François Baroin, possible espoir de la droite pour 2022
Sera-t-il le sauveur de la droite en 2022? S'il esquive les spéculations, François Baroin trace depuis cinq ans un chemin discret à la tête de l...
Par Claire GALLEN
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Sera-t-il le sauveur de la droite en 2022? S'il esquive les spéculations, François Baroin trace depuis cinq ans un chemin discret à la tête de l'association des maires de France (AMF), cultivant son ancrage local et l'image d'un rassembleur modéré.
Depuis son retour aux instances stratégiques de LR en octobre, pas une interview sans que la question de la présidentielle de 2022 ne lui soit posée. "Je n'y pense pas matin midi et soir, ça c'est sûr", assurait-il mardi sur BFMTV, en ajoutant: "il faut des circonstances tout à fait exceptionnelles pour répondre positivement à une question de cette nature".
Sur le devant de la scène cette semaine, lors du congrès de l'AMF, l'ancien ministre des Finances de 54 ans est jugé plus "compétent" qu’Emmanuel Macron par 55% de Français, et plus proche d'eux (70%), selon un sondage Odoxa publié vendredi par Le Figaro et France Info.
Le maire de Troyes met en garde contre la tentation de l'"homme providentiel" qui viendrait sauver un parti en crise, tombé à 8,5% des voix aux européennes. "On a perdu deux présidentielles, tout est à recommencer, comment imaginer parler de l'incarnation?"
François Baroin, maire de Troyes et président de l'association des maires de France (AMF) le 26 février 2019 à l'Elysée
AFP/Archives
Dans une France secouée par la crise des "gilets jaunes", il s'emploie à défendre "les villages, les villes, les communes" qui "sont le seul maillage que nos concitoyens connaissent et apprécient", explique-t-il dans un récent ouvrage "Une histoire sentimentale".
Mais son retour dans la direction de LR, savamment mise en scène aux côtés de son ami Christian Jacob, alimente les spéculations.
"Il n'est pas en capacité encore, c'est prématuré, mais il a changé son image", affirme un élu, qui le place parmi les recours potentiels avec Valérie Pécresse et Xavier Bertrand. "L'idée progresse" et "cela fait du bien, il y a longtemps que ça ne nous était pas arrivé", assure un cadre LR.
- "Galop d'essai" -
A deux ans et demi de la présidentielle, certains doutent de sa volonté à se jeter corps et âme dans une si rude bataille. "Baroin n'aime pas les combats, les noms d'oiseaux. Il teste l'hypothèse. C'est un galop d'essai. Mais il est en train de changer", assure une vieille connaissance.
Depuis la défaite à la présidentielle de 2017, il avait pris ses distances avec LR, apparaissant toutefois aux côtés de Gérard Larcher dans ses efforts de rassemblement de la droite et du centre.
Sous son allure nonchalante, il s'est habilement placé au coeur de la droite, dont il réconcilie les différentes tendances.
Comme Valérie Pécresse, il multiplie les mises en garde face à la banalisation de toute "alternance" avec l'extrême droite. Comme Xavier Bertrand, il cultive sa proximité avec les électeurs, face à un Emmanuel Macron régulièrement accusé de déconnexion: "J'ai 25 ans d'ancrage local", aime à répéter le maire de Troyes depuis 1995.
Cet élu, un temps journaliste de radio, puis avocat, n'est pas passé par la prestigieuse ENA. Fils de Michel Baroin, grand maître du Grand Orient de France qui avait fondé la Fnac, il se trouve après la mort de celui-ci un père spirituel en Jacques Chirac qui lui confie ses premières responsabilités ministérielles.
Comme Chirac "il a une connaissance intime du pays, il a cette bienveillance, cette empathie", affirmait, après le décès de l'ancien chef de l'Etat, Hervé Morin.
A 29 ans, il devient pendant six mois porte-parole du gouvernement du Premier ministre Alain Juppé. Très brièvement nommé à l'Intérieur, il devient sous la présidence de Nicolas Sarkozy (2007-2012) ministre du Budget et enfin de l'Economie.
De sa voix de crooner, qui trahit un goût pour le tabac, il défend les thèmes qui lui sont chers, comme les campagnes ou la laïcité. Il est l'auteur d'un rapport en amont de la commission Stasi en 2003.
Politiquement proche de Nicolas Sarkozy, cet amateur de chasse et de pêche à la truite vit sa relation avec la comédienne Michèle Laroque loin des médias, après un premier mariage dont sont nés trois enfants.
Alors que François Bayrou souhaite pouvoir avoir le ministre de l’Intérieur sortant dans son équipe, Bruno Retailleau a obtenu les garanties qu’il attendait, selon l’entourage du ministre. Il est prêt à lâcher l’idée d’un grand texte immigration, qui susciterait une levée de boucliers, pour « saucissonner » les sujets via plusieurs propositions de loi. Globalement, les LR sont rassurés et devraient rester au gouvernement.
Alors que le premier ministre a demandé aux partis de se positionner par rapport à l’exécutif selon trois choix, les partis de gauche ne souhaitent pas rentrer pas dans le jeu de François Bayrou. Ils attendent des signaux qui pourraient les amener à ne pas censurer. Mais ils ne les voient toujours pas…
C’est le signe d’ouverture vers la gauche qu’on retient de la réunion, ce jeudi 19 décembre, entre les différents représentants des partis politiques (hors Rassemblement national et La France insoumise) et François Bayrou. Le nouveau Premier ministre propose de remettre en débat la réforme des retraites, pour aboutir à un nouveau compromis avec les partenaires sociaux d’ici septembre. Sans nouvel accord, c’est la réforme adoptée en 2023 qui continuerait à s’appliquer. « Lorsque François Bayrou met tous les représentants de partis et de groupes autour de la table, je pense qu’il envoie un signal d’ouverture qui va le légitimer. Il est conscient de la situation politique inédite et il tend des mains », salue la députée Renaissance Eléonore Caroit, sur le plateau de Parlement Hebdo, au lendemain de la rencontre. « Au lieu d’avoir cette posture de contestation permanente, travaillons ensemble ! » « La première des choses, c’est de suspendre l’application de cette réforme, pour permettre aux 50 000 salariés qui devaient partir en retraite et qui en ont été empêchés cette année de pouvoir le faire », rétorque le sénateur communiste Ian Brossat. Une position partagée par l’ensemble des partis de gauche, à la sortie de la rencontre à Matignon la veille. Tous attendent davantage de compromis de la part du Premier ministre, avant de s’engager à ne pas le censurer. « Pour l’instant, il n’y a absolument rien qui garantisse à François Bayrou d’échapper à une motion de censure, parce que tout ce qu’il dit va dans le sens d’une perpétuation des politiques macronistes menées depuis 7 ans », fustige le sénateur communiste. Une position que dénonce vivement la députée Renaissance : « S’il faut revenir sur cette réforme, s’il y a des choses à améliorer, je suis tout à fait prête à ce qu’on en discute. Mais je pense qu’il faut qu’on arrête de polariser le débat. Au lieu d’avoir cette posture, cette attitude de renfermement et de contestation permanente, travaillons ensemble ! » Ian Brossat dénonce un « déni de démocratie » Ce n’est pas la première fois que le débat des retraites revient sur la table ces derniers mois. À la fin du mois de novembre, La France insoumise avait profité de sa niche parlementaire à l’Assemblée pour introduire une proposition de loi visant à abroger la réforme. Après des débats houleux, le texte n’avait pas pu être voté en raison du trop grand nombre d’amendements déposés par les groupes de la droite et du centre. « Lorsqu’ils ont eu la possibilité de voter aux dernières élections, les Français ont massivement soutenu des partis politiques qui s’engageaient à abroger la réforme. Quand ce sujet a, à nouveau, été débattu à l’Assemblée, les députés macronistes ont pratiqué l’obstruction pour éviter le vote d’une loi d’abrogation », dénonce Ian Brossat. « Si nous étions dans un pays véritablement démocratique, cette réforme serait déjà abrogée », ajoute-t-il, dénonçant un « déni de démocratie ». Une expression qui ne passe pas pour Eléonore Caroit. « C’est une réforme dont l’examen a pris trois semaines, vous pensez qu’elle aurait pu être abrogée dans une niche parlementaire ? C’est fantaisiste », fustige la députée. De son côté, François Bayrou a répété sur le plateau de France 2 après la rencontre à Matignon, qu’il était ouvert à une autre solution que le report de l’âge de départ de 62 à 64 ans pour financer le système des retraites. Le nouveau Premier ministre a notamment rappelé qu’il avait été « un militant de la retraite à points ».
Les chefs de partis et de groupes parlementaires étaient reçus à Matignon par François Bayrou, qui promet de former un gouvernement « avant Noël ». Une rencontre dont les socialistes, écologistes et communistes ressortent sans avoir « trouvé de raison de ne pas censurer » le nouveau Premier ministre, rapporte Olivier Faure.