« Notre stratégie à la fois préventive et réactive a été la bonne » assure, ce jeudi, Jean Castex, lors de sa désormais traditionnelle conférence de presse destinée à faire le point sur la situation sanitaire du pays. Avec une moyenne de 16 000 nouveaux cas par jour, et de 24 769 personnes hospitalisées, le premier ministre estime que la situation reste « préoccupante, même si globalement stabilisée ». L’apparition de nouvelles souches du virus, au Royaume-Uni notamment, plus contagieuses, préoccupe l’exécutif, qui indique que leur « potentiel développement sur le territoire ne doit pas être sous-estimé ». Une série de nouvelles mesures restrictives entreront donc en vigueur à compter de samedi.
D’abord, le couvre-feu national, jusqu’alors fixé à 20 heures, à l’exception de certains territoires particulièrement touchés par le virus, est désormais fixé à 18 heures sur l’ensemble du territoire, dès samedi. Une mesure « graduée », selon le président du groupe de la majorité au Sénat François Patriat. « C’est une annonce sans surprise », réagit-il. « Le reconfinement n’est pas préconisé. Le gouvernement prend des mesures graduées et appropriées. Et, malgré ce que j’entends, la situation en France, comparé à celle de nos voisins européens, montre qu’on a bien anticipé la situation », soutient le sénateur. Eviter le reconfinement à tout prix, c’est aussi la volonté du chef de file des sénateurs centristes, Hervé Marseille. « On sait que le confinement est une arme ultime, et qu’il y a des conséquences extrêmement lourdes. Donc si les mesures prises par le gouvernement permettent d’éviter ce confinement c’est aux Français de continuer à faire preuve de prudence et de responsabilité pour éviter à tout prix d’arriver à une extension de l’épidémie », commente l’élu des Hauts-de-Seine.
Un renforcement du contrôle aux frontières
Mais certains, comme Patrick Kanner, prennent le contrepied et estiment que la mise en place d’un couvre-feu à 18 heures sur l’ensemble du territoire n’est pas une mesure suffisante pour faire face à la situation sanitaire. « Pas de confinement de week-end, pas de limitation de déplacement entre les régions… Je n’ai pas les données, mais je sais que d’autres pays ont décidé de prendre en étau le virus en confinant et vaccinant en masse. Nous, on ne confine pas et on ne vaccine pas encore en masse. La question est : notre réponse est-elle assez forte pour faire face à la réalité de l’accélération du virus ? », interroge le président du groupe socialiste, en évoquant la souche anglaise particulièrement contagieuse.
Pour faire face à cette mutation du virus, le gouvernement a cependant annoncé un durcissement des contrôles aux frontières, avec l’obligation, pour les entrants sur le territoire national, de présenter un test négatif. « C’est une satisfaction », reconnaît Hervé Marseille. « Car c’est une préoccupation très ancienne que nous avions formulée, et un renforcement du contrôle ne peut que nous satisfaire ». Autre annonce des ministres : le maintien des écoles ouvertes, malgré le durcissement des mesures, avec un renforcement du dispositif sur plusieurs points. « Le protocole sanitaire sera renforcé dans les cantines, les activités physiques en intérieur suspendues, et les capacités de dépistage augmentées avec un objectif de 300 000 tests par semaine », a détaillé Jean Castex.
La vaccination, « clé de voûte », de la sortie de crise
Une stratégie qui rejoint celle préconisée par Bruno Retailleau. Le sénateur de Vendée recommandait, ce mercredi, une stratégie plus efficace du « dépister-tracer-isoler », qu’il jugeait plus utile qu’un durcissement des mesures. « Il vaut mieux isoler les positifs plutôt que toute la population par des confinements nocturnes ou toute la journée », assurait-il au micro de Public Sénat. Car, comme depuis le début de la crise, les sénateurs fustigent le manque de visibilité donné par le gouvernement sur la suite des événements. « Tout le monde peut comprendre que la situation est complexe », admet le président du groupe EELV au Sénat, Guillaume Gontard. « Mais ce qui est rageant c’est ce discours infantilisant avec Jean Castex qui félicite les Français de s’être bien tenu pendant les fêtes, ou la justification du couvre-feu pour interdire « l’apéro ». On attend d’un gouvernement de prendre les Français pour ce qu’ils sont : des adultes, et d’avoir une totale transparence sur la situation afin de donner de la visibilité. »
Et s’il y a un sujet sur lequel les sénateurs attendent une transparence gouvernementale, c’est bien celui de la vaccination. « La clé de voûte de la sortie de crise, c’est la vaccination », assure Patrick Kanner. « C’est le seul moteur de cette course contre la montre face à l’accélération du virus, et nous avons pris du retard. Encore une fois, c’est un problème d’anticipation, à force d’avoir des trains de retard on risque d’avoir une guerre de retard », alerte le sénateur. Et François Patriat d’ajouter : « Le prochain enjeu c’est la campagne de vaccination. Il faut que le gouvernement soit transparent et communiquant sur ces sujets-là pour désamorcer toute forme de polémique. »