La République en marche élabore sa stratégie de conquête des mairies en vue des élections de 2020, consciente que son manque d'ancrage territorial la forcera à nouer des alliances ici ou là, y compris avec les édiles sortants.
Après le raz-de-marée euphorique de 2017 qui lui a permis d'emporter d'un coup Elysée et Assemblée nationale, le parti d'Emmanuel Macron sait que trois ans d'exercice du pouvoir, conjugués à ses faiblesses structurelles, le contraindront à bien plus de réalisme.
L'enjeu est des taille: s'assurer un réseau d'élus locaux étoffé qui permettrait au chef de l'Etat de briller aux sénatoriales de 2020 - après l'échec de l'automne 2017 - puis qui soutiendront Emmanuel Macron en 2022, pour une éventuelle réélection.
Dans le même temps, "il y a quasiment un dégagisme au niveau municipal", assure un cadre du parti, qui s'interroge: "Il y a une demande de renouvellement profond mais est-ce qu'on sera en mesure de la capter ?"
Le parti réfléchit donc à sa méthode agile pour ratisser le plus large et parachever une recomposition politique engagée avec l'élection d'Emmanuel Macron. Sachant que cela bouillonne à tous les étages, entre une base avide d'en découdre sur le terrain, des ambitions émergentes à assouvir et des maires sortants impatients de voir comment l'inconnue LREM viendra troubler le jeu.
Au sommet - le patron Christophe Castaner et son bureau exécutif - on travaille au volet national de la future campagne, à savoir "comment on conceptualise le municipalisme En Marche, en termes de fiscalité, de convergence des politiques publiques etc", décrit un cadre.
"Il y aura une circulaire diffusée très prochainement auprès des Marcheurs qui recoupera le récit, les objectifs qualitatifs et réaffirmera qu'il n'y a pas de candidats avant l'heure", ajoute cette même source, affichant le désir de cadrer les débats.
Car en parallèle, les comités locaux ont commencé à plancher sur des projets spécifiques pour leurs villes. Et malgré les réticences d'un QG parisien qui a du mal à réguler toutes les ardeurs, des groupes En Marche! se sont créés dans certains conseils municipaux.
- "Faire avec l'existant" -
Cependant, les trous dans la raquette sont nombreux: avec seulement deux ans d'existence, LREM "manque de cadres" dans certains territoires "et il faut qu'on ouvre toujours plus. On a besoin de réinjecter en permanence des gens qui sont proches de notre philosophie", témoigne une source LREM.
La semaine passée, la direction du parti a proposé à ses comités d'organiser un atelier "ancrage local" pour "renforcer le maillage territorial".
La feuille de route est d'établir un diagnostic cet été, puis un temps de prise de contact d'ici novembre pour une intégration dans le paysage politique et associatif avant la fin de l'année.
Mais parfois, cela ne suffira pas et "il faudra faire avec l'existant", prévient un cadre. "Dans tous les territoires on dit: attention, il y a des maires avec qui on repartira", prévient cette même source, en notant que "certains maires sont aussi conscients qu'on ne peut pas gagner mais qu'on peut les faire perdre".
Cette main tendue, qui nécessitera évidemment d'accorder une place importante aux Marcheurs sur la liste, s'effectuera à travers l'adhésion à une "charte des valeurs" prônant notamment "probité, pluralisme, parité". A défaut d'un soutien net aux élections européennes, il sera demandé a minima de ne pas prendre position contre la liste LREM.
Premiers visés, les maires Les Républicains tendance modérée et rebutés par la ligne suivie par Laurent Wauquiez, à l'image de Jean-Luc Moudenc (Toulouse), Christian Estrosi (Nice) ou Olivier Carré (Orléans), regroupés au sein du mouvement "La France audacieuse".
Ceux-là ont été d'ailleurs reçus par Emmanuel Macron lors d'un dîner à l'Elysée en février, et sont chouchoutés par le Premier ministre issu de leurs rangs, Edouard Philippe, quitte à agacer certains Marcheurs historiques qui soupçonnent Matignon de vouloir "faire les investitures".
Avertissement reçu chez LR: alors que M. Wauquiez a reçu mardi 100 maires pour préparer le scrutin, un cadre s'inquiète du "danger mortel" de la tactique LREM.