PMA pour toutes: l’Assemblée adopte largement le projet de loi bioéthique
Après 80 heures environ de débats intenses, l'Assemblée nationale a adopté largement mardi le vaste projet de loi bioéthique avec la mesure...
Par Charlotte HILL
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Après 80 heures environ de débats intenses, l'Assemblée nationale a adopté largement mardi le vaste projet de loi bioéthique avec la mesure phare de l'ouverture de la PMA à toutes les femmes, sans faire totalement le plein de voix dans la majorité.
Le texte sensible, première grande réforme sociétale du quinquennat, a été voté en première lecture par 359 voix contre 114 et 72 abstentions, sous des applaudissements de la majorité. Il devrait arriver en janvier au Sénat et le gouvernement espère voir la loi adoptée "avant l'été".
Le texte a eu le soutien de 250 élus LREM mais huit ont voté contre et 25 se sont abstenus. Au MoDem, 28 élus ont voté pour, trois contre et 12 se sont abstenus.
Outre la mesure emblématique de l'ouverture de la PMA aux couples de lesbiennes et aux femmes célibataires, le texte prévoit une délicate réforme de la filiation et de l'accès aux origines, et aborde nombre de sujets complexes comme l'autoconservation des ovocytes ou la recherche sur les cellules souches embryonnaires.
Des manifestants opposés à la PMA pour toutes le 6 octobre 2019 à Paris
AFP
La ministre de la Santé Agnès Buzyn a salué peu avant le vote "un texte d'équilibre, parfois progressiste, parfois conservateur", se félicitant de la "sérénité" des échanges, même si le "consensus" n'est pas possible sur ces questions.
"Nous concrétisons une promesse du président Macron et de la majorité", a salué le chef de file des députés LREM Gilles Le Gendre, Aurore Bergé se félicitant qu'ait été tenue "une ligne de crête extrêmement étroite".
Dans tous les groupes politiques, la liberté de vote était de mise sur ces sujets qui touchent à l'intime et ont suscité des questionnements au-delà des clivages partisans.
A l'instar de la majorité, les autres groupes n'ont pas voté unanimement, même si les élus de gauche - PS, PCF et LFI - ont largement soutenu un texte "imparfait".
Libertés et Territoires a aussi voté majoritairement pour tandis que les UDI-Agir se sont partagés.
Tentatives de PMA, en 2017, par technique et par origine des gamètes, ainsi que nombre d'enfants nés de PMA, par origine des gamètes
AFP
Comme attendu, les élus LR ont majoritairement voté contre ce qu'ils ont inlassablement dénoncé comme une "PMA sans père". Douze élus ont néanmoins voté pour, voyant dans l'ouverture de la PMA la fin d'une "inégalité profonde".
Les élus RN, qui siègent parmi les non-inscrits ont majoritairement voté contre.
- "Effet domino" -
Le "pari" de débats sereins fait en amont par la majorité a été globalement respecté malgré quelques coups d'éclat, comme lorsque l'ex-LREM Agnès Thill, farouche opposante à la PMA pour toutes, a dénoncé une "loi criminelle".
Mais la tonalité était loin du climat d'il y a six ans sur le mariage pour tous.
L'extension de la PMA a fait l'objet à elle seule de trois jours de débats acharnés.
Un laborantin du laboratoire de biologie reproductive TENOS de l'hôpital Tenon à Paris prépare des échantillons de sperme le 24 septembre 2019
AFP/Archives
Des LR ont inlassablement pointé un "effet domino" inéluctable vers la gestation par autrui (GPA), même si le gouvernement répète que celle-ci reste "un interdit absolu en France".
Au-delà du Palais Bourbon, plusieurs dizaines de milliers d'opposants ont manifesté le 6 octobre, agitant des drapeaux "Liberté Égalité Paternité", tandis que des familles homoparentales répliquaient avec des photos de famille sur Twitter.
Mais seule une poignée d'élus RN et LR étaient dans le cortège, plusieurs de ces derniers se refusant à refaire "le match" du mariage homosexuel.
Après le vote, La Manif pour tous a appelé à "amplifier le mouvement". Les opposants à l'extension de la PMA ont annoncé un nouveau week-end d'"actions délocalisées partout en France", les 30 novembre et 1er décembre.
"C'est une première étape mais le texte reste incomplet", a réagi de son côté la présidente de Gaylib Catherine Michaud, regrettant notamment un mode de filiation spécifique aux lesbiennes.
Comme l'article clé, l'ensemble du texte n'a été retouché qu'à la marge dans l'hémicycle.
Les députés ont prévu que les donneurs pourront connaître le nombre d'enfants nés de leur don, mis fin au recours aux "bébés médicaments", ou encore proposé une meilleure prise en charge des enfants qui naissent "intersexes".
Plusieurs élus se sont aussi dévoilés de manière très personnelle lors des débats: en réponse à ceux qui critiquaient des "bébés sur commande", un élu LREM a notamment confié avoir eu recours au difficile parcours de la PMA.
Alors que François Bayrou souhaite pouvoir avoir le ministre de l’Intérieur sortant dans son équipe, Bruno Retailleau a obtenu les garanties qu’il attendait, selon l’entourage du ministre. Il est prêt à lâcher l’idée d’un grand texte immigration, qui susciterait une levée de boucliers, pour « saucissonner » les sujets via plusieurs propositions de loi. Globalement, les LR sont rassurés et devraient rester au gouvernement.
Alors que le premier ministre a demandé aux partis de se positionner par rapport à l’exécutif selon trois choix, les partis de gauche ne souhaitent pas rentrer pas dans le jeu de François Bayrou. Ils attendent des signaux qui pourraient les amener à ne pas censurer. Mais ils ne les voient toujours pas…
C’est le signe d’ouverture vers la gauche qu’on retient de la réunion, ce jeudi 19 décembre, entre les différents représentants des partis politiques (hors Rassemblement national et La France insoumise) et François Bayrou. Le nouveau Premier ministre propose de remettre en débat la réforme des retraites, pour aboutir à un nouveau compromis avec les partenaires sociaux d’ici septembre. Sans nouvel accord, c’est la réforme adoptée en 2023 qui continuerait à s’appliquer. « Lorsque François Bayrou met tous les représentants de partis et de groupes autour de la table, je pense qu’il envoie un signal d’ouverture qui va le légitimer. Il est conscient de la situation politique inédite et il tend des mains », salue la députée Renaissance Eléonore Caroit, sur le plateau de Parlement Hebdo, au lendemain de la rencontre. « Au lieu d’avoir cette posture de contestation permanente, travaillons ensemble ! » « La première des choses, c’est de suspendre l’application de cette réforme, pour permettre aux 50 000 salariés qui devaient partir en retraite et qui en ont été empêchés cette année de pouvoir le faire », rétorque le sénateur communiste Ian Brossat. Une position partagée par l’ensemble des partis de gauche, à la sortie de la rencontre à Matignon la veille. Tous attendent davantage de compromis de la part du Premier ministre, avant de s’engager à ne pas le censurer. « Pour l’instant, il n’y a absolument rien qui garantisse à François Bayrou d’échapper à une motion de censure, parce que tout ce qu’il dit va dans le sens d’une perpétuation des politiques macronistes menées depuis 7 ans », fustige le sénateur communiste. Une position que dénonce vivement la députée Renaissance : « S’il faut revenir sur cette réforme, s’il y a des choses à améliorer, je suis tout à fait prête à ce qu’on en discute. Mais je pense qu’il faut qu’on arrête de polariser le débat. Au lieu d’avoir cette posture, cette attitude de renfermement et de contestation permanente, travaillons ensemble ! » Ian Brossat dénonce un « déni de démocratie » Ce n’est pas la première fois que le débat des retraites revient sur la table ces derniers mois. À la fin du mois de novembre, La France insoumise avait profité de sa niche parlementaire à l’Assemblée pour introduire une proposition de loi visant à abroger la réforme. Après des débats houleux, le texte n’avait pas pu être voté en raison du trop grand nombre d’amendements déposés par les groupes de la droite et du centre. « Lorsqu’ils ont eu la possibilité de voter aux dernières élections, les Français ont massivement soutenu des partis politiques qui s’engageaient à abroger la réforme. Quand ce sujet a, à nouveau, été débattu à l’Assemblée, les députés macronistes ont pratiqué l’obstruction pour éviter le vote d’une loi d’abrogation », dénonce Ian Brossat. « Si nous étions dans un pays véritablement démocratique, cette réforme serait déjà abrogée », ajoute-t-il, dénonçant un « déni de démocratie ». Une expression qui ne passe pas pour Eléonore Caroit. « C’est une réforme dont l’examen a pris trois semaines, vous pensez qu’elle aurait pu être abrogée dans une niche parlementaire ? C’est fantaisiste », fustige la députée. De son côté, François Bayrou a répété sur le plateau de France 2 après la rencontre à Matignon, qu’il était ouvert à une autre solution que le report de l’âge de départ de 62 à 64 ans pour financer le système des retraites. Le nouveau Premier ministre a notamment rappelé qu’il avait été « un militant de la retraite à points ».
Les chefs de partis et de groupes parlementaires étaient reçus à Matignon par François Bayrou, qui promet de former un gouvernement « avant Noël ». Une rencontre dont les socialistes, écologistes et communistes ressortent sans avoir « trouvé de raison de ne pas censurer » le nouveau Premier ministre, rapporte Olivier Faure.