L’une est consacré à l’accompagnement de la fin de vie, l’autre créé un droit à l’aide à mourir. L’Assemblée nationale s’est prononcée ce mardi 27 mai en faveur de deux propositions de loi issues des rangs du bloc gouvernemental. Ces deux textes viennent supplanter le projet de loi présenté en mars 2024, en partie issu des travaux de la convention citoyenne sur la fin de vie, et présenté comme la grande réforme sociétale du second quinquennat d’Emmanuel Macron, mais dont le parcours législatif a été brusquement interrompu par la dissolution.
En janvier, le Premier ministre François Bayrou, qui n’a jamais caché ses réticences sur l’ouverture d’une aide à mourir, a exprimé le souhait de voir ces deux thématiques examinées dans deux textes différents, de là la présentation de deux propositions de loi distinctes, l’une sur les soins palliatifs, l’autre sur l’ouverture d’une aide à mourir. Après l’Assemblée nationale, ils seront examinés au Sénat en octobre, où l’issue des débats s’annonce bien plus incertaine dans une Chambre haute dominée par les LR.
Renforcement des soins palliatifs
La première proposition de loi, également la plus consensuelle des deux, prévoit un renforcement de l’accès et des moyens attribués aux soins palliatifs. Portée par la députée Renaissance Annie Vidal, ce texte doit notamment soutenir le développement d’une « culture palliative » en milieu hospitalier et au-delà, alors qu’une vingtaine de départements sont toujours dépourvus de services dédiés.
Le texte crée un droit opposable aux soins palliatifs. Il propose également la mise en place de « maisons d’accompagnement et de soins palliatifs » pour les malades en fin de vie, dont la situation ne nécessite plus une prise en charge hospitalière, mais qui ne souhaitent pas rentrer chez eux. De manière globale, la trajectoire de développement de l’offre de soin palliatifs en France devra être déterminée par un plan pluriannuel quinquennal, dont la première mouture est attendue cette année.
Création d’une aide à mourir
Le second texte, celui du député du groupe MoDem Olivier Falorni, propose « une aide à mourir pour des malades condamnés par la maladie mais qui ne veulent pas être condamnés à l’agonie ». Il reprend, dans ces grandes lignes, les mesures phares du projet de loi sur la fin de vie présenté par le gouvernement en mars 2024, mais dont le parcours législatif a été brutalement interrompu par la dissolution.
« L’aide à mourir consiste à autoriser et à accompagner une personne qui en a exprimé la demande à recourir à une substance létale », indique l’article 2. Le malade devra s’administrer lui-même le produit, c’est l’une des principales règles fixées par les députés, à partir d’un amendement du gouvernement. Seule dérogation possible : « Lorsque la personne n’est pas en mesure physiquement d’y procéder », elle pourra alors se faire administrer la substance par un médecin ou un infirmier.
Un accès restreint
La proposition de loi fixe également cinq conditions cumulatives nécessaires pour pouvoir bénéficier de cette aide à mourir. Le patient devra être majeur, de nationalité française ou résider de façon stable et régulière en France, être atteint d’une pathologie grave et incurable engageant son pronostic vital, en phase avancée ou « terminale ». Il devra également présenter « une souffrance physique ou psychologique constante » liée à sa situation. Par ailleurs, il devra formuler sa volonté de recourir à l’aide à mourir « de façon libre et éclairée », ce qui exclut les personnes dont le discernement se trouve altéré.
La définition de ces cinq critères a nourri de vifs débats à l’Assemblée nationale. Il y a fort à parier que la droite sénatoriale, hostile à cette réforme, en propose une version plus restrictive.
Une clause de conscience pour les soignants
La personne qui souhaite bénéficier de l’aide à mourir en fait d’abord la demande auprès d’un médecin. Celui-ci devra alors solliciter un collège de professionnels, composé « au minimum de deux médecins et d’un soignant » pour examiner cette demande. Mais c’est au médecin seul qu’il appartiendra de l’avaliser ou non. Le patient aura entre deux jours et trois mois pour confirmer sa décision de recourir à l’aide à mourir. Au-delà de ce délai, sa demande devra être réexaminée.
Le patient choisit le lieu et la date d’administration de la substance létale, en présence d’un médecin, mais celle-ci ne peut intervenir plus de trois mois après la prescription. Faute de quoi, là encore, la demande devra être réévaluée. Le patient peut, en outre, renoncer à sa demande à tout moment.
Le texte offre la possibilité pour les médecins ou infirmiers sollicités par un malade en fin de vie d’invoquer une clause de conscience pour ne pas avoir à pratiquer l’aide à mourir. Dès lors, ils sont tenus de fournir au patient une liste de médecins disposés à l’accompagner dans cette démarche. Cette clause n’a pas été élargie aux pharmaciens comme le réclamaient la droite et le Rassemblement national. Les députés ont également voté un délit d’entrave à l’accès à l’aide à mourir, sur le modèle de ce qui existe déjà pour l’interruption volontaire de grossesse (IVG). Il est puni de deux ans de prison et 30.000 euros d’amende.