénat, veut renforcer l’indépendance des médias et la protection des sources des journalistes. C’est l’objet d’une proposition de loi présentée le jeudi 17 octobre, journée réservée au groupe socialiste. Elle suggère de compléter la loi relative à la liberté de communication de 1986 en évoquant « le respect de l’expression pluraliste des courants de pensée et d’opinion dans les programmes diffusés ». Mais aussi en tenant compte « de la diversité des sujets, des points de vue exprimés et des interventions de l’ensemble des participants, qui incluent les personnalités politiques et tout intervenant dès lors qu’il influe sur le débat et la vie politique ». L’Autorité de régulation de la communication (Arcom) pourra sanctionner les médias mis en demeure qui ne se conforme pas à cet ajout.

Le 25 septembre, un rapport du Sénat s’est inquiété de la situation financière des maisons de retraite dans le secteur public. Jean-Luc Fitchet, sénateur socialiste du Morbihan, veut lui mettre à contribution les Ehpad privés à but lucratif qui « réalisent des profits excessifs ». Objectif : porter de 20 % à 30 % l’impôt sur les sociétés des établissements qui ont des résultats nets supérieurs à 15 % des capitaux propres. Les sénateurs examineront ensuite une proposition de loi visant à sécuriser le mécanisme de purge de nullités. Puis, une autre sera étudiée visant à assouplir la gestion des compétences « eau » et « assainissement ». Son but est de remettre en cause le « caractère impératif » des transferts de ces compétences aux communautés de communes.

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« On va de la cage d’escalier à l’international », explique le nouveau directeur général de la police nationale, Louis Laugier, devant la commission des lois du Sénat lorsqu’il évoque la lutte contre le narcotrafic. Si la nomination de Louis Laugier a fait l’objet de négociations entre Bruno Retailleau et Emmanuel Macron, l’audition portait essentiellement sur la proposition de loi relative au narcotrafic qui sera examinée à partir de janvier au Sénat. Le texte fait suite à la commission d’enquête présidée par Etienne Blanc (LR) et dont le rapporteur était Jérôme Durain (PS). Un texte particulièrement attendu alors que le ministre de l’intérieur, Bruno Retailleau, a multiplié les gages de fermeté dans la lutte contre le trafic de drogue et la criminalité organisée.   Comme les sénateurs, le Directeur général de la police nationale décrit un phénomène en hausse, un « marché des stupéfiants en expansion, une forte demande des consommateurs et une offre abondante ». La criminalité organisée connaît d’ailleurs un certain nombre d’évolutions comme la multiplication des violences liées au trafic y compris dans des villes moyennes, ou encore le rajeunissement des acteurs.  « Je souhaiterais préciser que la France n’est pas dans une situation singulière. En effet, tous les Etats de l’UE sont confrontés à des situations identiques », prévient néanmoins Louis Laugier. Néanmoins, les chiffres présentés sont vertigineux avec notamment 44,8 tonnes de cocaïne saisies en 2024 (contre 23,2 tonnes en 2023). Le directeur général rapporte également que 434 000 amendes forfaitaires délictuelles ont été dressées depuis septembre 2020 pour stupéfiants.   « Certaines observations du rapport relatif à l’action de la police nationale me paraissent un peu sévères »   Pour répondre à ce phénomène massif, l’Office anti-stupéfiants (Ofast) a été mis en place en 2019. Cette agence regroupe des effectifs issus de différents services, notamment des douanes et de la police judiciaire. Alors que le rapport sénatorial propose de revoir le fonctionnement de l’Ofast pour en faire une « DEA à la française », Louis Laugier défend l’efficacité de l’agence. « Certaines observations du rapport relatif à l’action de la police nationale me paraissent un peu sévères […] le rôle de coordination de l’Ofast est réel, grâce à son caractère interministériel et son maillage territorial dense », avance le directeur général de la police nationale. Ce dernier souligne également le doublement des effectifs depuis 2020 et la présence des services sur tout le territoire grâce aux 15 antennes de l’Ofast et aux cellules de renseignement opérationnel sur les stupéfiants (CROSS) présentes dans chaque département. Louis Laugier a également défendu la souplesse de ce dispositif, affirmant qu’il n’était pas nécessaire d’inscrire les CROSS dans la loi.   Le sénateur Jérôme Durain regrette néanmoins la faible implication des services de Bercy dans l’Ofast et souligne la nécessité de les mobiliser pour continuer de développer les enquêtes patrimoniales. « L’aspect interministériel de l’Ofast, est déjà pris en compte avec les douanes, mais on peut continuer à renforcer la coopération avec les services de Bercy », reconnaît Louis Laugier. Toutefois, le directeur général de la police nationale met en exergue la progression des saisies d’avoirs criminels. « 75,3 millions d’euros d’avoirs criminels ont été saisis en 2023. Il y a eu une hausse de 60 % entre 2018 et 2023, traduisant une inflexion profonde de la stratégie de la police en ce domaine avec un développement des enquêtes patrimoniales », argumente Louis Laugier. Interrogé par la présidente de la commission des lois, Muriel Jourda (LR), sur les améliorations législatives à apporter, Louis Laugier évoque la possibilité de recourir à des confiscations provisoires tout en prenant soin d’insister sur la difficulté juridique d’une telle évolution et notamment son risque d’inconstitutionnalité.   Le directeur général de la police nationale défend l’utilité des opérations « place nette »   Dans leur rapport, les sénateurs Jérôme Durain et Etienne Blanc mettaient en avant la nécessité de renforcer la lutte contre la criminalité en augmentant la capacité de saisies des avoirs plutôt qu’en démantelant les points de deal. Les sénateurs n’avaient pas manqué d’égratigner l’efficacité des opérations « places nettes » déplorant les faibles niveaux de saisies (moins de 40 kg de cocaïne et quelques millions d’euros) au regard des effectifs mobilisés (50 000 gendarmes et policiers) entre le 25 septembre 2023 et le 12 avril 2024. 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Devant la commission des lois, le directeur général de la police nationale a tenu à saluer l’intérêt d’une réforme du statut de repenti, proposée par les sénateurs, pour élargir son périmètre aux crimes de sang. Le fonctionnaire détaille plusieurs mesures, absentes de la proposition de loi qui, selon lui, peuvent favoriser la lutte contre la criminalité organisée. Il souhaite notamment augmenter la durée des gardes à vue en matière de crime organisé pour les faire passer à 48 heures au lieu de 24, généraliser la pseudonymisation des enquêteurs ou encore faire entrer la corruption liée au trafic dans le régime de la criminalité organisée. Des propositions qu’il lie à une meilleure capacité d’écoute des policiers sur le terrain. « Il faut parler avec les personnes, vous avez entièrement raison. Ce travail-là peut avoir été occulté par l’action immédiate en réponse à la délinquance. Et donc oui je crois qu’il faut créer un lien. J’ai transmis des consignes dès que je suis entré en fonction », affirme Louis Laugier en réponse à une question de la sénatrice Corinne Narassiguin (PS).   Enfin, le directeur général de la police nationale plaide pour la création d’un nouveau cadre juridique et « d’une technique spéciale de captation des données à distance, aux fins de captation d’images et de sons relevant de la criminalité ou de la délinquance organisée ». Dans une décision du 16 novembre 2023, le Conseil constitutionnel avait néanmoins jugé inconstitutionnelle l’activation à distance des téléphones portables permettant la voix et l’image des suspects à leur insu. 

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