Conséquence directe d’une motion de censure qui ferait tomber le gouvernement, le projet de loi de financement de la Sécurité sociale est plus que jamais menacé. La rapporteure générale de la commission des affaires sociales du Sénat, Elisabeth Doineau (Union centriste), rappelle l’importante de voter une disposition permettant à la Sécu de pouvoir emprunter.
Hôpitaux de Marseille : « Le pouvoir est souvent concentré entre les mains d’un petit nombre de personnes », regrette François Crémieux
Par Public Sénat
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« Je n’ai pas souvenir que d’autres personnes auditionnées aient développé ce champ de l‘hôpital et de la santé publique ». Le président de la commission d’enquête sur la situation de l’hôpital en France, Bernard Jomier (PS) est encore plongé dans sa réflexion lorsqu’il conclut l’audition de François Crémieux, directeur général de l’AP-HM (Assistance publique - Hôpitaux de Marseille).
Passé par les Balkans, Haïti, Beyrouth ou encore le cabinet de Marisol Touraine, l’ARS Ile-de-France et l’Assistance publique – Hôpitaux de Paris, François Crémieux a, en effet, apporté aux sénateurs des pistes de réflexion, en particulier sur le concept de « responsabilité populationnelle ». Un concept qui implique que les acteurs de santé d’un territoire sont responsables de l’amélioration de la santé de la population de ce territoire.
« L’enjeu à Marseille, c’est une fracture territoriale connue de tous. Derrière cette fracture territoriale, c’est une inégalité d’accès aux soins connue de tous. Dans le contexte du covid, ça a été une fracture d’accès aux tests de dépistages et à la vaccination. Quand on évoque la moyenne de 80 à 85 % de Français vaccinés, c’est ignorer que dans certains quartiers, c’est moins de 50 % […] Pourquoi c’est le cas à Marseille, Il y a des défaillances de fonctionnement de la médecine libérale, de l’hôpital et on a tous une part de responsabilité. C’est sur ce dernier mot que l’enjeu doit être porté. Nous ne sommes pas ni les uns ni les autres, responsables de la santé des populations de tel ou tel quartier. A force de ne pas être responsables […] ça conduit à ce qu’on ne sait pas très bien vers qui nous retourner pour régler les problèmes […] A Marseille, c’est une inégalité d’accès aux soins que le covid nous a fait exploser à la figure », explique-t-il.
« Tout au long de cette crise, l’impossible a été la principale limite »
En poste à Marseille depuis juin dernier, et auparavant à l’APHP, François Crémieux a fait face aux vagues successives de l’épidémie et en tire des enseignements positifs. « Brusquement nous avons retrouvé des marges de manœuvre, la possibilité de soulever des montagnes, transformer des organisations, modifier des fonctionnements […] Tout au long de cette crise, l’impossible a été la principale limite pour chacun d’entre nous, c’est ce qui nous manque le plus en temps normal et c’est la crainte que nous avons les uns et les autres, après la crise, d’un retour à ces marges de manœuvre qui nous manqueraient ».
« Dans la hiérarchie, les femmes sont rares ou absentes »
Car en en ce qui concerne la gouvernance hospitalière, « les contraintes ce ne sont pas les désaccords entre les responsables de la communauté médicale, mais la mise en œuvre lorsque nous sommes d’accord ».
Autre enjeu souligné par François Crémieux : « Rendre attractif l’hôpital public ». « Les jeunes qui sortent des facultés de médecine sont à 70 % des jeunes femmes […] Il nous faut assumer de voir qu’on leur propose des CHU dans lesquels plus on monte dans la hiérarchie […], plus les femmes sont rares ou absentes. C’est un problème de principe, c’est aussi en train de devenir un sujet de ressources humaines », regrette-t-il.
« Nous transformons des sujets individuels en grands questionnements philosophiques généraux »
Lors de son audition il ne sera pas fait allusion de la part des parlementaires, du conflit qui oppose le patron de l’AP-HM avec le directeur de l’hospitalo-universitaire (IHU) Méditerranée Infection, Didier Raoult, dont le remplacement est prévu en septembre.
François Crémieux s’est simplement borné à noter que les « CHU étaient marqués par de hiérarchies fortes. Elles sont probablement parfois nécessaires, parfois peut-être trop importantes. Mais le résultat est que le pouvoir est souvent concentré entre les mains d'un petit nombre de personnes que ce soit du personnel médical ou administratif. Trop souvent nos fonctionnements internes dans ces grands hôpitaux sont soumis aux dérives d’un tout petit nombre […] Les conséquences en termes d’attractivité, c’est que nous donnons l’impression à un certain nombre de jeunes, d’un sentiment d’impunité d’un tout petit nombre à l’intérieur de nos structures. Ceux qui ne tolèrent pas ces injustices ont tendance à nous quitter », a-t-il regretté même s’il précise que « les comportements défaillants sur le plan managérial sont ultra-minoritaires. Mais avoir autant de difficultés à les traiter fait que nous transformons des sujets individuels en grands questionnements philosophiques généraux sur les relations entre médecins et directeurs ».
Pour mémoire, dès l’été 2021, François Crémieux avait exprimé sa volonté de « tourner une page » après les polémiques engendrées par les positions de Didier Raoult sur la gestion de l’épidémie de covid-19.