Martine Aubry, cette figure socialiste qui veut rester maire de Lille

Martine Aubry, cette figure socialiste qui veut rester maire de Lille

Autoritaire et cassante pour les uns, courageuse et femme d’État pour les autres... Martine Aubry, candidate à un quatrième mandat à Lille, est...
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Par Frédéric DUMOULIN

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Autoritaire et cassante pour les uns, courageuse et femme d’État pour les autres... Martine Aubry, candidate à un quatrième mandat à Lille, est une figure de la gauche dont le nom reste attaché à la réforme des 35 heures.

Aujourd'hui âgée de 69 ans, celle qui a repris le flambeau de Pierre Mauroy en 2001 avait pourtant dit qu'elle ne se représenterait plus.

C'était avant l'émergence d'Emmanuel Macron. L'homme, son "libéralisme", la hérissaient déjà à Bercy: "Macron, comment vous dire? Ras-le-bol!" lâche-t-elle en 2015. Aujourd'hui, l'ex-patronne du PS justifie son ultime combat politique par la nécessité d'"aider la gauche" et de faire "rempart" au chef de l'Etat.

Une façon habile d'occulter qu'après 18 ans à la tête de la capitale des Flandres, Martine Aubry n'a pas su -ni voulu?- faire émerger de dauphin. "Si elle est candidate, c'est par devoir", décrypte un maire de la métropole. "C'est la seule qui peut sauver les meubles à Lille", bastion socialiste depuis un siècle.

Jacques Delors et sa fille Martine Aubry à Lille, le 31 mai 1995
Jacques Delors et sa fille Martine Aubry à Lille, le 31 mai 1995
AFP/Archives

Ses adversaires ne sont pas tendres: ils la disent "autoritaire", "cassante", "sectaire", ne sachant "pas déléguer"... Son amie la communiste Michelle Demessine reconnaît que "le consensus n'est pas un mot qui va avec Martine Aubry".

"Je dis les choses directement", évacue l'intéressée en concédant: "il faut savoir trancher". Elle se voit plutôt "dure avec les puissants et douce avec les faibles", trait hérité, dit-elle, de sa mère basque.

A gauche aussi, elle s'est fait de solides inimitiés. Parachutée à Lille en 1995, imposée par Mauroy aux barons socialistes, elle n'a pas su tisser un réseau d'élus. Quand elle s'empare du PS en 2008 après un duel au couteau avec Ségolène Royal, elle ne parvient pas à créer de courant durable.

Ce qui ne l'empêche pas de conclure des pactes avec ses ennemis d'hier, comme récemment avec Patrick Kanner. Un rabibochage interne au PS indispensable pour espérer la victoire.

- "A la sulfateuse" -

Martine Aubry, lorsqu'elle était directeur général adjoint de Péchiney, à Paris le 26 mars 1991
Martine Aubry, lorsqu'elle était directeur général adjoint de Péchiney, à Paris le 26 mars 1991
AFP/Archives

Malgré les critiques sur sa gouvernance, beaucoup lui reconnaissent du "courage", voient en elle une "bonne vivante", "capable de vraies attentions" et louent ses qualités de "femme d'Etat", qui a "transformé profondément Lille", en matière d'urbanisme et de culture.

"Et jamais on ne pourra prendre Martine Aubry en défaut d'intégrité", salue Christian Decocq, chef de l'opposition de droite de 2001 à 2008.

Née le 8 août 1950 à Paris, la fille de Jacques Delors est remariée avec l'ex-bâtonnier Jean-Louis Brochen. Une première fois ministre (1991-1993), elle devient l'emblématique numéro deux (1997-2000) du gouvernement de gauche plurielle dirigé par Lionel Jospin.

Les 35 heures, qu'elle porte de bout en bout malgré ses réticences initiales, et la création de la CMU et des emplois-jeunes lui confèrent une aura au sein de toute la gauche. Elle s'inscrit pourtant pleinement dans la social-démocratie, sans vraie divergence idéologique avec François Hollande ou Dominique Strauss-Kahn.

L'énarque connaît bien le monde de l'entreprise -elle a fait un passage chez Péchiney- et les grands patrons. Pragmatique, elle bâtit dès 2008 une majorité municipale large, jusqu'aux centristes, loin de l'orthodoxie socialiste dont elle aime se faire la gardienne.

Martine Aubry, ministre du travail, en compagnie de  François Mitterrand, le 19 janvier 1993 à Paris
Martine Aubry, ministre du travail, en compagnie de François Mitterrand, le 19 janvier 1993 à Paris
AFP/Archives

En 2011, le forfait de DSK lui entrouvre les portes de l'Elysée. Elle se lance dans la bataille présidentielle, contrairement à son père qui avait renoncé, mais perd la primaire face à François Hollande.

A l'aube de sa dernière campagne, elle apparaît isolée dans son beffroi. Elle a perdu son fidèle bras droit Pierre de Saintignon, emporté en mars par la maladie. Elle doit faire face à l'appétit grandissant des Verts, qui lui reprochent d'avoir raté le virage de la transition écologique même si, dans la majorité depuis 2001, ils sont comptables du bilan.

"Le bateau est en train de s'échouer", prédit Christophe Itier, ex-PS devenu Marcheur. "Il y a toujours le risque du combat de trop mais elle a de la ressource", nuance Thierry Pauchet, candidat divers droite: "Martine n'est jamais meilleure que dans l'adversité. Et que Violette Spillebout ose la défier lui a redonné la gnaque".

En privé, la maire de Lille, connue pour son franc-parler, n'a-t-elle pas lâché lors de l'investiture LREM de son ex-directrice de cabinet: "cette campagne, ce sera à la sulfateuse"?

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