Mineurs non accompagnés : une mission sénatoriale demande une « véritable politique nationale »

Mineurs non accompagnés : une mission sénatoriale demande une « véritable politique nationale »

Un rapport du Sénat, fruit des travaux d’une mission d’information transpartisane, demande un meilleur pilotage de l’identification, de l’accueil et de l’accompagnement des mineurs étrangers.
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« Peu cohérente, coûteuse et porteuse de risques pour des mineurs particulièrement vulnérables » : un rapport du Sénat s’inquiète des conditions actuelles de la prise en charge des mineurs non accompagnés. Conclusion d’une mission d’information, il formule 40 propositions pour mieux structurer la réponse des pouvoirs publics. Quatre sénateurs de différents groupes ont participé à sa rédaction : Hussein Bourgi (PS), Laurent Burgoa (LR), Xavier Iacovelli (majorité présidentielle) et Henri Leroy (LR).

Le premier axe de leurs recommandations répond à une préoccupation exprimée de longue date par les départements, en première ligne dans la prise en charge. Les sénateurs plaident pour une reprise en main par l’Etat et pour l’émergence d’une politique nationale. Différences de traitement d’un territoire à un autre, « multiplicité » des instances susceptibles d’être saisies au niveau de la justice : les sénateurs estiment que l’hétérogénéité des situations est préjudiciable. Le sujet est évidemment budgétaire. La prise en charge des mineurs non accompagnés par l’aide sociale à l’enfance sera estimée à 1,1 milliard d’euros.

Appel à l’Etat

Au 31 décembre 2020, plus de 23 000 mineurs non accompagnés étaient pris en charge par les conseils départementaux. Ce sont ces derniers qui doivent évaluer si les mineurs non accompagnés sont bien mineurs et en parallèle assurer une mise à l’abri, phase qui peut se prolonger tant que la justice n’a pas rendu une décision. Le rapport demande à l’Etat d’assurer ces missions. D’ici là, la mission sénatoriale préconise de réviser le mode de calcul du soutien financier de l’État. Il faudrait, selon eux, pérenniser la contribution « exceptionnelle » de l’État versée aux départements et se baser sur les effectifs des mineurs non accompagnés pris en charge par l’aide sociale à l’enfance.

Le rapport se penche aussi sur les questions de sécurité. Dans un premier temps, il tient à éviter l’amalgame « inexact » entre mineurs non accompagnés et délinquance. « Une très grande majorité des faits de délinquance commis par des mineurs étrangers ou des personnes se présentant comme tels ne sont pas le fait de mineurs non accompagnés pris en charge par l’aide sociale à l’enfance », détaillent les sénateurs. Le rapport évoque des « jeunes en errance », avec une proportion importante de « majeurs », non pris en charge.

Demande de création d’un fichier national des mineurs non accompagnés délinquants

Concernant ces « jeunes en errance », le rapport met en lumière des statistiques inquiétantes. La part de ces jeunes en errance sur le total des mis en cause a plus que doublé entre 2016 (3 %) et 2020 (7 %) dans Paris et sa petite couronne, ou dans les Bouches-du-Rhône. Les sénateurs ont aussi relevé une évolution des infractions relevées : celles-ci sont plus graves et violentes. Dans la catégorie des vols avec violence, les jeunes en errance, non pris en charge par l’aide sociale à l’enfance, représentent 27 % des mises en cause en 2020 dans l’agglomération parisienne, une part trois fois plus importante qu’en 2016.

Face à ces phénomènes, les services de police et la justice manquent de moyens adaptés, déplorent les sénateurs. Ils recommandent une meilleure structuration des services de police et de gendarmerie, en favorisant la coordination entre les différentes unités.

La première difficulté de la réponse pénale provient de la difficulté à recueillir l’identité de ces jeunes, ce qui conduit les autorités à considérer les personnes interpellées comme des primo-délinquants, et perturbe les peines à apporter. Les sénateurs recommandent d’ouvrir l’accès aux forces de l’ordre aux données du fichier d’appui à l’évaluation de minorité, mais aussi de créer un fichier national des mineurs non accompagnés délinquants. Une autre piste évoquée dans le rapport est de punir plus sévèrement le refus de se soumettre aux relevés d’empreintes ou la fausse déclaration de minorité.

Un soutien jusqu’à la fin de leur formation

Parce que l’enjeu des mineurs non accompagnés ne s’arrête pas une fois leur majorité acquise, les sénateurs ont soumis également quelques propositions pour garantir leur avenir et leur autonomie. Ils demandent de réduire les délais pour leur permettre d’être scolarisés le plus rapidement possible. Ils ajoutent que le soutien des départements doit valoir jusqu’à l’achèvement de leur formation ou de leur qualification professionnelle. « Si à sa majorité, l’ancien MNA se retrouve sans solution et en situation irrégulière, la prise en charge par l’aide sociale à l’enfance aura été vaine, alors même qu’elle représente un investissement humain, éducatif et financier important », estiment les sénateurs.

Pour ces jeunes sur la voie d’une insertion professionnelle, les sénateurs veulent faciliter la mise en œuvre des procédures d’accès au séjour et anticiper la délivrance des cartes le plus tôt possible, « afin d’éviter les ruptures administratives à la majorité ». Le rapport évoque notamment les cas de jeunes « bien intégrés » socialement et insérés dans un parcours professionnel contre lesquels des mesures d’expulsion sont parfois prises. Un nouvel écho aux problématiques portés par la proposition de loi Durain.

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