Michelle Perrot : « Les féministes sont des légalistes, leur combat a toujours été mené par les lois »

Michelle Perrot : « Les féministes sont des légalistes, leur combat a toujours été mené par les lois »

« En histoire, qu’est-ce qu’on dit sur les femmes ? Rien ! ». C’est après avoir fait ce constat que Michelle Perrot a commencé sa carrière d’historienne spécialiste des femmes, devenant pionnière dans ce domaine. Cette semaine dans Livres & vous, Guillaume Erner reçoit celle qui préface Femmes et République, un récit sur la place des femmes dans la République en France depuis la Révolution, publié aux éditions de La Documentation française.
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Par Flora Mansiet

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Publié le

Les femmes réclament le droit de vote depuis aussi longtemps que les hommes

Comment les femmes ont-elles pris part à la vie politique ? Quels combats ont-elles menés pour y arriver ? Le premier d’entre eux fut de pouvoir voter : « Les femmes réclament le droit de vote depuis aussi longtemps que les hommes, depuis la Révolution française » pointe l’historienne.
Pourtant, ce n’est qu’en 1944 que le Général de Gaulle leur octroie ce droit, presque cent ans après le suffrage universel masculin. Pourquoi demande Guillaume Erner ? « La République s’est fondée sur l’idée de la séparation entre sphère publique et sphère privée. Or, les femmes n’existaient que dans la sphère privée » explique Michelle Perrot.

Être députée ou sénatrice, les termes n’existaient même pas

Si elles obtiennent « le droit de choisir » leurs élus au milieu du XXe siècle, ont-elles pour autant la capacité à représenter ? « Non, être députée ou sénatrice, les termes n’existaient même pas », rappelle l’historienne qui pointe du doigt notamment les années 1960 et 70, période pendant laquelle « moins de 2 % de femmes siègent au Parlement ».
À cette époque, l’histoire des femmes est celle de leur combat pour leur corps. C’est d’ailleurs à ce moment que Simone Veil prononce son discours sur l’IVG en s’excusant de le faire « devant une Assemblée entièrement composée d’hommes ».

Le principe de la parité a fait effet au point de devenir une évidence

La question de la parité, et donc de la capacité des femmes à participer elles aussi à la politique, à la sphère publique, se pose enfin dans les années 1980-90 : « Comme à chaque fois, les féministes revendiquent un changement par la loi. Le mouvement féministe est un mouvement très légaliste » souligne l’historienne. Ce n’est qu’en 2000 que la parité est votée.


Ainsi, « petit à petit, le principe de la parité a fait effet au point de devenir une évidence. L’Histoire c’est ça, des choses qui étaient impensées et qui deviennent des évidences » conclut Michelle Perrot.

Retrouvez cette émission en replay ici

« Femmes et République », Michelle Perrot
, Editions de la Documentation Française

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Société

Procès de l'assassinat de Samuel Paty : tous les accusés ont été reconnus coupables

Les deux amis de l’assassin du professeur Samuel Paty, Naïm Boudaoud et Azim Epsirkhanov, ont été reconnus coupables de complicité d’assassinat et condamnés à 16 ans de réclusion criminelle. Le verdict a été accueilli par des cris et des pleurs de la part de la famille de Naïm Boudaoud, âgé de 22 ans. « Ce soir, c’est la République qui a gagné », s’est félicité Thibault de Montbrial, avocat de Mickaëlle Paty, une des sœurs du professeur assassiné. La cour a également déclaré coupables d’association de malfaiteurs terroriste les deux auteurs de la « campagne de haine « qui ont fait de Samuel Paty une « cible » : Brahim Chnina, 52 ans et le prédicateur islamiste Abdelhakim Sefrioui, 65 ans, ont écopé respectivement de 13 et 15 ans de réclusion criminelle. « J’ai compris que vous avez fait de la politique, pas de la justice », s’est exclamé depuis son box Abdelhakim Sefrioui avant d’être sèchement interrompu par le président, tandis que la famille de Brahim Chnina, très nombreuse sur les bancs du public, éclatait en sanglots et cris de désespoir. Vincent Brengarth, un des avocats d’Abdelhakim Sefrioui, a annoncé aussitôt que son client faisait appel de sa condamnation. Ouadie Elhamamouchi, autre avocat du prédicateur, a estimé que son client était désormais « un prisonnier politique ». « Je me désolidarise de ces propos-là », a cependant nuancé Me Brengarth, montrant des failles dans la défense du prédicateur. Avocat de la compagne de Samuel Paty et de leur fils, présent à l’audience, Francis Szpiner s’est félicité d’un « verdict équilibré ». Le fils de Samuel Paty, âgé seulement de 9 ans, a compris que « justice a été rendue pour son père », a-t-il ajouté. Si le quantum des peines n’est pas très différent de ce que réclamait le parquet, la cour présidée par Franck Zientara a choisi de maintenir l’infraction de « complicité » pour les deux amis d’Abdoullakh Anzorov, un islamiste radical tchétchène de 18 ans, abattu par la police peu après son acte. Les quatre autres accusés, dont une femme, appartenant à la « jihadosphère » qui était en contact avec Anzorov sur les réseaux sociaux, ont également tous été condamnés à des peines de prison ferme ou avec sursis. Pour deux d’entre eux (Ismaël Gamaev et Louqmane Ingar) la cour a retenu l’association de malfaiteurs terroriste tandis qu’elle a déclaré coupable Priscilla Mangel de provocation au terrorisme et Yusuf Cinar d’apologie du terrorisme. La veille de l’attentat, Naïm Boudaoud et Azim Epsirkhanov avaient accompagné Anzorov à Rouen pour y acheter un couteau (pas celui qui a servi à décapiter Samuel Paty) qui sera retrouvé sur la scène de crime. A l’audience, Boudaoud et Epsirkhanov ont répété qu’Anzorov leur avait expliqué que ce couteau était « un cadeau » pour son grand-père. Le jour de l’attentat, le 16 octobre 2020, Boudaoud, le seul sachant conduire, avait accompagné le tueur dans un magasin de pistolets airsoft puis l’avait déposé à proximité du collège où enseignait Samuel Paty. « Volonté de s’attaquer à l’intégrité physique d’un tiers » Les deux jeunes gens « avaient conscience de la radicalité » d’Anzorov et qu’il « avait la volonté de s’attaquer à l’intégrité physique d’un tiers », a estimé la cour. Cependant, a souligné le président Zientara, « il n’est pas démontré que (les deux jeunes gens) étaient avisés de l’intention d’Anzorov de donner la mort à Samuel Paty ». Les magistrats du Pnat avaient requis 14 ans de réclusion assortie d’une période de sûreté des deux tiers contre Boudaoud et 16 ans de réclusion également assortie d’une période de sûreté des deux tiers contre Epsirkhanov. La cour n’a cependant pas retenu la période de sûreté des deux tiers à leur encontre. Brahim Chnina, père de la collégienne qui a menti en accusant le professeur d’avoir discriminé les élèves musulmans de sa classe lors d’un cours sur la liberté d’expression où il a présenté une caricature de Mahomet, avait lui posté des messages et une vidéo hostile au professeur dès le 7 octobre. Quant à Abdelhakim Sefrioui, fondateur de l’association (aujourd’hui dissoute) pro-Hamas « Collectif Cheikh-Yassine », il avait qualifié Samuel Paty de « voyou » dans une autre vidéo. Mais rien ne prouve qu’Anzorov avait vu la vidéo d’Abdelhakim Sefrioui, avaient mis en avant ses avocats, ajoutant que leur client n’avait pas rencontré l’assassin de Samuel Paty. « La cour a considéré que (MM. Chnina et Sefrioui) avaient préparé les conditions d’un passage à l’acte terroriste », a indiqué M. Zientara. (Avec AFP)

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