Pour Clément Beaune, l’accord du Brexit doit servir de modèle aux futurs traités commerciaux

Pour Clément Beaune, l’accord du Brexit doit servir de modèle aux futurs traités commerciaux

Le secrétaire d’Etat chargé des Affaires européennes, auditionné au Sénat, a estimé que l’accord conclu avec le Royaume-Uni en décembre, en matière de respect des standards environnementaux, agricoles ou encore industriels, devait servir de boîte à outils dans la négociation d’autres traités.
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La question des négociations des traités internationaux entre l’Union européenne et d’autres régions du monde est sans doute l’un des aspects les plus délicats de la politique commerciale des Vingt-sept. Mais l’Europe et la France peuvent se satisfaire des modalités conclues avec le Royaume-Uni après sa sortie de l’Union, où la barre a été placée très haut, selon Clément Beaune. Le secrétaire d’Etat chargé des Affaires européennes, auditionné ce 11 février au Sénat, estime que l’accord post-Brexit doit servir de « boîte à outils » et faire des émules, afin de « relever le niveau d’ambition ». « On doit pouvoir l’appliquer à d’autres accords commerciaux. Avec Franck Riester [Commerce extérieur et Attractivité] et Julien Denormandie [Agriculture et Alimentation], dans la négociation d’accords commerciaux, je compte bien l’utiliser », a-t-il prévenu. « On doit en faire la condition d’acceptabilité de nouveaux accords commerciaux. »

Le secrétaire d’Etat a souligné que l’accord signé avec les Britanniques garantissait un certain nombre de règles « uniques » afin d’assurer une concurrence équitable et de vérifier le respect des standards européens environnementaux, agricoles, industriels ou en matière d’aides d’Etat.

« L’accord existant [avec le Mercosur] n’est pas acceptable »

Interrogé par Patrice Joly (PS), l’un des rapporteurs de la commission des affaires européennes au Sénat sur les traités en cours de négociation, Clément Beaune a réinsisté sur l’opposition de la France au traité de libre-échange entre l’Union européenne et le Mercosur (Argentine, Brésil, Paraguay et Uruguay), dont le processus de ratification n’a toujours pas commencé. L’an dernier, le Parlement européen avait estimé qu’il ne pouvait pas l’être « tel quel ». Pour Clément Beaune, les garanties en termes d’agriculture, d’alimentation, de sécurité sanitaire et, surtout, les standards environnementaux comme l’accord de Paris sur le climat, ne sont pas respectées. « La position de la France est claire, elle n’a pas changé, l’accord existant n’est pas acceptable. » Si des modifications devaient intervenir sur les volets de la biodiversité, de l’environnement et des standards sanitaires et alimentaires, « ce serait une autre discussion », a-t-il précisé.

Le 27 avril 2018, le Sénat avait adopté une résolution (un texte non contraignant dans le lequel un Parlement indique une orientation qu’il souhaite voir défendu) dans ce sens. La Haute assemblée avait invité le gouvernement « à ne pas contribuer à précipiter la conclusion d’un accord de libre-échange avec le Mercosur qui contiendrait les germes d’une déstabilisation, d’une part, du marché européen de viande bovine et par ricochet une fragilisation des territoires ruraux, ainsi que, d’autre part, celui des productions ultramarines ». Les sénateurs avaient également appelé à défendre, dans tous les accords commerciaux de manière générale, « un haut niveau d’exigence sociale, sanitaire, phytosanitaire et environnementale ».

« On ne doit pas fermer la porte par principe à tout accord, qui n’est pas forcément diabolique en soi »

« Nous devons être les plus vigilants possibles. Offensifs, car conquérir des marchés internationaux est aussi une condition de vie ou de survie de notre agriculture nationale. Nous ne devons pas être uniquement sur une position défensive mais sans accepter non plus les accords commerciaux qui ne respecteraient pas nos standards », a résumé le secrétaire d’Etat, ce jeudi. « On ne doit pas fermer la porte par principe à tout accord, qui n’est pas forcément diabolique en soi », a-t-il ensuite nuancé

Face à ces conditions maintes fois répétées, le président de la commission des affaires européennes, Jean-François Rapin (LR) s’est toutefois demandé si cette position était bien partagée par une majorité d’Etats dans l’Union. « Je sens, au regard des différents Cosac [Conférence des organes spécialisés dans les affaires communautaires, ndlr], des relations que j’entame avec mes partenaires européens, que la position française me semble un peu isolée, est-ce un ressenti ? »

« Beaucoup de pays ont le souhait d’avancer, c’est le cas du pays qui occupe la présidence tournante, le Portugal », a reconnu le secrétaire d’Etat. Clément Beaune a invité les sénateurs, à ne pas voir le verre à moitié vide, assurant que la France avait des alliés et que ce traité rencontrait bien des résistances. « Pour la première fois, plusieurs Parlements ont d’ores et déjà émis des motions, des résolutions pour dire leur inquiétude, leurs doutes, voire leur opposition. » Il s’agit selon lui du Luxembourg, des Pays-Bas, de l’Autriche, « assez inédit » pour des pays très « pro-commerce et ouverture ». L’Irlande et la Belgique ont également comme les autres Etats cités, interrompu le processus de ratification.

Le Mercosur n’est pas le seul traité dans les radars. Moins avancés, les projets de traités avec l’Australie et la Nouvelle-Zélande suscitent aussi de sérieuses réserves. « Il n’y a aucune – même s’il y a une pression en ce sens de certains Etats membres – à précipiter et conclure des accords qui portent principalement des enjeux pour la France sur la question agricole », a prévenu Clément Beaune. Pour le ministre, il ne s’agit pas de « sacrifier » les filières laitières ou l’élevage « à l’aune d’une sorte de religion de l’accord commercial ».

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