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Le Parlement européen approuve l’accord de libre-échange UE-Canada
Par Guillaume Jacquot (Sujet vidéo : Pauline Even)
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Après trois heures de débat, parfois tendu, le Parlement européen a sans surprise adopté le traité Ceta (acronyme anglais d’AECG, accord économique et commercial global) ce mercredi par 408 voix pour, 254 contre, et 33 abstentions, porté par le soutien de la plupart des membres du Parti populaire européen (PPE) et des libéraux (ALDE), et une partie du groupe socialiste. Les écologistes et la gauche radicale ont voté contre.
La délégation socialiste française a unanimement voté contre le Ceta, alors qu'elle s'était montrée divisée ces derniers mois. Chez les eurodéputés français de droite, le média Contexte précis que six d'entre eux se sont abstenus.
L’équilibre des forces en séance plénière est similaire à celui observé le 24 janvier, lors du vote en commission du Commerce international : le texte avait reçu l’avis favorable de 25 eurodéputés, contre 15 (une abstention). Ce feu vert donné à Strasbourg est pourtant loin de signer la fin des débats sur le sujet.
Ce que prévoit le traité
Ce vaste accord économique et commercial prévoit notamment la suppression de 99% des droits de douane entre l’UE et le Canada, sur un grand nombre de biens et services. Le secteur audiovisuel, de même que les services publics ou les transports ne sont pas concernés par ces nouvelles règles. Certains produits comme la volaille, les œufs et les produits laitiers n’entrent pas dans le champ du Ceta.
Le Ceta organise une harmonisation des normes entre l’Union européenne et le Canada, avec des reconnaissances mutuelles de certifications et de tests de produits. Une manière d’accélérer et de faciliter l’entrée sur le marché d’un produit.
Concernant les marchés publics, le traité prévoit d’instaurer des accès réciproques de part et d’autre : cette ouverture est une avancée pour les Européens qui n’en bénéficiaient pas.
La Commission européenne espère que l’application du Ceta se traduira par une progression de 20 à 25% du commerce de l’Union européenne avec le Canada.
Pourquoi le traité inquiète ?
Le secteur agricole européen – notamment les filières d’élevage et les céréaliers – redoute l’extension des quotas d’importation et l’impact de la concurrence de la production intensive canadienne. La protection des appellations d’origine contrôlées est également jugée incomplète par les opposants au texte. Le député français EELV José Bosé a notamment alerté sur le manque de protection qui pourrait porter préjudice aux fromages français.
Sur le terrain sanitaire et des normes, des ONG (Foodwatch en tête) reprochent au traité de ne pas prendre en considération le principe de précaution, un principe selon lequel les États peuvent prendre des restrictions sur des produits afin d’anticiper des éventuels risques sur le plan de la santé ou de l’environnement. Le risque juridique serait double : les futures négociations sur les normes pourraient être défavorables à ce principe (d’autant plus que le Canada ne le reconnaît pas), et le traité pourrait se heurter à la Constitution française, qui garantit ce principe de précaution, à travers la Charte de l’environnement présente dans le préambule. Les Européens assurent que le Ceta ne remettra pas en cause les règles relatives à l’alimentation, et notamment les restrictions qui pèsent sur les OGM ou encore le bœuf aux hormones.
L’incertitude sur la composition des tribunaux d’arbitrage, censés régler les litiges entre une multinationale et un État au sujet d’une politique publique, alimente également les craintes sur le Ceta. L’indépendance et l’impartialité de ces cours est régulièrement invoquée dans le débat.
Quelles suites après le vote du Parlement européen ?
Fruit de cinq années de négociations (lancées au sommet de Prague le 6 mai 2009 et achevées à Ottawa en septembre 2014), le Ceta doit à présent entamer un long chemin sur la voie de la ratification, qui pourrait prendre plusieurs années. Côté canadien, le traité a été adopté en troisième lecture à la Chambre des communes ce mardi, et doit à présent être soumis au vote du Sénat canadien.
Signé par le Premier ministre canadien et le président du Conseil européen le 30 octobre, et maintenant approuvé par le Parlement européen, le texte, en tant qu’accord mixte, doit à présent être ratifié par les parlements nationaux. Une demande portée par la France et l’Allemagne, qui ont obtenu gain de cause en juillet dernier. La signature est requise jusqu’à l’échelon régional dans le cas d’un État fédéral comme la Belgique. On se souvient qu’en octobre, le parlement wallon avait opposé son veto à la signature du texte, avant de finalement l’autoriser, après avoir obtenu plusieurs garanties sur les chapitres les plus controversés.
La signature du Parlement européen obtenue, les dispositions du Ceta peuvent être appliquées « provisoirement » dès avril par les États membres de l'UE, si ces dernières relèvent de la compétence de l’Union européenne, et celles-ci sont nombreuses. Une partie des accords commerciaux pourra donc être appliquée avant qu'un parlement national se prononce.
Sur l’hypothèse de l’échec d’une seule des 28 ratifications nécessaires, le secrétaire d’État français au Commerce extérieur rappelait en novembre les conclusions du Conseil de l’Union européenne, réuni le 18 octobre 2016 :
« Ce qui a été décidé est que si un Parlement votait contre, l’ensemble du traité tomberait, y compris l’application provisoire. »