Malaise à l’hôpital : « C’est une tragédie » estime le chef du service de radiologie de l’hôpital Georges Pompidou

Malaise à l’hôpital : « C’est une tragédie » estime le chef du service de radiologie de l’hôpital Georges Pompidou

Invité de l’émission « On va plus loin », Philippe Halimi, chef du service de radiologie de l’hôpital européen Georges Pompidou, est venu parler de son combat contre les cas de harcèlement, subi par le personnel hospitalier.
Public Sénat

Temps de lecture :

5 min

Publié le

Mis à jour le

L’hôpital public va mal. Pris dans une logique financière, il broie au passage un personnel hospitalier, souvent à bout et parfois harcelé par les directeurs des hôpitaux eux-mêmes. Et ce sont les patients qui en font les frais, au passage.

C’est la thèse du livre de Philippe Halimi, chef du service de radiologie de l’hôpital européen Georges Pompidou et président fondateur  de l’association nationale Jean-Louis Mégnien, qu’il a coécrit avec Christian Marescaux, « Hôpitaux en détresse, patients en danger » (chez Flammarion).

« Hier (…), je reçois le dossier d’un collègue qui est professeur des universités dans un centre hospitalier régional (…) [à] Saint-Étienne » explique le praticien, évoquant un cas concret.

« Il est en conflit avec son chef de service. Nous avons des éléments (…)  qui montrent de façon tangible, qu’il est harcelé par son chef de service. Résultat des courses (…) la direction du centre hospitalier [décide] (…) de supprimer le service de soin continu de ce collègue, qui est harcelé. Donc c’est un exemple direct de conflits qui peuvent surgir, qui sont vieux comme le monde entre médecins et qui (…) qui sont gérés d’une certaine façon par l’administration, (…) [donnant] en permanence des gages à ceux qui sont en situation de supériorité hiérarchique. Ce collègue alerte les autorités, alerte le maire, alerte l’agence régionale de santé, envoie un dossier complet au ministère. Et dans le même centre hospitalier, on apprend que, dans une autre spécialité qui est la psychiatrie, il y a eu une alerte vis-à-vis du suivi des patients psychiatriques qui sont suivis au CHU dans des conditions lamentables et qui sont attachés sur leur lit » raconte-t-il.

« Il n’y a plus de contre-pouvoir au sein de l’hôpital »

Comment en est-on arrivé là ?  Pour Philippe Halimi, « cela a été une lente dégradation », dont le point de départ se situe en 2003, au moment de la tarification à l’activité (la T2A), qui a poussé les hôpitaux à multiplier les actes, en privilégiant les plus rentables. « On voit bien que l’on est dans une logique où il faut faire des actes. On n’est pas forcément très enclin à regarder si ces actes sont justifiés, s’ils ne peuvent pas être dangereux. On est là pour faire du chiffre. C’est la priorité des directions hospitalières actuellement et c’est d’ailleurs comme ça que l’avancement des directeurs d’hôpitaux se fait » dénonce-t-il.

Il ajoute : «L’élément déterminant qui explique en grande partie selon nous la situation à l’hôpital public actuellement, c’est la loi de Roselyne Bachelot, loi dite « hôpital, patients, santé et territoires » qui a été promulguée en 2009 et qui donne des pouvoirs exorbitants aux directeurs d’établissements. Et qui consacre en fait que le PDG de l’entreprise qui s’appelle hôpital public, est le directeur d’hôpital. À l’époque beaucoup de mes collègues ont dénoncé cette loi, qui est très déséquilibrée puisqu’il n’y a plus de contre-pouvoir au sein de l’hôpital. »

Philippe Halimi estime que son livre est un « signal d’alarme » lancé, avant qu’il ne soit trop tard : « C’est une tragédie parce que si on continue comme ça (…) l’hôpital va continuer à se dégrader et cet outil (…) ne sera plus que moribond. »

 

Le chef du service de radiologie de l’hôpital européen Georges Pompidou, assure que la ministre de la santé, Agnès Buzyn, « est très sensible aux phénomènes de harcèlement » d’autant plus qu’elle en aurait été victime elle-même : «  La ministre de la santé Agnès Buzyn à elle –même dénoncé à propos du CHU de Grenoble, la maltraitance institutionnelle, qui y régnait. Elle-même, a déclaré à plusieurs reprises, qu’elle avait été victime de harcèlement et de maltraitance lorsqu’elle était professeure des universités dans un grand hôpital parisien. Elle (…) nous a dit à plusieurs reprises (…) qu’elle avait été obligée de se refaire une nouvelle carrière en dehors de l’hôpital et qu’elle [avait] été (…) à deux doigts de mettre fin à ses jours. »   

Le mois prochain Emmanuel Macron détaillera sa réforme sur l’hôpital. Mais Philippe Halimi jugera sur les résultats, car, à ses yeux,  la situation doit absolument changer : « Il faut qu’il y ait, bien sûr, un minimum de moyens à l’hôpital. À force d’avoir des coups de rabot budgétaires successifs (…) on est à l’os. Mais ce n’est pas uniquement cela. C’est le type de management qui est violent, autoritaire, agressif, qui ne respecte pas les personnels de soins, qui ne respecte pas les patients (…) L’outil se détériore, l’atmosphère générale à l’hôpital public est une atmosphère extrêmement difficile, et ça se ressent au niveau de la prise en charge des patients. »   

 

Vous pouvez voir et revoir l’entretien avec Philippe Halimi, en intégralité :

OVPL : entretien en intégralité avec le Pr Philippe Halimi, venu parler de harcèlement à l'hôpital
08:15

 

 

Dans la même thématique

Paris: French Government Weekly Cabinet Meeting
5min

Politique

Pour Bruno Retailleau, les conditions sont réunies pour rester au gouvernement

Alors que François Bayrou souhaite pouvoir avoir le ministre de l’Intérieur sortant dans son équipe, Bruno Retailleau a obtenu les garanties qu’il attendait, selon l’entourage du ministre. Il est prêt à lâcher l’idée d’un grand texte immigration, qui susciterait une levée de boucliers, pour « saucissonner » les sujets via plusieurs propositions de loi. Globalement, les LR sont rassurés et devraient rester au gouvernement.

Le

Malaise à l’hôpital : « C’est une tragédie » estime le chef du service de radiologie de l’hôpital Georges Pompidou
4min

Politique

Retraites : « Si nous étions dans un pays véritablement démocratique, cette réforme serait déjà abrogée », dénonce Ian Brossat

C’est le signe d’ouverture vers la gauche qu’on retient de la réunion, ce jeudi 19 décembre, entre les différents représentants des partis politiques (hors Rassemblement national et La France insoumise) et François Bayrou. Le nouveau Premier ministre propose de remettre en débat la réforme des retraites, pour aboutir à un nouveau compromis avec les partenaires sociaux d’ici septembre. Sans nouvel accord, c’est la réforme adoptée en 2023 qui continuerait à s’appliquer. « Lorsque François Bayrou met tous les représentants de partis et de groupes autour de la table, je pense qu’il envoie un signal d’ouverture qui va le légitimer. Il est conscient de la situation politique inédite et il tend des mains », salue la députée Renaissance Eléonore Caroit, sur le plateau de Parlement Hebdo, au lendemain de la rencontre. « Au lieu d’avoir cette posture de contestation permanente, travaillons ensemble ! » « La première des choses, c’est de suspendre l’application de cette réforme, pour permettre aux 50 000 salariés qui devaient partir en retraite et qui en ont été empêchés cette année de pouvoir le faire », rétorque le sénateur communiste Ian Brossat. Une position partagée par l’ensemble des partis de gauche, à la sortie de la rencontre à Matignon la veille. Tous attendent davantage de compromis de la part du Premier ministre, avant de s’engager à ne pas le censurer. « Pour l’instant, il n’y a absolument rien qui garantisse à François Bayrou d’échapper à une motion de censure, parce que tout ce qu’il dit va dans le sens d’une perpétuation des politiques macronistes menées depuis 7 ans », fustige le sénateur communiste. Une position que dénonce vivement la députée Renaissance : « S’il faut revenir sur cette réforme, s’il y a des choses à améliorer, je suis tout à fait prête à ce qu’on en discute. Mais je pense qu’il faut qu’on arrête de polariser le débat. Au lieu d’avoir cette posture, cette attitude de renfermement et de contestation permanente, travaillons ensemble ! » Ian Brossat dénonce un « déni de démocratie » Ce n’est pas la première fois que le débat des retraites revient sur la table ces derniers mois. À la fin du mois de novembre, La France insoumise avait profité de sa niche parlementaire à l’Assemblée pour introduire une proposition de loi visant à abroger la réforme. Après des débats houleux, le texte n’avait pas pu être voté en raison du trop grand nombre d’amendements déposés par les groupes de la droite et du centre. « Lorsqu’ils ont eu la possibilité de voter aux dernières élections, les Français ont massivement soutenu des partis politiques qui s’engageaient à abroger la réforme. Quand ce sujet a, à nouveau, été débattu à l’Assemblée, les députés macronistes ont pratiqué l’obstruction pour éviter le vote d’une loi d’abrogation », dénonce Ian Brossat. « Si nous étions dans un pays véritablement démocratique, cette réforme serait déjà abrogée », ajoute-t-il, dénonçant un « déni de démocratie ». Une expression qui ne passe pas pour Eléonore Caroit. « C’est une réforme dont l’examen a pris trois semaines, vous pensez qu’elle aurait pu être abrogée dans une niche parlementaire ? C’est fantaisiste », fustige la députée. De son côté, François Bayrou a répété sur le plateau de France 2 après la rencontre à Matignon, qu’il était ouvert à une autre solution que le report de l’âge de départ de 62 à 64 ans pour financer le système des retraites. Le nouveau Premier ministre a notamment rappelé qu’il avait été « un militant de la retraite à points ».

Le

Malaise à l’hôpital : « C’est une tragédie » estime le chef du service de radiologie de l’hôpital Georges Pompidou
4min

Politique

« Consternés », « dépités », « enfumage » : après sa rencontre avec François Bayrou, la gauche menace plus que jamais le Premier ministre de censure

Les chefs de partis et de groupes parlementaires étaient reçus à Matignon par François Bayrou, qui promet de former un gouvernement « avant Noël ». Une rencontre dont les socialistes, écologistes et communistes ressortent sans avoir « trouvé de raison de ne pas censurer » le nouveau Premier ministre, rapporte Olivier Faure.

Le