La porte-parole du gouvernement Maud Bregeon a assuré ce mercredi à la sortie du Conseil des ministres qu’Emmanuel Macron a acté qu’il n’y avait pour le moment pas « de socle plus large que celui qui est en place aujourd’hui » pour gouverner. Mais, après les consultations des responsables de partis mardi, « le président continue à écouter et à tendre la main ».
Régionales : « Les Verts se comptent partout », s’agace Patrick Kanner
Par Héléna Berkaoui
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« Jusqu’au dépôt de listes tout est possible », veut croire le patron des socialistes au Sénat. Les élections régionales des 13 et 20 juin prochains mettent encore à jour les difficultés de la gauche à se rassembler, particulièrement entre les socialistes et les écologistes. En Île-de-France, « le printemps de la gauche et de l’écologie », voulu par le premier secrétaire du PS, Olivier Faure, censé rassembler les forces de gauche, ne verra pas le jour. Les Verts, menés par Julien Bayou, et les socialistes réunis sous la figure d’Audrey Pulvar sont à couteaux tirés tandis que les Insoumis se sont, eux, rangés, derrière Clémentine Autain.
« Les Verts ont décidé dès le départ de faire leur liste à eux, de se compter et ils ne nous ont même pas proposé d’être sur leur liste. Donc aujourd’hui il y a trois listes à gauche, pour gagner il faudra se rassembler au second tour », résume le sénateur de Paris, Rémi Féraud. Le socialiste ne cache pas son agacement face au « mauvais esprit » des Verts. Dans une interview au Parisien, Benoît Hamon, qui figure sur la liste écologiste de Julien Bayou, n’a pas eu des mots tendres pour Audrey Pulvar : « J’en suis resté comme deux ronds de flans quand j’ai vu que Benoît Hamon, que j’ai soutenu à la présidentielle, réservait ces critiques à Audrey Pulvar et non à Valérie Pécresse ».
Dans les Pays de la Loire, là aussi l’alliance n’est pas d’actualité. Les verts et les socialistes partent chacun de leur côté pour le premier tour, avec une promesse d’alliance au second dans une région présidée par l’élue LR, Christelle Morançais. Les socialistes ont choisi l’ancien ministre délégué à l’agroalimentaire, Guillaume Garot. Et pour les écologistes, la tête de liste sera le député Matthieu Orphelin. « Sur la transition écologique et solidaire, Matthieu Orphelin va plus loin, la dynamique de rassemblement est aussi plus forte sur sa liste », estime le sénateur écologiste Ronan Dantec qui a signé l’appel pour une région Pays de la Loire écologique, citoyenne et solidaire, déjà soutenu par EELV, Génération. s, Génération écologie et Allons enfants.
Là où des tractations ont lieu, les relations ne sont forcément pas plus simples. En Auvergne-Rhône-Alpes, où la droite est au pouvoir, le PS et les écologistes peinent à trouver un terrain d’entente. Dans cette région présidée par Laurent Wauquiez, une contribution citoyenne organisée par les Verts a mis aux voix les différentes stratégies en vue du scrutin et surtout la question de l’alliance avec la gauche. De façon écrasante, les militants et sympathisants ont plaidé pour le rassemblement au premier tour contre l’avis des cadres qui, eux, souhaitent partir seuls et engager une alliance au second tour. Pour le sénateur écologiste du Rhône, Thomas Dossus, « les socialistes ne sont qu’une donnée dans l’équation et tout ne s’arrête pas aux accords d’appareils. On a réussi à gagner la métropole de Lyon sans alliance au premier tour », rappelle-t-il.
« Le vote des militants reflète une attente au-delà. Par ce vote, ils ont tiré la sonnette d’alarme et disent « Stop, il faut qu’on discute » », analyse, pour sa part, le président du groupe écologiste au Sénat, Guillaume Gontard. Le sentiment exprimé par les militants d’Auvergne-Rhône-Alpes est loin d’être isolé. Dans un dossier qui a beaucoup agité le monde politique ce week-end, Libération rapportait la profonde lassitude des électeurs de gauche face à l’incapacité de leurs représentants à faire front commun. Ici, ce vote sans équivoque, ne promet pourtant pas une union. « Je ne sais pas si on y arrivera. On ne peut pas se passer de discussions avec les autres forces politiques mais le rassemblement ce n’est pas juste mettre des partis à côté des autres », prévient Guillaume Gontard.
En Auvergne-Rhône-Alpes, les verts sont prêts à une alliance avec les socialistes mais à condition que la liste commune soit emmenée par Fabienne Grébert. En face, la candidature officieuse de l’ancienne ministre socialiste, Najat Vallaud-Belkacem ne fait mystère pour personne. En off, un élu écologiste de la région pose les enjeux de façon plus claire : « C’est un jeu de dupes, chacun a besoin d’exister. Laurent Wauquiez est à 27 % au premier tour, sans réserve de voix, l’enjeu du premier tour est donc de savoir quelle force motrice émergera » dans la perspective d’une alliance au second tour. « Najat Vallaud-Belkacem a une surface médiatique plus importante mais elle est clivante. L’étiquette verte existe au-delà des personnalités médiatiques. Leur problème est qu’il y a autant de socialistes qu’il y a de lignes politiques, le PS n’a plus de ressort idéologique », analyse cet élu local.
« Les Verts se comptent partout », observe le socialiste Patrick Kanner dont la candidature dans la région Hauts-de-France doit ou non être actée après une réunion du bureau national, ce mardi soir. Le sénateur PS du Nord pourrait lui-même devoir se ranger derrière les écologistes pour les régionales (lire ici). Lui aussi regrette que, là où il y a des listes communes, les Verts n’envisagent l’union que derrière eux. « Ils mettent en avant deux arguments : celui de faire de ce scrutin un départage, une primaire de fait ; et ils considèrent que leur score aux Européennes leur donne une supériorité ».
Alors que Patrick Kanner estime que « la prime aux sortants risque d’être marquante comme ça l’a été lors des municipales ». Cependant, l’alliance dès le premier tour n’est pas plus évidente dans les régions présidées par les socialistes. Si en Occitanie, la socialiste Carole Delga fait la course en tête dans les sondages sans que son leadership ne soit contesté en Nouvelle-Aquitaine, dans le Centre-Val de Loire c’est une tout autre histoire. Le vice-président à la Transition écologique du Centre-Val de Loire dirige une liste contre le président socialiste sortant, François Bonneau, prétendant à un troisième mandat. Idem, en Nouvelle-Aquitaine où Nicolas Thierry, qui siège lui aussi à la présidence de la région, va croiser le fer contre le président socialiste, Alain Rousset.
Des initiatives émergent cependant dans les régions où la droite paraît indétrônable comme dans la région Provence-Alpes-Côte d’Azur qui ne compte pas un seul conseiller régional de gauche et 40 élus du Rassemblement national. En 2015, Christophe Castaner, alors socialiste, avait été contraint de se retirer au second tour pour faire barrage à l’extrême-droite. « L’expérience de 2015 reste assez traumatisante, contrairement aux Hauts-de-France où Xavier Bertrand est donné gagnant, ici le Rassemblement national représente un vrai risque et ça contraint à une responsabilité plus grande », détaille le sénateur communiste des Bouches-du-Rhône, Jérémy Bacchi.
L’alliance au premier tour n’est donc pas négociable si la gauche veut éviter de revivre ce scénario. Le printemps marseillais, qui a réussi à mettre fin à l’ère Gaudin aux municipales, entend jouer sa carte mais là encore. Désigné chef de file régional en PACA par EELV, Olivier Dubuquoy a pourtant vu sa motion battue lors d’un vote interne à la mi-janvier serré sur la question de l’union. « En PACA, c’est la région où il y a le plus de possibilités. Il y a un accord entre les forces politiques de gauche et une partie d’EELV est dans ce rassemblement, y compris chez ceux qui avaient voté pour une liste automne », tempère Jérémy Bacchi.
A quatre mois des élections des régionales peuvent encore bouger au gré des sondages et des situations locales. « Les élections sont encore loin », insiste Patrick Kanner.