Longtemps, les questions de souveraineté numérique ont tourné autour des GAFAM (Google, Amazon, Facebook, Apple et Microsoft), et de la problématique des données personnelles. Mais l’irruption de la 5G a mis en lumière une autre entreprise, d’un autre pays : Huawei.
Créée en 1987 par un ancien membre de l’Armée populaire, Huawei est souvent soupçonnée d’être sous l'influence de l’Etat chinois. La nature des technologies qu’elle manipule, qui sont un enjeu de souveraineté économique et de sécurité, renforce les inquiétudes de certains pays. À raison selon Alain Wang, pour qui « Huawei est soutenue par le gouvernement chinois, depuis le début ». Il est rejoint dans son analyse par le sénateur Christian Cambon : « Un rapport rendu au Sénat a démontré que des cellules du Parti communiste chinois sont dans un certain nombre de représentations de Huawei. On sait que globalement, une entreprise chinoise de cette importance a un lien de dépendance très fort avec son gouvernement, ce qui pose des questions ».
Sur le plan économique, Huawei a bénéficié d’un soutien massif de l’Etat chinois, « notamment sur des prêts à taux zéro » souligne Julien Nocetti, expert en souveraineté numérique.
L'Europe sous pression
Un faux problème selon Jean-Marie Le Guen, nouveau membre du Conseil d’Administration de Huawei France : « Sur l’indépendance des sociétés multinationales vis-à-vis de leur base nationale, il ne faut pas croire que les grandes entreprises américaines ou françaises n’ont pas un rapport direct avec les intérêts de leur nation ». Il ne faudrait donc pas « bannir Huawei sous la pression des Etats-Unis » insiste l’ancien Ministre. D’autant plus que les risques d’espionnage ou de sabotage sont inhérents aux technologies de télécommunications, et pas uniquement à Huawei :
la NSA et les Etats-Unis, accusés d'espionner l’Europe, en sont l’illustration.
La véritable question serait donc celle de la souveraineté. Et sur ce sujet, les Européens ont pris un retard conséquent, même si les deux principaux concurrents de Huawei sur la 5G sont Nokia et Ericsson, respectivement finlandais et suédois. Un retard qui s’explique selon Julien Nocetti par un manque de volonté et d’investissement de la part des pays de l’Union, dont le soutien à ces entreprises est beaucoup trop faible en comparaison à ce que la Chine permet à Huawei. Des investissements qui pourraient pourtant nous permettre « d’exister plutôt que de s’aligner » selon la formule de Jean-Marie Le Guen.