Les comptes de campagne de Macron, Mélenchon, Le Pen et Hamon visés par une plainte d’Anticor

Les comptes de campagne de Macron, Mélenchon, Le Pen et Hamon visés par une plainte d’Anticor

L'association anticorruption Anticor a demandé mercredi au parquet de Paris d'ouvrir une enquête sur les comptes de campagne...
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Par Benjamin LEGENDRE et Nathalie ALONSO

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L'association anticorruption Anticor a demandé mercredi au parquet de Paris d'ouvrir une enquête sur les comptes de campagne présidentielle d'Emmanuel Macron, Benoît Hamon, Jean-Luc Mélenchon et Marine Le Pen, au cœur d'un vif débat politico-médiatique depuis plusieurs semaines.

L'association accuse notamment le leader de la France insoumise et la présidente de l'ex-FN d'avoir "tenté de détourner de l'argent public au moyen de remboursements par l’État de frais de campagne qui n'avaient d'autre but que de servir leur intérêt ou l'intérêt de leurs proches", selon la plainte consultée par l'AFP qui doit être déposée dans la journée.

Anticor reproche par ailleurs au président "Emmanuel Macron et de manière moins importante à Benoît Hamon d'avoir profité de ristournes, remises, rabais, venant minorer leurs dépenses de campagne", en violation du principe d'égalité entre les candidats. Des rabais qui pourraient être constitutifs d'"abus de biens sociaux" pour les prestataires qui les ont accordés, estime Anticor.

Enfin, l'association demande de vérifier la "responsabilité" des membres de la Commission nationale des comptes de campagne (CNCCFP). En cause: l'acceptation de frais qui n'auraient pas dû l'être, comme l'a affirmé un rapporteur démissionnaire, et la validation de remises qui constituent potentiellement, pour Anticor, un financement par des entreprises, ce qui est illégal.

"Les comptes ont déjà été vérifiés (...). Il n'y a pas de raison de penser qu'elle a (la CNCCFP - ndlr) mal fait son travail", a estimé sur France Inter la ministre de la Justice Nicole Belloubet, interrogée sur cette action judiciaire.

Cette plainte fait suite aux enquêtes de médias, dont Mediapart, Le Monde et Radio France, accusant notamment la campagne de l'actuel président d'avoir bénéficié de "prix cassés" et de "ristournes cachées".

"L'objectif est de réaliser une analyse systémique des pratiques des partis qui utilisent le financement politique parfois pour des motivations étrangères à la campagne mais aussi de pointer du doigt le mauvais fonctionnement de la CNCCFP. L'ensemble de ces dysfonctionnements affecte la démocratie", a déclaré à l'AFP Jérôme Karsenti, l'avocat d'Anticor.

"La justice doit dire clairement si les surfacturations ou les sous-facturations sont légales", a commenté le président de l'association, Jean-Christophe Picard.

Concernant la campagne victorieuse d'Emmanuel Macron, Anticor pointe notamment les locations de six lieux de meetings accordées avec des rabais de 36 à 75% environ, ainsi que de larges remises pour la location de matériel et une "sous-facturation" du siège de campagne dans le XVe arrondissement de Paris.

Dimanche, La République en marche a justifié ces prix, accusant la presse de "monter en épingle des pseudo-révélations". Selon elle, le théâtre Bobino de Paris avait déjà facturé à des associations une location à 3.000 euros au lieu des 13.000 euros.

- Le précédent Sarkozy -

Jean-Luc Mélenchon, dont la campagne est visée par une enquête du parquet après un signalement de la CNCCFP, a réclamé vendredi la "révision" des comptes des onze candidats, tous validés par cette autorité.

Concernant les comptes du leader de la France insoumise, dont 434.939 euros de dépenses sur 10,7 millions déclarés ont été rejetés par la commission, Anticor dénonce des "surfacturations" au bénéfice notamment de la société Mediascop présidée par Sophia Chikirou, sa directrice de communication d'alors.

Son bras droit, Alexis Corbière, est accusé d'"abus de confiance" pour avoir facturé des interventions médiatiques "relevant de l'engagement militant".

Marine Le Pen a vu pour sa part 873.576 euros de dépenses retoquées par la commission, constituées à 95% des emprunts contractés auprès du FN et du micro-parti de son père Jean-Marie. Pour Anticor, ces prêts cachaient une tentative de détournement de fonds publics et d'abus de confiance.

La plainte relève aussi que "parmi les 29 plus gros prestataires ce sont principalement des sociétés appartenant à des cadres du Front national ou à leur famille".

S'agissant de Benoît Hamon, Anticor dénonce 310.000 euros de remises suspectes pointées par une enquête du magazine L'Obs. "Je me félicite du travail que fait Anticor (...) c'est une vigie démocratique", a réagi sur France Info M. Hamon, en affirmant que la ristourne obtenue auprès de Match Event était habituelle pour cette société.

En 2012, la CNCCFP avait rejeté les comptes de Nicolas Sarkozy. Elle avait à l'époque décelé un dérapage de quelques centaines de milliers d'euros, bien loin du dépassement du plafond de 20 millions d'euros révélé par la suite par l'enquête judiciaire, qui a valu à l'ancien président un renvoi devant le tribunal.

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