A la veille du 1er tour des législatives, le politologue Joël Gombin, spécialiste du Front national, se penche sur l’état d’un parti à la fois florissant et en crise :
« Le Front national traverse une période cruciale pour lui. Il sort, depuis 5, 6 ans, d’une période de forte croissance, en termes de militants, de ressources financières (…) Et surtout cette période a ouvert, probablement pour la première fois dans l’histoire du Front national et à ce degré-là, la perspective d’un accès (…) au pouvoir ». Mais dans le même temps, poursuit Joël Gombin : « Le 2ème tour de la présidentielle et probablement les législatives qui s’annoncent, vont doucher ces espoirs ».
Et ces législatives représentent un enjeu important pour le parti : « Si le FN a 15 députés ce sera de très loin, le meilleur score qu’il aura réalisé au scrutin majoritaire. Néanmoins si on est sur cet étiage-là qui est très faible, il y aura beaucoup de déception en interne. Beaucoup de cadres qui espéraient obtenir un poste de député qui ne l’auraient pas, beaucoup de collaborateurs qui espéraient devenir assistants parlementaires qui ne le deviendraient pas. C’est aussi ça le moteur d’un parti politique ».
L’objectif principal du Front national est de parvenir au pouvoir et de vivre de la politique. Pour cela, explique le politologue, Marine Le Pen a décidé en 2011 « d’opérer une recomposition complète des clivages » et de « faire exploser le clivage gauche/ droite au profit de [celui] entre « mondialistes et patriotes » ». Et si cela a fonctionné pour passer le premier tour de la présidentielle, cela n’a pas suffit pour obtenir la victoire : « Ce qui explique pourquoi en interne au Front national aujourd’hui, un certain nombre de militants et de dirigeants poussent une autre stratégie, qui est celle de devenir hégémonique à droite » ajoute-t-il.
Pour ne pas perdre son leadership dans le parti, la présidente du FN, qui se présente à Hénin-Beaumont, a tout intérêt à gagner : « Marine Le Pen n’a jamais été élue au suffrage universel directe, sur son nom. Or dans le système politique français, ça reste une ressource de légitimité politique majeure. Si elle n’était pas élue et que d’autres au Front national l’étaient, ça poserait la question de sa légitimité politique personnelle. Surtout après l’épisode de la présidentielle, notamment le débat au second tour ».