Après le tollé suscité la veille par un premier vote favorisant l'huile de palme, l'Assemblée nationale a fait marche arrière vendredi soir en...
Par Adrien DE CALAN et Pierre ROCHICCIOLI
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Après le tollé suscité la veille par un premier vote favorisant l'huile de palme, l'Assemblée nationale a fait marche arrière vendredi soir en maintenant son exclusion de la liste des biocarburants, contre l'avis du gouvernement.
Les députés ont annulé à une écrasante majorité (58 à 2) lors d'une nouvelle délibération les effets du vote litigieux et sans le moindre débat de jeudi, qui était favorable au groupe Total.
Confronté à un tollé des écologistes et à l'embarras de sa majorité, le Premier ministre Edouard Philippe était monté en personne au créneau pour réclamer un second vote de l'Assemblée, "constatant l'absence d'un débat suffisant sur un sujet aussi important", même si le gouvernement était favorable à l'amendement.
L'Assemblée avait voté à toute vitesse jeudi cet amendement parlementaire prévoyant le report à 2026 de l'exclusion de l'huile de palme de la liste des biocarburants, qui bénéficient d'un avantage fiscal.
Action de Greenpeace à la bioraffinerie Total de La Mède, près de Marseille, le 29 octobre 2019
AFP/Archives
Son adoption a surpris, alors que l'Assemblée avait justement voté l'an dernier l'exclusion de ce régime fiscal favorable de l'huile de palme, accusée par les défenseurs de l'environnement de provoquer une déforestation massive et une menace sur la biodiversité des forêts tropicales mondiales. Total avait tenté un recours mais le Conseil constitutionnel avait débouté le groupe pétrolier.
Le revirement de jeudi a été immédiatement dénoncé par les associations écologistes comme le résultat d'un "lobbying éhonté" de Total, qui a démarré début juillet l'exploitation d'une raffinerie d'agrocarburants à La Mède, près de Marseille.
Le gouvernement, qui a fait de l'écologie une de ses grandes priorités, est resté vendredi sur sa position. Mais il a été déjugé par sa propre majorité. Il est "hors de question qu'on revienne sur ce qu'on a voté l'année dernière", a souligné la députée en marche Emilie Cariou.
"Cette niche fiscale est complice d'un écocide", a fustigé l'ancienne ministre de l'Environnement Delphine Batho.
D'autres députés ont dénoncé "un vote en catimini" jeudi. "On ne peut pas revenir par la fenêtre quand on a été bouté par le porte" l'année précédente, a souligné le rapporteur général Joël Giraud (LREM), déplorant un "chantage à l'emploi indécent" de la part de Total.
Greenpeace France, tout en se félicitant que les députés aient "réussi à défendre la nécessité absolue de protéger les forêts tropicales", a dénoncé le soutien du gouvernement à l'amendement controversé, "un non-sens" et "un aveu de l'influence de Total sur le plus haut niveau de l'Etat".
Selon l'ONG, il "prouve que les discours sur l'urgence climatique ne sont, aux yeux du gouvernement, qu'un exercice rhétorique destiné à redorer son image".
- "Plus royalistes que le roi" -
En face, un des co-signataires de l'amendement controversé, le député MoDem des Bouches-du-Rhône Mohamed Laqhila, a appelé vendredi à "ne pas mettre en péril notre industrie" face à la concurrence étrangère et "ne pas être plus royalistes que le roi".
La raffinerie d'agrocarburants à La Mède, qui emploie 250 personnes, a prévu de traiter 650.000 tonnes d'huiles et de graisses par an et de s'approvisionner en huile de palme "durable et certifiée" à hauteur de 300.000 tonnes au maximum, selon le groupe pétrolier.
Des militants de Greenpeace ont déployé des banderoles près de la bioraffinerie Total de La Mède, près de Marseille, le 29 octobre 2019
AFP
"Patrick Pouyanné, PDG de Total, a souligné que la puissance publique avait été incohérente en soutenant la transformation de l'usine de La Mède en bioraffinerie et en réclamant des investissements de 200 ou 300 millions d'euros, il y a quelques années, pour ensuite renoncer" à un soutien, selon le président de la Commission des affaires économiques Roland Lescure (LREM). "Cela peut s'entendre", a-t-il ajouté, avant de finalement voter contre vendredi.
Fin octobre, le PDG de Total avait plaidé sa cause en demandant "juste à être au même niveau de compétition que nos concurrents européens qui, contrairement à nous, bénéficient d'un avantage fiscal jusqu'en 2030".
Côté écologistes, l'association France nature Environnement (FNE) a dénoncé "un chantage à l'emploi mené par Total autour de l'usine de La Mède, usine dont la légalité est débattue en justice suite à une plainte".
Et de dénoncer un "désastre environnemental" causé, selon elle, par la production extensive d'huile de palme: "Chaque jour, des milliers d'hectares sont brûlés pour faire pousser ces palmiers déforestant une grande partie de l'Asie du Sud-Est et de l'Afrique".
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C’est le signe d’ouverture vers la gauche qu’on retient de la réunion, ce jeudi 19 décembre, entre les différents représentants des partis politiques (hors Rassemblement national et La France insoumise) et François Bayrou. Le nouveau Premier ministre propose de remettre en débat la réforme des retraites, pour aboutir à un nouveau compromis avec les partenaires sociaux d’ici septembre. Sans nouvel accord, c’est la réforme adoptée en 2023 qui continuerait à s’appliquer. « Lorsque François Bayrou met tous les représentants de partis et de groupes autour de la table, je pense qu’il envoie un signal d’ouverture qui va le légitimer. Il est conscient de la situation politique inédite et il tend des mains », salue la députée Renaissance Eléonore Caroit, sur le plateau de Parlement Hebdo, au lendemain de la rencontre. « Au lieu d’avoir cette posture de contestation permanente, travaillons ensemble ! » « La première des choses, c’est de suspendre l’application de cette réforme, pour permettre aux 50 000 salariés qui devaient partir en retraite et qui en ont été empêchés cette année de pouvoir le faire », rétorque le sénateur communiste Ian Brossat. Une position partagée par l’ensemble des partis de gauche, à la sortie de la rencontre à Matignon la veille. Tous attendent davantage de compromis de la part du Premier ministre, avant de s’engager à ne pas le censurer. « Pour l’instant, il n’y a absolument rien qui garantisse à François Bayrou d’échapper à une motion de censure, parce que tout ce qu’il dit va dans le sens d’une perpétuation des politiques macronistes menées depuis 7 ans », fustige le sénateur communiste. Une position que dénonce vivement la députée Renaissance : « S’il faut revenir sur cette réforme, s’il y a des choses à améliorer, je suis tout à fait prête à ce qu’on en discute. Mais je pense qu’il faut qu’on arrête de polariser le débat. Au lieu d’avoir cette posture, cette attitude de renfermement et de contestation permanente, travaillons ensemble ! » Ian Brossat dénonce un « déni de démocratie » Ce n’est pas la première fois que le débat des retraites revient sur la table ces derniers mois. À la fin du mois de novembre, La France insoumise avait profité de sa niche parlementaire à l’Assemblée pour introduire une proposition de loi visant à abroger la réforme. Après des débats houleux, le texte n’avait pas pu être voté en raison du trop grand nombre d’amendements déposés par les groupes de la droite et du centre. « Lorsqu’ils ont eu la possibilité de voter aux dernières élections, les Français ont massivement soutenu des partis politiques qui s’engageaient à abroger la réforme. Quand ce sujet a, à nouveau, été débattu à l’Assemblée, les députés macronistes ont pratiqué l’obstruction pour éviter le vote d’une loi d’abrogation », dénonce Ian Brossat. « Si nous étions dans un pays véritablement démocratique, cette réforme serait déjà abrogée », ajoute-t-il, dénonçant un « déni de démocratie ». Une expression qui ne passe pas pour Eléonore Caroit. « C’est une réforme dont l’examen a pris trois semaines, vous pensez qu’elle aurait pu être abrogée dans une niche parlementaire ? C’est fantaisiste », fustige la députée. De son côté, François Bayrou a répété sur le plateau de France 2 après la rencontre à Matignon, qu’il était ouvert à une autre solution que le report de l’âge de départ de 62 à 64 ans pour financer le système des retraites. Le nouveau Premier ministre a notamment rappelé qu’il avait été « un militant de la retraite à points ».
Les chefs de partis et de groupes parlementaires étaient reçus à Matignon par François Bayrou, qui promet de former un gouvernement « avant Noël ». Une rencontre dont les socialistes, écologistes et communistes ressortent sans avoir « trouvé de raison de ne pas censurer » le nouveau Premier ministre, rapporte Olivier Faure.