Deuxième volet de "transformation" du modèle social, le projet de loi formation-assurance chômage arrive lundi à l'Assemblée, où la majorité va vanter une illustration du "protéger" macroniste après le "libérer" des ordonnances, face à des opposants pas convaincus.
Porté par la ministre du Travail, Muriel Pénicaud, le projet de loi "pour la liberté de choisir son avenir professionnel" réforme à la fois l’apprentissage, la formation et l'assurance chômage. L'exécutif promet des droits "plus importants et accessibles" pour les salariés, demandeurs d'emploi et certains jeunes.
Dans les mesures phares: une extension de l’allocation-chômage, sous conditions, à certains démissionnaires, une mue du compte personnel de formation créé sous le quinquennat Hollande, de nouvelles règles pour l'apprentissage.
Devant 66 articles et des centaines d'amendements, l'Assemblée a dégainé un "temps législatif programmé" pour limiter globalement la durée de parole.
Sujet sensible, l'assurance chômage ne va pas manquer d'agiter l'hémicycle.
Là où Aurélien Taché, meneur LREM de ce volet, vante une protection élargie "à tous les actifs", le résultat est jugé "très modeste" à gauche.
Emblématique, l'élargissement de la couverture à certains démissionnaires ayant un projet professionnel, avec un droit mobilisable tous les cinq ans, entend traduire une promesse de campagne, mais certains élus épinglent un "rétropédalage".
Muriel Pénicaud évoque entre 20.000 et 30.000 bénéficiaires, sur environ 1 million de démissionnaires par an. "Cela ne fera pas des bataillons", mais probablement plus que les évaluations, juge un pilier de la majorité. "Politiquement la promesse est tenue", ajoute-t-il. Certains Marcheurs souhaiteraient ouvrir davantage ce "beau droit".
La couverture sociale des travailleurs des plateformes numériques et d’autres catégories d’indépendants doit, elle, être ajoutée dans l'hémicycle.
Face aux entreprises multipliant les contrats courts, le gouvernement laisse aux branches professionnelles le soin de négocier, mais brandit la menace d'un bonus-malus.
Autre sujet épineux: la mutation du financement et de la gouvernance du système, avec passage progressif de la cotisation sociale vers la CSG et cadrage budgétaire gouvernemental avant chaque négociation. Des élus de gauche, mais aussi LR, craignent une baisse des droits liée à une logique de réduction des dépenses de l'Etat.
- "Big bang" -
Pour la formation professionnelle, la ministre, ex-DRH de grands groupes, plaide que plus le système sera "performant, plus il créera les conditions donnant à chacun la liberté individuelle de saisir toutes les opportunités de la mondialisation".
La mesure clef touche au compte personnel de formation, né en 2014. Le CPF ne sera plus alimenté en heures mais en euros à partir de 2019, avec 500 euros par an (800 pour les moins qualifiés).
Rejetée par syndicats et patronat, sa monétisation est aussi décriée par la gauche, qui redoute dans certains cas "une réduction du nombre des droits des salariés".
Le CPF des travailleurs handicapés sera majoré, ont ajouté les députés en commission, une "avancée" selon la Fnath (accidentés de la vie).
Pour compléter dans certains cas le dispositif, la rapporteure de ce volet, Catherine Fabre (LREM), et le chef de file des Marcheurs sur ce texte, Sylvain Maillard, comptent plaider pour un crédit d’impôt formation.
Loin d'un "big bang de la formation", Boris Vallaud (PS) voit "beaucoup de bruit pour pas grand chose". Pour les communistes, comme Pierre Dharréville, le projet ne va "protéger personne", avec "un grand marché face auquel les salariés devront faire leur choix avec des moyens réduits".
Pour attirer plus d'entreprises et de jeunes vers l'apprentissage, le gouvernement repousse l'âge limite à 30 ans, assouplit le temps de travail pour les mineurs, facilite les ruptures de contrats, et en même temps ajoute une aide au permis de conduire et une hausse de la rémunération.
Plus controversée, la réforme de la gouvernance et du financement de l'apprentissage satisfait le Medef mais fâche les régions, dépossédées d'une part de leurs prérogatives.
Entre autres modifications, les députés ont maintenu en commission des exonérations de taxe d'apprentissage pour certains employeurs, contrairement à ce que prévoyait le projet gouvernemental.