Européennes : la future formation des groupes au Parlement

Européennes : la future formation des groupes au Parlement

À quelques jours du vote, plusieurs partis politiques ne savent pas avec qui ils siégeront au Parlement européen. Certains n’hésitent pas à envisager « une grande coalition ».
Public Sénat

Par Ariel Guez

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Si la campagne électorale, qui s’achève vendredi soir, a été captée par des enjeux nationaux, la question des alliances européennes reste centrale dans ces élections européennes. Dès le lendemain du vote du 26 mai, les élus formeront des groupes parlementaires, tout en cherchant à constituer une majorité à Bruxelles.

Actuellement, la gauche radicale (PCF, LFI) siège dans le groupe GUE/NGL. Europe Écologie Les Verts siège dans le groupe VERTS/ALE, tandis que LREM, le MoDem et l’UDI siègent dans le groupe des libéraux ALDE. À l’extrême droite, le Rassemblement national est présent dans le plus petit groupe du Parlement : « Europe des nations et des libertés » (ENF). Les Patriotes et Debout la France siègent quant à eux dans le groupe « Europe de la liberté et de la démocratie directe ».

Les deux principaux groupes parlementaires sont donc celui du PPE (droite conservatrice, où siège le parti Les Républicains) et le groupe Social-démocrate ( siègent le Parti socialiste, Génération.s et les Radicaux de gauche). À eux deux, PPE et S&D représentent plus de la moitié du Parlement. Néanmoins, cette répartition sera fortement chamboulée dimanche soir.

À l’échelle européenne, comme nous pouvons le voir sur notre carte, réalisée à partir des sondages compilés par European Elections Stats, les socialistes n’arriveraient en tête que dans très peu de pays. Le PPE arriverait en tête dans onze pays, les sociaux-démocrates dans sept pays, ALDE dans trois pays, tandis que les partis siégeant dans le groupe d’extrême droite ENF sont donnés en tête seulement en Italie (La Ligue) et en France (Rassemblement National).

 

A quoi serviront les groupes parlementaires ?

Les eurodéputés participent aux séances plénières, mais ils font aussi un travail dans les commissions parlementaires, comme les députés et sénateurs en France. Les élus examinent les propositions de la Commission européenne et du Conseil de l'Union européenne. Ils peuvent proposer des amendements aux propositions de directives et de règlements communautaires élaborées par la Commission. Le rapport voté en commission parlementaire devra ensuite être adopté en session plénière pour être retenu.

« La composition politique doit refléter le mieux possible celle de la plénière », selon le site toutel’europe.fr. En clair, si un groupe à 20 % de l’hémicycle, il aura 20 % des sièges de chaque commission parlementaire.

Le Parlement élira aussi le président de la Commission européenne et validera la nomination des commissaires européens : les alliances qui se mettront en place seront donc déterminantes dans la constitution de l’exécutif de l’Union européenne. Si le PPE devrait arriver en tête, les groupes qui se partagent le pouvoir depuis 2014 ne devraient pas avoir la majorité à eux deux. Selon notre simulation, réalisée à partir des sondages compilés par European Elections Stats, les socialistes auraient 151 sièges et le PPE 177 sièges, soit 20,11 % et 23,57 % de l'hémicycle.

 

Comme nous pouvons le voir, notre projection montre une forte percée des eurosceptiques de droite et d’extrême droite. Néanmoins, ces groupes payeront cher le départ des députés Britanniques. Notamment dans les commissions parlementaires, où le rapport de force pourrait changer sur certaines thématiques sociétales comme l’accueil des réfugiés.

La présence des députés du Royaume-Uni aura également pour conséquence de fausser l’élection du président de la Commission européenne, puisque les coalitions pour l’élire se formeront aussi en fonction de la force des groupes d’extrême droite et eurosceptiques.

Eine « Große Koalition » ?

Pour faire barrage à cette présence renforcée de l’extrême droite, plusieurs responsables politiques n’hésitent pas à envisager une grosse coalition sur le modèle législatif allemand. Est évoqué le scénario d’une alliance regroupant les socialistes, le PPE, les Verts et ALDE. « Aujourd'hui, le Parlement européen connaît une majorité entre les socialistes et les conservateurs. Il faut une coalition plus large, et où les équilibres seront beaucoup mieux respectés », plaidait Emmanuel Macron dans les colonnes du quotidien Belge Le Soir.

Cette hypothèse d’une « grande alliance progressiste » brouille les cartes en France. Le Premier ministre portugais socialiste Antonio Costa a affiché son soutien à la liste « Renaissance » de LREM dans un clip de campagne... Tout en rencontrant à Paris Raphaël Glucksmann, qui s’affiche en désaccord de la politique d’Emmanuel Macron. De quoi susciter les critiques contre le candidat du Parti socialiste, accusé de jouer sur deux tableaux. En effet, il est possible qu’un candidat se présente « contre » Emmanuel Macron alors que ses alliés européens souhaitent travailler avec le président français.

Vers une scission de plusieurs groupes ?

Moins probable, mais tout aussi envisagé : une alliance entre la gauche radicale tendance Aléxis Tsípras, les Verts, les socialistes et ALDE. « Dans le sud de l'Europe, j'entends souvent dire que les gens veulent une alliance progressiste de Tsípras à Macron. Nous verrons si c'est possible », expliquait il y a quelques jours Udo Bullmann, leader du SPD allemand. Cette union, contre nature pour la France Insoumise et les espagnols de Podemos, aurait certainement pour conséquence de faire exploser le groupe GUE/NGL à Bruxelles.

À droite, le cas Viktor Orban empoisonne le PPE. Contesté en interne, le premier ministre hongrois a été invité par Marine le Pen à rejoindre « l’Alliance européenne des peuples et des nations », groupe d’extrême droite qui succédera à l’ENF. Viktor Orban a néanmoins pour l’instant refusé les avances du Rassemblement national et de La Ligue (Italie).

Des messages explicites ont aussi été lancés au parti polonais conservateur PiS (Droit et Justice, siège dans le groupe ECR). Pourtant, les contradictions sont nombreuses entre les programmes des membres de la future « Alliance européenne des peuples et des nations ». À voir donc, si, pour l’ensemble des extrêmes droites en Europe, Bruxelles vaut bien une messe.

 

Méthodologie : l’ensemble de nos données proviennent du site internet europeanelectionsstats.eu, qui compile les sondages dans l’ensemble de l’Union européenne. Les données utilisées dans nos simulations sont disponibles sur ce lien.

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