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Refus d’obtempérer, rodéos : le Sénat adopte le projet de loi sécurité en renforçant son volet répressif

Renforcement des sanctions pour les refus d’obtempérer, nouveau métier d’assistant d’enquête, généralisation des amendes forfaitaires délictuelles… le Sénat a largement adopté, par 307 voix contre 27, le projet de loi du projet de loi d’orientation et de programmation du ministère de l’Intérieur (Lopmi). Un texte qui prévoit sur le quinquennat une hausse de 15 milliards d’euros de crédits et la création de 8.500 postes de policiers et gendarmes.
Simon Barbarit

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Le rapporteur LR du projet de loi, Marc-Philippe Daubresse l’avait dit en amont. Il « ne boude pas son plaisir » de voir enfin arriver un projet de loi d’orientation et de programmation du ministère de l’Intérieur (Lopmi). Le texte a été examiné sans encombre et a été très largement adopté mardi après-midi, 307 voix contre 27. Seul le groupe CRCE à majorité communiste et le groupe écologiste ont voté contre.Promesse de campagne d’Emmanuel Macron, le texte, composé de 15 articles, prévoit sur cinq ans un effort financier de 15 milliards d’euros et la création de 8.500 postes de policiers et gendarmes. Des crédits pour faire face aux risques futurs, le risque « terroriste », « les attaques aux personnes » ou encore le « risque cyber ». Près de 8 milliards de crédits y sont alloués pour répondre à la cyberdélinquance et la cybercriminalité, telles que les escroqueries, le trafic de stupéfiants ou encore les atteintes aux mineurs.

Cyberattaques : le Sénat adopte le dispositif permettant d’assurer les rançons

A ce titre, l’article 4 du projet de loi conditionne l’assurabilité des cyber-rançons (ransomware), au dépôt de plainte dans les 48 heures. Suite à l’adoption de l’amendement, du sénateur socialiste, Rémi Cardon, l’assurabilité de l’assurance est même conditionnée au dépôt d’une préplainte dans les 24h suivant l’attaque et avant tout paiement afin de « réduire le nombre de rançons versées ». « L’idée est d’aller plus vite, car lors d’une attaque les heures sont comptées », a-t-il souligné.Le Sénat a aussi adopté un amendement du gouvernement qui fixe dans la loi un investissement de 2 milliards d’euros pour créer le nouveau réseau radio du futur (RRF) qui prévoit de remplacer l’intégralité des réseaux de radio de la police, de la gendarmerie et des services de la sécurité civile. Le géant de l’informatique Capgemini et l’avionneur Airbus qui ont décroché un contrat de 540 millions d’euros auprès du ministère de l’Intérieur.

La réforme de la PJ s’invite dans les débats

Dès la discussion générale, les débats ont été parasités par la très contestée réforme de la police judiciaire. La réforme ne figure pas dans le projet de loi car elle à valeur réglementaire, mais est l’objet dans un rapport annexé au texte.Face aux critiques émanant principalement de la gauche, Gérald Darmanin s’est arc-bouté sur l’opportunité de la réforme. « On ne peut pas rester dans un monde où on ne se réfère qu’à Clemenceau ». L’ancien ministre de l’Intérieur qui fut le créateur des Brigades du tigre en 1907, l’ancêtre de la police judiciaire. « Depuis Clemenceau, on a inventé Internet […] Le taux d’élucidation a baissé et on ne peut pas se satisfaire de cette situation […] Il faut réformer la police nationale. Pas contre tout le monde, pas de manière autoritaire, ça fait 30 ans qu’on en parle ».Beau joueur, il s’est même dit prêt à amender le projet de loi Lopmi pour rassurer la gauche de l’hémicycle qui craint pour l’indépendance de la justice, mais sans aller jusqu’à revenir sur « la généralisation des directions départementales de la police nationale », au grand dam du sénateur socialiste, Jean-Pierre Sueur.Marc-Philippe Daubresse a, lui, indiqué vouloir attendre les préconisations de deux missions d’information parlementaire sur le projet de réforme de la PJ, avant d’amender le texte lors de la commission mixte paritaire.Alors que le texte renforce la peine pour outrage sexiste, la droite sénatoriale a profité de ce véhicule législatif pour durcir les sanctions de trois autres délits en forte augmentation ces derniers mois : le refus d’obtempérer en augmentation, les violences faites aux élus et les rodéos urbains.

« Améliorer la réponse pénale sur trois sujets essentiels »

Le rapporteur a rappelé que les auditions menées dans le cadre de l’examen du texte avaient conduit la commission à « améliorer la réponse pénale sur trois sujets essentiels », notamment les refus d’obtempérer en augmentation de 17 %. Actuellement puni de 2 ans de prison et 15 000 euros d’amende, le refus d’obtempérer serait puni de 3 ans de prison et 30 000 euros d’amende avec une réduction de peine limitée. Gérald Darmanin a indiqué qu’il y avait un refus d’obtempérer « toutes les 20 minutes » en zone police ou gendarmerie.Un homme est décédé à Paris la semaine dernière sous les tirs des policiers après le refus d’obtempérer, portant à 12 le nombre de morts depuis le début de l’année.» Lire notre article. Loi sécurité : le Sénat durcit les peines pour les refus d’obtempérer, les rodéos urbains et les violences faites aux élusEn ce qui concerne les violences faites aux élus, la version du Sénat les réprime de la même manière que les violences commises sur les forces de l’ordre ou les pompiers. Cinq ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende. Sept ans d’emprisonnement et 100 000 euros d’amende, si elles ont entraîné une incapacité totale de travail pendant plus de huit jours.Le nouvel article sanctionne, enfin, plus spécifiquement les rodéos urbains « qui exposeraient autrui à un risque de mort ou à une infirmité permanente ». La peine passerait à cinq ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende, contre un an d’emprisonnement et 15 000 euros d’amende, hors circonstances aggravantes, actuellement.Le sénateur LR, Michel Savin est parvenu à faire adopter un amendement, malgré l’avis défavorable de la commission et un avis de sagesse du gouvernement, qui sanctionne spécifiquement les actes de violence gratuite. Il introduit dans le Code pénal une nouvelle circonstance aggravante visant spécifiquement les agressions qui relèvent d’une « réaction disproportionnée de l’auteur qui s’est senti offensé par la victime ».Ce nouvel article 7 bis qui rentre dans le champ judiciaire a été adopté à une large majorité. La gauche du Sénat a regretté que de ne pas voir la même largeur d’esprit s’appliquer pour ses amendements, comme celui porté par le groupe PS, visant à instaurer des juridictions spécialisées sur les violences sexuelles et sexistes. Avis défavorable de la commission et du gouvernement au motif que ce sujet concerne la justice.L’ancienne ministre des droits des femmes, Laurence Rossignol s’est aussi montrée plus que frustrée de voir son amendement visant à faciliter la délivrance des ordonnances de protection pour les victimes de violences conjugales, rejeté. Les socialistes sont néanmoins parvenus à faire adopter un amendement afin de faciliter l’accueil et l’accès aux démarches en ligne des victimes en situation de handicap.Les débats auront aussi cristallisé l’antagonisme entre, d’un côté, le groupe écologiste auteur d’une centaine d’amendements et de l’autre, le ministre de l’Intérieur et la majorité sénatoriale LR.Ces derniers ont accusé les écologistes de porter des amendements « contre la police ». Les échanges se sont envenimés autour d’un amendement demandant la publication par Beauvau des « statistiques relatives aux opérations de contrôle de la population, notamment par zone géographique et par classe d’âge ».

Généralisation de l’amende forfaitaire délictuelle

Le projet de loi Lopmi a également pour but de renforcer la filière investigation. Pour soulager les officiers de police judiciaire (OPJ), Il crée le nouveau métier d’assistant d’enquête, sorte de « greffier » de la police judiciaire. Pour faciliter le recrutement des OPJ, le texte supprime la condition des trois ans d’expérience en tant qu’agent pour passer le concours. Ce dispositif fait craindre aux groupes, communiste, écologiste, socialiste et certains élus LR, une perte de qualité des enquêtes et une fragilisation des procédures.Enfin le projet de loi généralise le recours aux amendes forfaitaires délictuelles (AFD) à tous les délits punis de moins d’un an de prison. Là encore, la gauche du Sénat a déposé, en vain, des amendements de suppression. Elle craint une remise en cause du principe de « l’opportunité des poursuites et de l’individualisation de la peine », comme l’a expliqué la présidente du groupe CRCE à majorité communiste, Éliane Assassi.A noter que la droite sénatoriale a sorti du champ des amendes forfaitaires, les délits d’outrage à agent, ou encore à la détention d’armes blanches.

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