Le Sénat va-t-il obtenir gain de cause ? Le projet de loi « renouvellement des conseils départementaux et régionaux », déposé par le gouvernement pour décaler la tenue des prochaines élections locales à cause de la situation sanitaire, est examiné ce 26 janvier en séance. En commission des lois, la semaine dernière, le texte a été adopté en commission des lois, avec une ligne directrice : « S’en tenir strictement à la date de juin ».
Pour les sénateurs, il n’est plus question d’envisager un nouveau report des élections départementales et régionales, mais au contraire de prendre toutes les dispositions nécessaires pour faciliter au mieux l’organisation de ces deux dimanches électoraux. « Notre véritable enjeu maintenant, c’est d’assurer la sécurité sanitaire de la campagne et des opérations de vote », expliquait récemment le sénateur LR Philippe Bas, rapporteur du texte.
Comme en 2020, lorsqu’il a fallu acter dans la loi le report du second tour des élections municipales, les sénateurs ont imaginé quelques adaptations pour tenir compte du contexte et favoriser la participation des électeurs. Ils ont notamment amendé le projet de loi pour permettre davantage de procurations. Mais le gouvernement ne l’entend pas de cette oreille. La commission des lois du Sénat avait permis à chaque électeur de disposer jusqu’à deux procurations, comme lors des municipales. Le gouvernement s’y opposera, inquiet des risques de fraude. Le dispositif se justifiait en juin 2020, selon lui. Il ne peut plus l’être en juin 2021. « Le rapport entre les bénéfices du relèvement à deux du nombre de procurations et les risques qu’il emporte a évolué », justifie l’exécutif, qui précise dans son amendement de suppression que les personnes vulnérables qui veulent se faire vacciner le seront « toutes » d’ici juin. Le ministre de la Santé Olivier Véran avait un temps douté que l’objectif soit tenu, face au Sénat (relire notre article), avant de faire preuve de davantage d’assurance.
En coulisse, les sénateurs affichent déjà leur mécontentement
Autre demande adoptée par le Sénat en commission des lois : permettre à un proche de voter pour une personne âgée ou vulnérable, même s’il réside dans une commune différente. Sur le fond, le gouvernement n’a pas émis d’objection. La loi rendra cette possibilité effective en 2022. Mais il rappelle qu’elle ne pourra pas être mise en œuvre en juin, du fait des contraintes de l’Insee.
Les sénateurs ont également souhaité introduire une campagne officielle pour les régionales, en demandant des clips sur les radios et télévisions du service public, avec France 3 et France Bleu. Là aussi, l’exécutif n’y est pas favorable. Il estime que l’idée sera « matériellement très compliquée voire impossible » à réaliser dans le délai imparti. « Il n’est pas du tout assuré que France Télévisions puisse assurer, seule, la charge, de produire plus de 170 spots de campagne en une dizaine de jours », a-t-il souligné dans l’exposé des motifs de son amendement de suppression.
Autant de demandes de réécriture qui risquent de crisper les échanges entre l’hémicycle de la Haute assemblée et Marlène Schiappa, ministre déléguée chargée de la citoyenneté qui représentera le gouvernement en séance. En coulisse, les sénateurs affichent déjà leur mécontentement. « Le gouvernement flingue le travail du Sénat », déplorait un sénateur socialiste de la commission des lois, hier. « Le sentiment que ça me donne, c’est que le gouvernement ne fait aucun effort pour que ces élections aient lieu. » Nul doute qu’il pourrait être fait allusion dans l’hémicycle aux propos de Jean-Louis Debré, auteur d’un rapport sur l’organisation des élections. L’ancien président du Conseil constitutionnel avait affirmé que l’exécutif avait le « souhait » de reporter les régionales après la présidentielle, avant de modifier quelque peu ses propos (relire notre article).