Nord de Marseille : match incertain pour un vieux routier du FN

Nord de Marseille : match incertain pour un vieux routier du FN

Le deuxième essai devait être le bon : dans les quartiers Nord de Marseille, le sénateur-maire Stéphane Ravier, vieux routier du Front national,...
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Par Francois BECKER

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Le deuxième essai devait être le bon : dans les quartiers Nord de Marseille, le sénateur-maire Stéphane Ravier, vieux routier du Front national, joue un match plus incertain qu'il ne l'espérait face à une jeune avocate macroniste qui tente de le ringardiser.

"Ravier renvoie à ce qu'il y a de pire. Il est ancré dans son parti depuis des années, il y a fait toute sa carrière", attaque Alexandra Louis, 33 ans, candidate de la République en Marche dans la 3e circonscription des Bouches-du-Rhône.

Ringardiser le sénateur-maire des 13e et 14e arrondissements, au coeur de cette circonscription, détracteur de "l'immigration massive", de "l'américanisation de la société" tout autant que grand fan d'AC/DC ? "Pas besoin, il se débrouille très bien tout seul", lâche cette novice en politique.

Anciens centres villageois, mais aussi cités délabrées, chômage, insécurité... "Cette circonscription a été abandonnée depuis longtemps", critique cette jeune femme brune, sans enfant, qui a décroché son premier emploi dans un centre aéré de ces quartiers.

La candidate dénonce "le repli, la haine" et "les raisonnements simplistes" du FN. Elle plaide éducation, culture et travail et met en avance son expérience d'avocate de salariés aux prud'hommes pour défendre la réforme promise par Emmanuel Macron dans ce domaine.

- Duel incertain -

"Ça ne sert à rien d'être jeune pour avoir des idées de vieux", rétorque, chemise blanche et teint hâlé, Stéphane Ravier, en serrant des mains dans les rues d'une circonscription populaire qu'il connaît comme sa poche.

Alexandra Louis, candidate aux législatives pour La République en Marche (LREM) à Marseille, le 13 juin 2017
Alexandra Louis, candidate aux législatives pour La République en Marche (LREM) à Marseille, le 13 juin 2017
AFP

Sur le papier, le cadre du FN, qui a grandi dans une copropriété des quartiers Nord, conseiller d'arrondissement dès 1995, voit les planètes s'aligner: il est arrivé en tête du premier tour, avec 30,8% des voix et 6 points d'avance sur sa concurrente.

Ce père de famille de 47 ans se voit en "candidat enraciné", martèle ses fondamentaux, "insécurité, immigration, fiscalisme". Mais le duel est incertain: un front républicain dans les urnes et l'abstention (59% au premier tour) pourraient lui coûter l'élection.

Alexandra Louis est "une candidate hors-sol coupée de réalités", pilonne-t-il. "Elle est avocate au barreau de Marseille ? Moi, je suis avocat des habitants de ces quartiers, j'ai un Bac +30 de la réalité du quotidien des quartiers nord de Marseille !".

"Je ne pense pas appartenir à une élite, je représente les classes moyennes", affirme pour sa part Mme Louis. Elle dit s'être installée récemment à son compte et gagner "autour du Smic".

Un père marin-pompier, une mère auxiliaire de puériculture, un bac techno en sciences médico-sociales avant des études de droits financées par des petits boulots: les électeurs "préfèrent quelqu'un qui a connu les mêmes réalités" qu'eux, affirme-t-elle.

- Circonscription en jachère -

La clé de l'élection se trouve en partie chez les 18,5% qui ont voté Sarah Soilihi, porte-parole nationale de Jean-Luc Mélenchon. Un round final avec cette "mascotte" des Insoumis, championne de boxe et juriste issue de l'immigration, aurait été "plus clivant", reconnaît Stéphane Ravier.

Mme Soilihi a appelé "à se rendre massivement aux urnes afin de battre le Front national, véritable danger pour notre démocratie et aggravateur de haine". En face, Stéphane Ravier espère remédier à la "démobilisation" du premier tour: "J'en appelle aux milliers d'électeurs du Front national qui pensent que (...) les jeux sont faits".

Déjà candidat en 2012, il n'avait perdu que de 699 voix, face à Sylvie Andrieux. L'ancienne socialiste a depuis été condamnée pour détournement de fonds publics et a démissionné, laissant une circonscription en jachère et sans député sortant.

M. Ravier a entretemps élargi son assise, remportant deux mandats, de maire de secteur et de sénateur, en 2014. A l'épreuve du pouvoir, il a été confronté à une série de démissions dans sa majorité, ses détracteurs dénonçant une "gestion catastrophique et autocratique" qui lui a valu le sobriquet de "dictateur nord-phocéen".

L'un de ces frontistes repenti, Antoine Maggio, s'est présenté et a assuré dès le soir du premier tour qu'au second tour il voterait Alexandra Louis "sans aucune hésitation". Il n'a récolté dimanche que 1,24% des voix, rappelle de son côté M. Ravier.

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