Retraites: la grève dure dans les transports, nouvelle épreuve de force en vue
La mobilisation sur les retraites s'est installée dans la durée pour tenter de faire plier le gouvernement, avec des transports publics très...
Par Déborah CLAUDE, Elisabeth ROLLAND, avec les bureaux régionaux de l'AFP
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La mobilisation sur les retraites s'est installée dans la durée pour tenter de faire plier le gouvernement, avec des transports publics très fortement perturbés et de nouvelles manifestations samedi, avant une épreuve de force mardi et la présentation détaillée de la réforme le lendemain.
Les marches "contre le chômage et la précarité", organisées traditionnellement le premier samedi de décembre, avaient cette année une tonalité particulière, en écho au mouvement contre la réforme des retraites. Elles ont rassemblé 23.500 manifestants dans toute la France, selon le ministère de l'Intérieur.
Plusieurs cortèges, certains émaillés de tensions, comprenant parfois des "gilets jaunes", ont défilé en région, mêlant les slogans. La police ou les préfectures ont compté 2.800 manifestants à Nantes, 1.800 à Marseille, 1.200 à Caen, 1.100 à Bordeaux, 800 à Lille et au Havre, 700 à Lyon...
Réunis samedi, les trois premiers syndicats de cheminots ont appelé à amplifier la mobilisation contre le projet de "système universel" de retraite par points, qui doit sonner la fin des 42 dispositifs actuels, dont le régime spécial de la SNCF.
Prévisions de trafic de la SNCF pour le dimanche 8 décembre
AFP
Quelques heures plus tard, le numéro un de la CGT, Philippe Martinez, qui défilait à Paris avec chômeurs et précaires (1.600 manifestants, selon la place Beauvau), se montrait cinglant envers le Premier ministre: "Il fait tout pour que la mobilisation et les grèves durent".
Edouard Philippe est sous pression et multiplie les consultations pour sortir de l'ornière après une mobilisation massive dans la rue jeudi (plus de 800.000 manifestants), un nouvel appel à une grande journée de grèves et manifestations mardi, alors que le trafic RATP et SNCF est très réduit.
Seuls 15% des Transilien (RER SNCF et trains de banlieue), un TGV sur six et un TER sur dix (essentiellement par bus) ont circulé samedi. Le trafic va rester fortement réduit à la SNCF comme à la RATP, avec même 14 lignes de métro parisien sur 16 fermées dimanche, 10 lundi.
La SNCF a recommandé aux usagers d'éviter les Transilien lundi, l'affluence attendue dans les gares d'Île-de-France s'annonçant "très dangereuse". Même ton alarmant à la RATP, qui a invité "tous les voyageurs qui en ont la possibilité à différer leurs déplacements", compte tenu du "fort risque de saturation du réseau" après le week-end.
Édouard Philippe a promis qu'il livrerait mercredi prochain "l'intégralité du projet du gouvernement".
Le Premier ministre Edouard Philippe s'exprime sur la réforme des retraites dans la cour de Matigon, le 6 décembre 2019 à Paris
AFP
Mais y aura-t-il matière à éteindre l'incendie?
"Le calendrier est bouleversé mais rien ne change dans l'objectif du gouvernement: casser notre régime de retraite solidaire pour le remplacer par un système individualisé où chacune et chacun sera perdant", a regretté la CGT, où des voix militent déjà pour une troisième journée de mobilisation jeudi prochain.
Un manifestant contre la réforme des retraites le 5 décembre 2019 à Paris
AFP
Avant les annonces du Premier ministre, la ministre des Solidarités Agnès Buzyn et le haut-commissaire aux Retraites Jean-Paul Delevoye présenteront lundi les conclusions de la concertation relancée en septembre par le gouvernement.
"M. Delevoye va nous dire lundi ce qu'il a retenu de ce qu'on lui a dit. On va aller voir s'il a vraiment écouté ce qu'on lui a dit", a ironisé Philippe Martinez.
- Réforme "comme ma pancarte: en carton" -
Une station de métro fermée à Paris le 6 décembre 2019 en raison de la grève à la RATP contre la réforme des retraites
AFP
A Lille, Charles Suquet, retraité de l'enseignement supérieur et "gilet jaune", en est sûr: "Le gouvernement a écouté mais n'a pas entendu. On va revenir encore plus nombreux, ils finiront bien par comprendre".
"Ta réforme est comme ma pancarte, en carton !", pouvait-on lire dans le cortège de Marseille, où était présent Jean-Luc Mélenchon, qui a appelé à "observer une stricte non-violence" lors des manifestations.
"Le pouvoir, le régime ne compte plus que là-dessus, sur l'effet de repoussoir qu'auraient des violences", a déclaré le chef de file de La France insoumise lors d'un point presse.
De brefs incidents ont émaillé un défilé d'un millier de "gilets jaunes" à Paris. Les manifestations de Nantes et Lyon, tendues, ont donné lieu à des heurts.
Dans la capitale, le préfet de police a de nouveau pris un arrêté obligeant les commerces situés sur le parcours du cortège parisien de mardi prochain, entre Invalides et Denfert-Rochereau, à fermer.
Plusieurs représentations prévues ce week-end à la Comédie-Française et à l'Opéra de Paris - où existent des régimes spéciaux de retraite - ont de nouveau été annulées, tandis que des musées parisiens n'ont ouvert que partiellement.
Le gouvernement a plusieurs foyers à éteindre, et pas seulement sur les régimes spéciaux, pour lesquels Edouard Philippe a promis des "transitions progressives" vers le futur système.
Il doit aussi répondre aux inquiétudes des enseignants, qui craignent que leurs pensions baissent avec les nouvelles règles. Pour l'éviter, le Premier ministre s'est engagé à une "revalorisation progressive" de leur traitement.
De leur côté, les professionnels du commerce et du tourisme commencent à s'inquiéter des conséquences d'un mouvement social potentiellement durable.
A Lyon, les hôtels sont ainsi loin de faire le plein, alors qu'il est habituellement impossible de trouver une chambre en ville pendant le long week-end de la Fête des lumières.
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