Voiture autonome : faut-il lui laisser le volant ?

Voiture autonome : faut-il lui laisser le volant ?

Les invités de l’émission « On va plus loin » débattent de la voiture autonome, qui commence déjà à se développer et qui pourrait bouleverser totalement nos habitudes de transports.
Public Sénat

Temps de lecture :

5 min

Publié le

Mis à jour le

 « Les gens ne sont pas prêts à lâcher le volant » constate, d’emblée, la sénatrice (LR) de l’Aisne, Pascale Gruny, coauteure d’un rapport sur la voiture autonome.

Les Français ne seraient donc pas encore convaincus de se laisser conduire par leur voiture ? Pourtant, ce n’est pas faute d’en entendre vanter les mérites, notamment à VivaTech, le salon des innovations, qui vient tout juste de fermer ses portes à Paris, ou dans la bouche même du Président de la République, qui a spécifié en mars dernier son souhait de voir la France « à la pointe de l’expérimentation et de l’industrialisation » dans ce domaine.

Pour la sénatrice (LR), la France n’est, aujourd’hui, pas prête : « Juridiquement, on a un souci avec la Convention de Vienne qui exigence que tout véhicule doit être conduit par un conducteur et que l’on ne peut pas avoir d’autres activités [au même moment] ».

Pascale Gruny regrette également le retard de la France dans ce domaine par rapport à d’autres pays : « On a un retard vis-à-vis des Allemands [mais] on a aussi un retard énorme avec les États-Unis, la Chine et le Japon (…). Par rapport à la Convention de Vienne (…) et par rapport aux expérimentations. Parce qu’aujourd’hui, nos expérimentations ne peuvent être que dans des lieux privés. On ne peut pas être sur les routes que vous empruntez. Donc tout ça  a pris beaucoup de retard (…) Et il va falloir aussi des soutiens financiers. Or mon inquiétude est là aussi. Quand on dit qu’on va mettre 1,5 milliard d’euros sur le numérique, ce n’est pas que sur le véhicule autonome. Et nos constructeurs, ils vont avoir besoin de cette filière. Mais il n’y a pas que les constructeurs. Il y a l’infrastructure aussi. »  

 

 

Eric de Caumont, avocat et président de l’Association des avocats de l’automobile, estime que l’arrivée du véhicule autonome implique  de « revoir complètement notre réglementation » :

« À l’heure actuelle, la réglementation française qui établit les responsabilités en cas d’accident et qui prévoit que (…) le conducteur doit rester maître de son véhicule (…) et que s’il y a un accident dû à son défaut de maîtrise, il est responsable, cette réglementation est inapplicable à un ensemble de véhicules autonomes et va être très délicate dans une période de transition (…) Il va falloir adapter complètement la réglementation et je peux vous dire que ça va fumer sous les crânes des juristes. »

 

 De son côté, Stéphane Pénet, directeur des assurances dommages de la Fédération française de l'assurance, est confiant : « Sur le plan de l’assurance,  les choses sont moins compliquées qu’on veut bien le dire. En réalité, le cadre juridique de l’assurance dit (…) : «  Il faut qu’il y ait toujours une assurance qui puisse régler un accident de véhicule et il faut que les victimes soient correctement indemnisées ». Et si vous lisez aujourd’hui les textes, que ce soient les textes européens (…) ou le code des assurances, il n’y a pas une virgule à changer pour que cela fonctionne pour des véhicules autonomes (…) Par contre, dans le fonctionnement de l’assurance, pour que nous puissions effectivement répondre à cette mission que nous a donné le législateur, qui est de bien indemniser les victimes, alors là, il y a la question de la recherche des responsabilités qui risque d’être un peu compliquée. Mais qui peut être rapidement résolue parce que la technologie peut aussi être au service de la traçabilité des accidents. »

 

Même si les avancées technologiques sont importantes, Julie Thoin-Bousquié, journaliste spécialiste de l’automobile à L’Usine Nouvelle, rappelle tout de même que le niveau 5 de la voiture autonome, niveau où c’est le véhicule qui conduit totalement les personnes installées dans l’habitacle, « sera dans un futur quand même très lointain ». « Cela suppose que le véhicule soit capable de fonctionner de la même manière qu’un être humain. C’est un défi considérable » explique-t-elle.

La journaliste met surtout  le doigt sur les risques futurs concernant la cybersécurité : « Qui dit véhicule autonome, dit véhicule connecté (…) Cela pourra poser des problèmes, comme on peut voir aujourd’hui dans l’informatique (…) On pourrait bloquer le véhicule et vous demandez finalement de payer une rançon pour que vous puissiez l’utiliser. »  

 

Vous pouvez voir et revoir le débat sur la voiture autonome, en intégralité :  

Voiture autonome : faut-il lui laisser le volant ?
25:24

Dans la même thématique

France Rape Trial
4min

Société

Procès de Mazan : une mission sur la soumission chimique stoppée à cause de la dissolution

Le procès retentissant des viols de Mazan fait prendre conscience de l’ampleur du phénomène de la soumission chimique. Une mission gouvernementale sur ce sujet avait été lancée en avril avec à sa tête la députée Modem, Sandrine Josso, elle-même victime de ce procédé. Les travaux ont été stoppés avec la dissolution. La parlementaire s’apprête à envoyer un courrier au chef de l’Etat pour qu’elle reprenne au plus vite.

Le

Telegram
4min

Société

Interdiction de X au Brésil, arrestation du patron de Telegram en France : « Ça marque un tournant », selon Thomas Huchon 

Vendredi 30 août 2024, un juge brésilien a ordonné la suspension dans le pays du réseau social X, anciennement Twitter. Quelques jours plus tôt, le patron de l’application Telegram était mis en examen et placé sous contrôle judiciaire, à Paris, pour une demi-douzaine d’infractions liées à la plateforme. Ces décisions prises par la Justice au Brésil et en France marquent un tournant pour les réseaux sociaux selon Thomas Huchon, journaliste et enseignant spécialisé dans l'étude des fake news et des théories complotistes.

Le

Telegram
5min

Société

Mise en examen de Pavel Durov : « Telegram a accepté de devenir la plateforme du crime organisé »

Ce jeudi, le Kremlin a averti que l'affaire judiciaire visant le patron franco-russe de Telegram, arrêté en France, ne devait pas « se transformer en persécution politique ». Inculpé par la justice française qui lui reproche de ne pas agir contre la diffusion de contenus criminels sur la messagerie, Pavel Durov s'est vu imposer un lourd contrôle judiciaire l'obligeant à rester en France. Pour Public Sénat, Michel Sejean, professeur de droit à l'Université Sorbonne Paris Nord, enseignant-chercheur en droit de la cybersécurité et directeur scientifique du Code de la cybersécurité aux éditions Dalloz, analyse une affaire qui pourrait se résumer à « une attaque contre l’impunité » et non contre la liberté d’expression.

Le