Une valse à deux temps
Dans la course à l’Elysée, Marine Le Pen a décidé de prendre le virage de la radicalité. Que ce soit au sujet de la sortie de l’Euro, ou concernant les magistrats, la présidente du Front National n’hésite plus à muscler son discours. Rien d’anormal, selon Sylvain Crépon. D’après le sociologue, spécialiste du FN, la campagne de la candidate est rentrée dans « un nouveau tempo ». Comme en 2012, après avoir joué la carte de la dédiabolisation, la députée européenne est revenue à ce qui fait la spécificité de son parti, et donc « sa principale ressource » : sa radicalité.
La figure inévitable de Jean-Marie Le Pen
Un retour à une ligne proche de celle de Jean-Marie Le Pen ? C’est en tout cas, l’avis de Lorrain de Saint Affrique, assistant parlementaire et ancien conseiller en communication de celui qui a incarné pendant près de 40 ans le Front National. « Elle puise dans la culture paternelle, décrypte-t-il. Il ne faut pas oublier qu’en 2007, la directrice de campagne de Jean-Marie Le Pen, c’est Marine. » Même analyse pour Olivier Faye, journaliste au Monde : « Elle n’a pas réinventé la politique. Marine Le Pen mène plus au moins la même campagne qu’en 2012 et que celle de son père en 2007. » Mais paradoxalement, alors que l’on retrouve ces références au père dans son clip de campagne, elles sont totalement absentes du nouveau logo présenté en novembre dernier. Sur ce dernier, plus de flamme tricolore, ni de référence au nom de famille, mais une rose bleue. Une véritable rupture. Pas vraiment une réussite, selon la sémiologue, Mariette Darrigrand : « La rose bleue, le nouveau logo de Marine Le Pen, c’est la fausse bonne idée de communication, on n’est plus dans l’univers politique. »
Marine Le Pen : une femme mère à la Merkel
Autre enjeu clé pour Marine Le Pen : rattraper le retard du FN dans l’électorat féminin. Et pour cela, elle dispose d’un atout : être l’une des seules femmes de ces élections présidentielles. Ainsi, elle n’hésite plus à revendiquer sa maternité pour appuyer son propos et à en appeler aux mères de famille. « On est face à une femme qui est plutôt une amazone, voire une femme peuple, elle n’est pas dans la séduction. C’est une femme mère à la Merkel, elle essaye un peu d’être une femme patrie », note Mariette Darrigrand. Une nouvelle posture que l’on retrouve lors de ces déplacements à l’international, comme au Liban, en février dernier, où elle a refusé de se voiler pour rencontre le Grand Mufti de Beyrouth. « Ce qui est frappant, c’est qu’elle mettait en avant ses attributs de féminité : elle portait une jupe, des escarpins, il y avait une façon de montrer qu’elle était une femme occidentale », rembobine Olivier Faye qui l’avait suivi pour Le Monde.
Mais à force de multiplier les contre-pieds, la candidate ne risque-t-elle pas de produire des discours contradictoires ? Elle « qui déteste la contradiction et qui est une femme de rupture », comme le rappelle Lorrain de Saint Affrique, l’ancien conseiller en communication de Jean-Marie Le Pen.