Cette fois, le plus dur commence pour le budget 2025. Après avoir passé sans difficulté l’étape du Sénat le 23 janvier, le projet de loi de finances va faire l’objet d’une commission mixte paritaire (CMP) ce jeudi. Cette instance de conciliation va se réunir à huis clos à partir du 30 janvier, dès 9h30. Sept députés et sept sénateurs, dont la représentativité reflète celle de leurs assemblées respectives, auront pour objectif d’aboutir à un texte commun.
Les forces du « socle commun », qui soutiennent l’action gouvernementale ou qui ont une attitude bienveillante à son égard, seront majoritaires avec 8 des 14 représentants qui siègeront. La règle du tourniquet, qui consiste à faire tourner le septième siège entre différents groupes, a été favorable à François Bayrou. Ce bloc central est constitué des députés David Amiel (Renaissance) et Jean-Paul Mattei (MoDem), des sénateurs Vincent Capo-Canellas (Union centriste) et Didier Rambaud (Renaissance), et pour la droite, des sénateurs LR Jean-François Husson (rapporteur général du budget au Sénat) et Christine Lavarde, Stéphane Sautarel (apparenté LR), et du député LR Philippe Juvin.
4 parlementaires de gauche et 2 députés RN sur les 14 membres de la CMP
Les oppositions sont en minorité dans cette CMP : les socialistes envoient les sénateurs Claude Raynal (président de la commission des finances du Sénat) et Thierry Cozic, et le député Philippe Brun, la gauche comprend également Éric Coquerel (président LFI de la commission des finances de l’Assemblée nationale). S’y ajoutent deux députés RN, Jean-Philippe Tanguy et Matthias Renault.
Sur le papier, le gouvernement Bayrou a donc les forces nécessaires pour dégager un texte dans cette commission mixte paritaire. Encore faut-il que la copie, en cas de CMP conclusive, soit approuvée dans les deux chambres. Fin novembre, la CMP sur le budget de la Sécurité sociale est parvenue à dégager un texte commun. La suite est connue : le dépôt d’une motion de censure, votée par le Rassemblement national et les groupes du Nouveau Front populaire. François Bayrou et les parlementaires qui le soutiennent vont donc devoir éviter que l’histoire ne se répète et éviter l’émergence d’une majorité pour la censure. Le gouvernement joue sa survie. L’enjeu est également d’éviter un nouvel échec qui se traduirait par un nouveau retard dans l’élaboration d’un budget, qui aurait dû être adopté avant le 31 décembre.
De longues négociations et débats en perspective
Comme à chaque commission mixte paritaire, les préparations ont déjà commencé en amont. Les réunions et les consultations devraient se multiplier jusqu’à la veille de la CMP, mercredi. La position des socialistes, mécontents du texte sorti du Sénat, sera déterminante. Des négociations de dernière minute ne sont pas non à exclure en pleine CMP, avec de multiples suspensions de séance.
En raison de la longueur des sujets à aborder, qu’il s’agisse des propositions fiscales comme des propositions d’économies, les débats s’annoncent longs en CMP. Et comme pour le PLFSS, les députés n’ont pas pu débattre du texte dans son intégralité, puisque le rejet du volet recettes a entraîné le rejet du texte, et donc l’impossibilité d’examiner la partie dépenses. « On a encore une période sympa devant nous, la commission mixte paritaire entre un Sénat qui aura voté un texte et l’Assemblée nationale qui n‘aura débattu de rien, ça va être chouette ! » concluait hier le président de la commission des finances Claude Raynal, à l’issue de l’adoption du budget au Sénat.
Plus d’une journée pourrait donc être nécessaire à la CMP pour faire le tour des articles du PLF, c’est ce scénario qui est privilégié par les responsables des commissions des finances. Rappelons que la CMP sur la réforme des retraites, en mars 2023, avait nécessité 7 heures et 25 minutes de débats à huis clos (hors suspensions). Autre CMP sensible : celle sur le projet de loi immigration en décembre 2023. Celle-ci s’était étendu sur deux journées. Hors suspensions, l’examen s’était prolongé pendant sept heures et 40 minutes.
Le record de la CMP la plus longue sous la Ve République reste à ce jour celle qui s’est tenue en juin 1999 sur la loi Chevènement sur l’intercommunalité. Trois jours de CMP, non consécutifs, pour une durée de 18 heures de travaux, ont été nécessaires aux deux assemblées pour rapprocher leurs points de vue.
À noter qu’en raison de la dimension politique importante du PLF, de nombreux suppléants pourraient prendre la parole. S’ils ne peuvent pas prendre part au vote, ces derniers peuvent toutefois participer aux débats. La composition des suppléants est la suivante. Pour l’Assemblée nationale : Jean-René Cazeneuve (Renaissance), Charles de Courson (Liot), Aurélien Le Coq (LFI), Philippe Lottiaux (RN), Emmanuel Maurel (GDR), Eva Sas (écologiste) et Boris Vallaud (PS). Pour le Sénat : Emmanuel Capus (Horizons), Raphaël Daubet (RDSE), Albéric de Montgolfier (LR), Bernard Delcros (Union centriste), Patrick Kanner (PS), Pascal Savoldelli (communiste) et Laurent Somon (LR).