L'Assemblée nationale a adopté mercredi en dernière lecture, par une très large majorité de 452 voix contre 80, le projet de réforme ferroviaire qui est au centre de la grève la plus longue des trente dernières années à la SNCF.
Ultime étape de son parcours parlementaire, le Sénat à majorité LR votera jeudi le projet de loi porté par la ministre Elisabeth Borne, qui prévoit de transformer la SNCF en société anonyme, de fixer le calendrier de l'ouverture à la concurrence prévue au niveau européen et de supprimer l'embauche au statut dans l'entreprise historique.
Au Palais Bourbon, outre la majorité LREM-MoDem et les UDI-Agir, les trois quarts des LR ont voté pour. Les trois groupes de gauche (socialistes, communistes et Insoumis) et les élus FN se sont prononcés contre.
27 députés se sont abstenus, dont 23 LR et Jean-Michel Clément, en retrait du groupe LREM mais toujours membre officiellement.
La ministre des Transports a assuré avoir "mené cette réforme avec détermination et dans un esprit de dialogue", critiquant ceux cherchant à "nourrir les colères".
"Transformer la SNCF, beaucoup s'y sont essayés" et "le gouvernement a trouvé un chemin", s'est félicité le rapporteur Jean-Baptiste Djebbari (LREM), vantant également les apports parlementaires pour une "protection efficace des salariés" ou un capital "incessible".
En forme de baroud d'honneur, les communistes ont défendu une motion de rejet de ce texte, synonyme selon eux d'un "grand retour en arrière", avant 1936 et le Front populaire. "Vous voulez revendre notre grande entreprise publique à la découpe", a accusé Fabien Roussel, louant la mobilisation cheminote.
"Vous vous prenez pour Thatcher?", a lancé à la ministre l'Insoumis Alexis Corbière, affirmant que le gouvernement ne "triomph(ait) pas" et que la réforme lui "coûtera(it) des défaites électorales". Adrien Quatennens (LFI) a été hué par la majorité lorsqu'il a appelé les cheminots à "punir" et "châtier" ces élus dans les urnes.
Egalement contre la réforme, les socialistes ont "accumulé les regrets", selon Christophe Bouillon, qui a pris la défense des cheminots et de leur statut, un "patrimoine en commun". Olivier Faure, numéro un du PS, a accusé le gouvernement d'avoir "tout fait pour attiser les tensions".
Du côté des soutiens, Jean-Marie Sermier (LR) a estimé que si la réforme "permet des avancées", elle est "loin d'une révolution" ou d'une "modernisation audacieuse". Il a aussi dénoncé "avec force" une poursuite de la grève pendant les épreuves du bac.
Pour le MoDem, Florence Lasserre-David a jugé que la loi aidera à "garantir un meilleur service public ferroviaire au meilleur coût pour l’ensemble des usagers et des contribuables". "Cette réforme stimulera la SNCF", pour Guy Bricout (UDI-Agir).
Des députés de plusieurs bords ont dit leur vigilance voire leurs inquiétudes pour les territoires, regrettant l'étude de ce projet de loi avant celui annoncé sur les mobilités.
Amer, le socialiste Jean-Louis Bricout a tweeté une photo du président de l'Assemblée François de Rugy et de Barbara Pompili, issus des rangs écologistes et devenus LREM, avec un commentaire cinglant: "Notre famille politique leur a tout donné, ils nous ont lâchés pour une tribune qui sacrifie nos cheminots et nos services publics".