Paris: The senate vote on an amendment of a government plan to enshrine the “freedom” to have an abortion in the French Constitution

Déclaration obligatoire, détection par algorithme, surveillance électronique : contre les ingérences étrangères, le Sénat sort l’artillerie lourde

À l'heure où l'Azerbaïdjan est accusé par le gouvernement d'influencer les indépendantistes en Nouvelle-Calédonie, le Sénat s'apprête à examiner une proposition de loi sur les ingérences étrangères. Le texte permettrait de renforcer le cadre juridique pour surveiller les représentants d’intérêts étrangers en France et mieux sanctionner les ingérences.
Rose Amélie Becel

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Situation en Nouvelle-Calédonie, Jeux olympiques, élections européennes… La liste des évènements potentiellement visés par des ingérences étrangères s’alourdit de jour en jour. Dans ce contexte, le Parlement examine une proposition de loi visant à renforcer l’arsenal juridique et répressif de l’État, pour prévenir ces opérations. Le texte, voté à l’Assemblée nationale le 27 mars, sera présenté au Sénat le 22 mai prochain.

Les dispositions de la proposition de loi s’inspirent largement du rapport annuel de la délégation au renseignement, publié en novembre dernier, qui dénonçait « une forme de naïveté et de déni » de l’État face aux offensives étrangères. Des menaces qualifiées d’« hybrides », qui s’illustrent notamment par des campagnes de manipulation de l’information à grande échelle.

Obliger les acteurs de l’influence étrangère à se déclarer

« Au cours des auditions de la délégation au renseignement, nous nous sommes rendu compte que les services français ne disposaient pas de tous les moyens nécessaires pour lutter contre ces ingérences grandissantes. L’idée est aussi de prévenir le phénomène en obligeant les acteurs de l’influence étrangère, qui n’est pas une activité interdite, à se déclarer pour mieux les identifier », explique Agnès Canayer, rapporteure de la proposition de loi au Sénat.

Le premier article du texte propose en effet la création d’un répertoire, sous l’égide de la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), permettant de recenser les représentants d’intérêts de pays étrangers. Ces acteurs auront l’obligation de se signaler auprès de la HATVP, sans quoi ils risqueront trois ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende. « Devront se déclarer tous ceux qui procèdent à des opérations pour le compte de mandants étrangers, aussi bien les personnes physiques que morales mais aussi les groupements politiques et les think tanks, financés majoritairement ou contrôlés par des puissances étrangères en dehors de l’Union européenne », précise Agnès Canayer.

En commission des lois, les sénateurs ont adopté un amendement définissant de manière plus précise les actions d’ingérence, pour préciser le périmètre des personnes soumises à cette obligation de déclaration, indique la rapporteure du texte : « Il y a d’abord un critère intentionnel, devront se déclarer tous ceux qui procèdent à des actions destinées à influer sur la décision publique. Il y a ensuite un critère matériel, il faut que ces personnes entrent en communication directe avec des élus ou anciens élus, ou bien qu’ils réalisent des actions de communication à destination du public, ou alors qu’ils collectent des fonds ou procèdent à des versements sans contrepartie. »

Autoriser la détection des opérations d’ingérence avec des algorithmes

La proposition de loi prévoit aussi de renforcer les moyens d’enquête à destination des services de renseignements, pour mieux identifier les opérations d’ingérence. À partir de début 2026, ces services pourraient ainsi être autorisés à utiliser des techniques de détection avec algorithmes, comme dans la lutte antiterroriste. « Même si elle a fait ses preuves, cette technique fonctionne moins bien pour détecter la radicalisation isolée de loups solitaires. La détection par algorithme c’est plus simple quand un grand nombre de gens se mettent en relation, et on voit bien qu’en matière d’ingérence c’est le cas, la cybercriminalité peut être pilotée de l’étranger avec des bots et des “fermes de trolls” qui parviennent à faire passer une communication publique erronée pour discréditer un État », explique la sénatrice Les Républicains.

En plus de faciliter la détection de ces opérations, les parlementaires entendent aussi davantage les sanctionner. Un autre amendement de la commission des lois prévoit ainsi la création d’une circonstance aggravante pour toutes les atteintes aux biens et aux personnes commises pour le compte d’une entité étrangère. Les autorités judiciaires seraient également autorisées à utiliser les « techniques spéciales d’enquête », propose Agnès Canayer dans ce même amendement, des techniques comme l’interception des communications téléphoniques ou la surveillance électronique, d’habitude mobilisées dans les enquêtes concernant le terrorisme et le crime organisé.

Alors que Gérald Darmanin affirme depuis plusieurs jours que les ingérences de l’Azerbaïdjan alimentent les tensions entre indépendantistes et non indépendantistes en Nouvelle-Calédonie, cette proposition de loi permettra-t-elle d’agir contre les opérations de Bakou à Nouméa ? « Difficile à dire », estime Claude Malhuret, rapporteur pour avis du texte au nom de la commission des affaires européennes. Si le président des Indépendants au Sénat juge l’influence azérie « scandaleuse », « les accords entre Nouméa et Bakou sont publics, ils ne sont pas cachés et difficilement condamnables ». En revanche, le texte pourrait permettre de mieux cerner les ingérences chinoises sur l’archipel, convoité pour ses ressources en nickel, « des pressions extrêmement fortes mais sûrement plus secrètes que celles de Bakou », explique Claude Malhuret.

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« On va de la cage d’escalier à l’international », explique le nouveau directeur général de la police nationale, Louis Laugier, devant la commission des lois du Sénat lorsqu’il évoque la lutte contre le narcotrafic. Si la nomination de Louis Laugier a fait l’objet de négociations entre Bruno Retailleau et Emmanuel Macron, l’audition portait essentiellement sur la proposition de loi relative au narcotrafic qui sera examinée à partir de janvier au Sénat. Le texte fait suite à la commission d’enquête présidée par Etienne Blanc (LR) et dont le rapporteur était Jérôme Durain (PS). Un texte particulièrement attendu alors que le ministre de l’intérieur, Bruno Retailleau, a multiplié les gages de fermeté dans la lutte contre le trafic de drogue et la criminalité organisée.   Comme les sénateurs, le Directeur général de la police nationale décrit un phénomène en hausse, un « marché des stupéfiants en expansion, une forte demande des consommateurs et une offre abondante ». La criminalité organisée connaît d’ailleurs un certain nombre d’évolutions comme la multiplication des violences liées au trafic y compris dans des villes moyennes, ou encore le rajeunissement des acteurs.  « Je souhaiterais préciser que la France n’est pas dans une situation singulière. En effet, tous les Etats de l’UE sont confrontés à des situations identiques », prévient néanmoins Louis Laugier. Néanmoins, les chiffres présentés sont vertigineux avec notamment 44,8 tonnes de cocaïne saisies en 2024 (contre 23,2 tonnes en 2023). Le directeur général rapporte également que 434 000 amendes forfaitaires délictuelles ont été dressées depuis septembre 2020 pour stupéfiants.   « Certaines observations du rapport relatif à l’action de la police nationale me paraissent un peu sévères »   Pour répondre à ce phénomène massif, l’Office anti-stupéfiants (Ofast) a été mis en place en 2019. Cette agence regroupe des effectifs issus de différents services, notamment des douanes et de la police judiciaire. Alors que le rapport sénatorial propose de revoir le fonctionnement de l’Ofast pour en faire une « DEA à la française », Louis Laugier défend l’efficacité de l’agence. « Certaines observations du rapport relatif à l’action de la police nationale me paraissent un peu sévères […] le rôle de coordination de l’Ofast est réel, grâce à son caractère interministériel et son maillage territorial dense », avance le directeur général de la police nationale. Ce dernier souligne également le doublement des effectifs depuis 2020 et la présence des services sur tout le territoire grâce aux 15 antennes de l’Ofast et aux cellules de renseignement opérationnel sur les stupéfiants (CROSS) présentes dans chaque département. Louis Laugier a également défendu la souplesse de ce dispositif, affirmant qu’il n’était pas nécessaire d’inscrire les CROSS dans la loi.   Le sénateur Jérôme Durain regrette néanmoins la faible implication des services de Bercy dans l’Ofast et souligne la nécessité de les mobiliser pour continuer de développer les enquêtes patrimoniales. « L’aspect interministériel de l’Ofast, est déjà pris en compte avec les douanes, mais on peut continuer à renforcer la coopération avec les services de Bercy », reconnaît Louis Laugier. Toutefois, le directeur général de la police nationale met en exergue la progression des saisies d’avoirs criminels. « 75,3 millions d’euros d’avoirs criminels ont été saisis en 2023. Il y a eu une hausse de 60 % entre 2018 et 2023, traduisant une inflexion profonde de la stratégie de la police en ce domaine avec un développement des enquêtes patrimoniales », argumente Louis Laugier. Interrogé par la présidente de la commission des lois, Muriel Jourda (LR), sur les améliorations législatives à apporter, Louis Laugier évoque la possibilité de recourir à des confiscations provisoires tout en prenant soin d’insister sur la difficulté juridique d’une telle évolution et notamment son risque d’inconstitutionnalité.   Le directeur général de la police nationale défend l’utilité des opérations « place nette »   Dans leur rapport, les sénateurs Jérôme Durain et Etienne Blanc mettaient en avant la nécessité de renforcer la lutte contre la criminalité en augmentant la capacité de saisies des avoirs plutôt qu’en démantelant les points de deal. Les sénateurs n’avaient pas manqué d’égratigner l’efficacité des opérations « places nettes » déplorant les faibles niveaux de saisies (moins de 40 kg de cocaïne et quelques millions d’euros) au regard des effectifs mobilisés (50 000 gendarmes et policiers) entre le 25 septembre 2023 et le 12 avril 2024. 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J’ai transmis des consignes dès que je suis entré en fonction », affirme Louis Laugier en réponse à une question de la sénatrice Corinne Narassiguin (PS).   Enfin, le directeur général de la police nationale plaide pour la création d’un nouveau cadre juridique et « d’une technique spéciale de captation des données à distance, aux fins de captation d’images et de sons relevant de la criminalité ou de la délinquance organisée ». Dans une décision du 16 novembre 2023, le Conseil constitutionnel avait néanmoins jugé inconstitutionnelle l’activation à distance des téléphones portables permettant la voix et l’image des suspects à leur insu. 

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