Présidentielle dans le rétro : ralliement de Bayrou, « carabistouille » à gauche et grand oral à la Mutualité

Présidentielle dans le rétro : ralliement de Bayrou, « carabistouille » à gauche et grand oral à la Mutualité

On rembobine la présidentielle. Sixième épisode de notre série hebdomadaire consacrée à la semaine de campagne… d’il y a cinq ans. Cap sur la semaine du 20 au 26 février. Les candidats présentent leur programme sur la santé. François Bayrou met fin au suspense et rallie Emmanuel Macron. La gauche fait mine de chercher l’union et malgré les affaires, François Fillon reste haut dans les sondages.
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Que reste-t-il de la présidentielle de 2017 ? Chaque vendredi, Public Sénat vous fait replonger cinq années en arrière, dans la campagne de 2017. Cette semaine, cap sur la semaine du 20 au 26 février.

Pour François Fillon, en cette fin de mois de février, le grand oral des candidats à la présidentielle devant la Mutualité française est l’occasion de rectifier le tir (le même exercice se tiendra la semaine prochaine). Les prétendants à l’Elysée doivent préciser leur programme sur un thème qu’affectionnent les Français, la santé. Selon un sondage Harris Interactive publié la veille, 87 % estiment qu’il faut limiter les dépassements d’honoraires et augmenter les remboursements des frais dentaires et optiques.

Lors de la primaire François Fillon avait provoqué la polémique jusque dans son camp en proposant de « focaliser » l’assurance maladie sur les « gros » risques, affections graves ou de longue durée (ALD), alors que les « petits » seraient remboursés par les mutuelles ou assurances privées. Accusé de vouloir « privatiser » la santé, le candidat de la droite, avait finalement retiré la proposition de son site internet à la mi-décembre.

François Fillon regarde maintenant de près la vision des Français et allège l’ordonnance. Il propose notamment de rembourser 100 % des lunettes pour les enfants et vise ensuite, pour l’ensemble des Français, « un reste à charge le plus proche possible de zéro » avec un nouveau partenariat entre assurance maladie et complémentaires. « Parfois on dit que vous n’avez pas de programme mais on peut le recopier », ironise quelques minutes plus tôt, Emmanuel Macron, qui propose la même mesure.

Macron, « c’est à la fois Woodstock et Wall Street »

Ce début de semaine, le candidat d’En Marche traverse une mauvaise passe et paye ses propos qualifiant la colonisation de « crime contre l’humanité ». Avec 17 % d’intentions de votes, il chute de cinq points et se place derrière François Fillon (20 %) et Marine Le Pen (27 %).

La candidate frontiste est pourtant rattrapée elle aussi par les affaires. Sa cheffe de cabinet est mise en examen dans une enquête sur des soupçons d’emplois fictifs au Parlement européen. La justice « ne doit pas venir perturber […] la campagne présidentielle, car c’est un moment démocratique important, fondamental », lance-t-elle sur le plateau de TF1.

Dans l’entourage de François Fillon, on veut croire que le « Pénélope gate » est en train de passer. Sur le plateau de Public Sénat, Bruno Retailleau, président du groupe Les Républicains au Sénat s’emballe : « Il y a eu un tel acharnement médiatique et politique que cela a excédé les Français. Le sénateur de Vendée voit s’éloigner la menace de la candidature du premier des Marcheurs. « C’est une sorte de golden-boy, et avec la dépénalisation du cannabis, c’est à la fois Woodstock et Wall Street », lâche-t-il.

Union de la gauche ? « Il ne faut pas trop compter sur nous pour une carabistouille »

A gauche, l’idée d’une candidature commune commence à faire son chemin. Sous forme de pétition en ligne, un appel en ce sens réunit près de 70 000 signatures. Si les discussions sont en bonne voie entre Benoît Hamon et l’écologiste Yannick Jadot qui plafonne à 1 % dans les sondages, elles s’annoncent ardues entre le socialiste et Jean-Luc Mélenchon, et ce malgré l’appel à l’union de la gauche du PCF.

« Si Benoît Hamon me dit : je te propose le principe d’une candidature unique, je regarderai ce qu’il propose. Ce n’est pas ce qu’il fait. Ce n’est pas moi qui ferme la porte », assure sur le plateau de France 2, le candidat de la France insoumise.

Dans un courrier adressé au candidat PS, Jean-Luc Mélenchon a toutefois posé des conditions très strictes à un éventuel rapprochement. Le retrait de l’investiture aux élections législatives Myriam El Khomri, Manuel Valls ou encore Bruno Leroux ou encore l’adhésion à des mesures incontournables comme « la convocation d’une assemblée constituante dans les trois premiers mois de la nouvelle mandature », « l’augmentation du Smic et des minima sociaux », « l’instauration de la sécurité sociale intégrale », « la sortie du nucléaire ».

Une rencontre entre les deux hommes est prévue entre les deux hommes les jours suivant mais elle semble déjà de pure forme. « Il ne faut pas trop compter sur nous pour une carabistouille à la sauce Verts-PS », reconnaît Jean-Luc Mélenchon devant les journalistes.

Ralliement de François Bayrou : « Laissons les girouettes voler avec les girouettes »

Le rapprochement cette semaine-là se fera au centre. Après une longue hésitation, François Bayrou décide de ne pas se présenter une quatrième fois à l’élection présidentielle pour soutenir Emmanuel Macron. « Il faut changer les choses et le faire d’urgence. Unissons nos forces pour y parvenir ». Le président du Modem pose ses conditions comme l’intégration dans le programme d’une loi de moralisation de la vie publique, en particulier de lutte déterminée contre les conflits d’intérêts ». Un texte qu’il ne pourra pas accompagner jusqu’à son terme. Nommé garde des Sceaux quelques semaines plus tard, François Bayrou démissionnera au bout d’un mois suite aux accusations d’emplois fictifs du Modem au Parlement européen.

Ce ralliement de François Bayrou est considéré comme le « tournant de la campagne présidentielle », par Emmanuel Macron. Le candidat d’En Marche avait enregistré 24 heures plus tôt le ralliement de l’écologiste François de Rugy. Ancien candidat à la primaire de gauche, il s’était pourtant engagé à soutenir le vainqueur du scrutin, en l’occurrence Benoît Hamon. « Je préfère la cohérence à l’obéissance », justifiera le député de Loire-Atlantique.

La semaine se termine par un meeting à Maisons-Alfort où François Fillon étrille le président du MoDem qui « a cru bon d’apporter son soutien à Emmanuel Macron, comme il l’avait autrefois apporté à François Hollande en 2012 ». « Laissons les girouettes voler avec les girouettes. Nous, nous ne tournons pas avec le vent ».

Quelques minutes avant le début du meeting, une information judiciaire pour « détournement de fonds publics, abus de biens sociaux, complicité et recel de ces délits, trafic d’influence et manquements aux obligations de déclaration à la Haute Autorité sur la transparence de la vie publique » à l’encontre du candidat de la droite, vient d’être annoncée. Le vent de la campagne commence à tourner effectivement.

1er épisode : Un duel au PS, l’ambition d’En Marche et le sparadrap de François Fillon

2e épisode : L’affaire Fillon éclate, Hamon remporte la primaire et la bonne étoile de Macron

3e épisode : Embouteillage à Lyon, doutes dans le camp Fillon et les bons sondages de Benoît Hamon

4e épisode : Présidentielle dans le rétro : février 2017, que se passait-il à cet instant précis de la campagne ?

5e épisode : Présidentielle dans le rétro il y a 5 ans, Fillon et les casseroles, Macron et les cyberattaques russes

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