Procès Barbarin : « Les victimes n’attendent plus de mots, elles attendent des actes »

Procès Barbarin : « Les victimes n’attendent plus de mots, elles attendent des actes »

Invité de l’émission « On va plus loin », Jean-Pierre Denis, directeur de la rédaction de La Vie, analyse le procès du cardinal Barbarin, jugé, avec cinq autres personnes, pour non-dénonciation d’agressions sexuelles.
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Le procès du cardinal Barbarin, pour non-dénonciation d’agressions sexuelles au sein de l’Église, vient de s’ouvrir, ce lundi à Paris.

« L’omerta de l’Église, je connais » déclare Jean-Pierre Denis, directeur de la rédaction de La Vie, venu analyser ce procès et ses conséquences, sur le plateau d’« On va plus loin ». « Il y a plus de 15 ans j’ai dirigé une enquête sur les abus commis dans des communautés religieuses (…) À l’époque, on nous disait : « Vous ne pouvez pas publier cela parce que si vous le faites, vous êtes de mauvais catholiques » (…) Ça m’a déstabilisé et je n’ai pas vraiment continué. Et au fond, c’est ce qu’on voit aujourd’hui à l’œuvre dans le début de l’affaire Preynat. Une situation dans laquelle beaucoup de catholiques étaient au courant. Et finalement, personne ne parlait. Vous pouvez me dire que j’ai été un mauvais journaliste, j’ajouterais que j’ai été certainement un mauvais catholique. Parce que justement, je pense qu’il faut aller au bout de la vérité. [C’est-à-dire] lutter contre cette culture du silence. »

Mais il ajoute : « Ce n’est pas pour autant (…) qu’il faut décréter que le cardinal Barbarin, ou ses collaborateurs, sont coupables. » Car pour le directeur de la rédaction de La Vie, il y a un risque que la personnalité médiatique du cardinal Barbarin, le desserve, dans ce procès : « Il y a la tentation de se focaliser sur une personnalité qui électrise. Qui a, par ailleurs, commis un certain nombre de déclarations problématiques et qui sont l’arrière-fond de ce procès. Alors même qu’elles n’ont rien à voir avec les faits qui sont reprochés. »

En revanche, Jean-Pierre Denis estime qu’il faut regarder du côté de « l’attitude globale de l’Église » : Il y a quelques années, j’avais conseillé à de hauts responsables de l’Église de lancer une commission d’enquête indépendante, en demandant à cette commission de faire un état des lieux, diocèse par diocèse, époque par époque (…) On m’avait dit que ce n’était pas la peine puisque les affaires étaient derrière nous (…) La plupart de ces affaires sont anciennes, c’est vrai (…) mais les victimes sont toujours là. Et surtout (…) l’Église est confrontée à cette question, au niveau mondial. »

Et le système doit changer : « Ce qui est en question (…) dans ces affaires-là, au-delà des abus sexuels [sur] mineurs, c’est l’abus d’autorité de personnes qui (…) ont un grand charisme » assure-t-il. « Cette culture-là, il faut la changer. Et la deuxième chose qu’il faut changer c’est une culture, non pas de la transparence, mais la nécessité qu’il y ait des comptes qui puissent être rendus à l’intérieur de l’institution. » Jean-Pierre Denis tient également à souligner que « l’institution ne bouge que quand les journalistes, les médias, font leur travail ».  

Pour conclure, Jean-Pierre Denis prévient : « Ne croyez pas que cela va se terminer avec le procès du cardinal Barbarin. Qu’il soit condamné ou qu’il ne soit pas condamné. C’est une affaire au long court (…) Les victimes n’attendent plus des mots, elles attendent des actes. Et je dirais qu’un certain nombre de prêtres attendent aussi des actes (…) Parce que, comme ces mesures n’ont pas été prises suffisamment tôt (…), beaucoup de prêtres passent pour des suspects. »

 

Vous pouvez voir et revoir l’entretien avec Jean-Pierre Denis, en intégralité :

Pédophilie dans l'Eglise : interview avec Jean-Pierre Denis, directeur de la rédaction de La Vie (en intégralité)
08:46

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