Le RN présente un nombre de listes aux élections municipales inférieur d'un tiers à celui de 2014, privilégiant "la qualité à la quantité", mais subissant comme les autres partis une crise de l'engagement, avec une étiquette qui continue de faire peur.
Le parti de Marine Le Pen aura, sans compter les arrondissements des grandes villes, 430 listes, dont 410 sous son étiquette, contre près de 600 il y a six ans, a annoncé mardi le numéro deux du parti Jordan Bardella sur franceinfo.
Le RN soutient pour la première fois à ce scrutin des candidats extérieurs au parti, au nombre donc d'une vingtaine.
"Nous investissons des gens sur la durée", explique la présidente du parti, désireuse de ne pas subir la même hémorragie qu'après les municipales de 2014, quand un tiers des conseillers municipaux FN (devenu RN) avaient démissionné, par lassitude ou méconnaissance de la fonction.
Le RN assure cette fois avoir investi moins de candidats mais mieux formés. Quand "le candidat n'a pas la qualité qui est suffisante (...) nous ne l'investissons pas", a souligné samedi Mme Le Pen. Le parti a ainsi retiré son investiture à sa tête de liste à Montpellier, du fait de la présence sur cette dernière d'un candidat condamné en 2019 et mis en cause pour des publications sur sa page Facebook.
- Tenir la route -
Le RN veut surtout des élus, y compris d'opposition, qui tiennent la route et soient prêts pour les échéances suivantes (départementales et régionales en 2021), considérées comme des marchepieds vers la présidentielle.
Le parti mise aussi cette fois davantage sur ses bastions des Hauts-de-France et du pourtour méditerranéen. Dans le Pas-de-Calais, fief de Marine Le Pen où elle est députée, le parti a pu présenter 6 listes de plus qu'en 2014. Mais en Ile-de-France, terre de conquête, le nombre de listes est "décevant", a admis la cheffe du RN, qui prévoit d'y faire "un gros travail de reconstruction".
La "qualité" n'est pas toujours au rendez-vous, comme à Strasbourg, où le candidat investi avait, selon le RN, "caché" des condamnations pour violences racistes, et a dû jeter l'éponge. Une liste a cependant pu être finalement déposée. A Belfort, la candidate RN a été radiée dimanche des listes parce qu'elle ne résidait pas dans la ville depuis au moins six mois comme exigé.
A défaut de trouver les candidats adéquats, le parti a aussi pris le risque de parachuter des militants, comme à Calais ou à Lens (Pas-de-Calais), provoquant des dissidences, et que les sondages ne donnent pas à ce stade gagnants.
- "Pressions" -
Outre cette sélection mise en avant par le parti, le RN "ne dispose pas de forces militantes suffisantes" dans les petites villes pour constituer des listes, rappelle une étude sur le RN et les municipales pour la fondation Jean Jaurès, dans un contexte de baisse des adhésions, tombées à 20.000 depuis l'échec de Marine Le Pen à la présidentielle en 2017.
A cette "crise des vocations", commune à tous les partis, s'ajoute le fait que "la dédiabolisation est loin d'être achevée" au RN, selon la même étude. Figurer sur une liste du parti d'extrême droite "n'est pas anodin".
"Il y a une pression sociale et une peur de représailles. Et ce n'est pas normal", s'indigne l'ancien ministre sarkozyste Thierry Mariani, devenu eurodéputé avec le soutien du RN.
"Il faut un mental d'acier" dans les départements moins favorables au RN, témoigne la responsable du RN en Charente, Isabelle Lassalle, qui dénonce des "pressions familiales ou professionnelles intolérables".
A Paris, le candidat soutenu par le RN Serge Federbusch, qui a bouclé ses listes in extremis jeudi, confie avoir eu plus de mal à recruter qu'en 2014 quand il militait avec l'entrepreneur libéral Charles Beigbeder. "Les gens avaient moins peur", dit-il.