"J'ai voté Mélenchon et blanc à la présidentielle. Mais là, je voterai Le Pen": Au Thor, dans le Vaucluse, militants de toujours et nouveaux partisans vêtus de "gilets jaunes" veulent croire à l'alternative Marine Le Pen.
"L'Europe, jusqu'alors, c'est peut-être pour ça que je n'ai pas voté pour Le Pen, mais maintenant, ça va", ajoute Yvonne Belluci, retraitée, venue samedi soutenir la chef du Rassemblement national (ex-FN) à son premier meeting en région pour les élections européennes, sur des thématiques toutefois largement nationales.
La nouvelle recrue est acommpagnée de sa petite fille Tya, 13 ans, accompagnée de deux amies, Émilie et Amélie. Les trois ados ont eu droit à leur selfie avec Marine Le Pen. Tout sourire: "Quand on la voit en vrai, elle est trop cool".
Pendant près d'un quart d'heure, la leader d'extrême droite a joué le jeu des photos dans la foule, après une prise de parole volontairement brève: à peine une demi-heure, durant laquelle elle s'est surtout attardée sur les fondamentaux de l'ex-Front national: l'immigration et "la France aux Français".
"La mondialisation, avec l'ouverture des frontières irraisonnée, a livré nos rues, nos quartiers, nos villes, nos villages, à une immigration délirante qui transforme certains endroits en zone de non-France", a martelé Mme Le Pen dans un gymnase rempli de quelque 700 partisans.
Revenue d'un "Frexit" ou d'une sortie de l'euro autrefois prônés par son parti, Mme Le Pen a par ailleurs plaidé pour une "alliance européenne des nations", sans s'attarder sur ses contours.
La nouvelle doctrine était un préalable au ralliement de l'ancien ministre LR Thierry Mariani, par ailleurs ancien élu du Vaucluse, chaleureusement accueilli par les militants qui, autrefois, le conspuaient. "Dans les années passées, on s'est un peu frotté les oreilles", a reconnu celui qui dit figurer en bonne place sur la liste RN aux Européennes et qui ne jure aujourd'hui que par "le rassemblement".
La tête de liste, Jordan Bardella, 23 ans, a achevé l'attaque en règle contre la droite : "Les Républicains, voix hautes mais mains molles, qui parlent comme le RN quand ils sont en campagne mais qui gouvernent comme des socialistes quand ils sont au pouvoir". En aparté, Mariani savoure: "Il y avait déjà plein de militants UMP qui, ces dernières années, avant moi, avaient rejoint Le Pen..."
- "On arrive, on arrive !" -
Mais c'est surtout l'anti-macronisme que le Rassemblement national entend capter, et son spectaculaire avatar, le mouvement des "gilets jaunes", dont c'était samedi la dixième journée d'action.
"La révolte des +gilets jaunes+, légitime et courageuse, est venue sonner la fin de la récréation d'un gouvernement inexistant et d'un président déconnecté et méprisant", a tonné la candidate malheureuse à la présidentielle de 2017.
Dans la salle, où le traditionnel refrain "On est chez nous" s'est enrichi des nouveaux couplets "On arrive, on arrive" ou "Macron démission", le mouvement, qui a essaimé sur les ronds-points depuis deux mois, jouit d'une popularité unanime.
"Les +gilets jaunes+ et le Rassemblement national, c'est compatible", veut croire Ghislaine, retraitée, qui "vote Le Pen depuis toujours". "Personne ne vote Mélenchon chez les +gilets+! Je vois plutôt des cons qui ont voté Macron et qui maintenant regrettent..."
Serge Madeline, 74 ans, "fier d'être pied-noir", abonde: "On sent qu'il y a une vague qui monte vers Marine", après le trou d'air et les doutes qui avaient suivi le débat raté de l'entre-deux tours de la présidentielle.
Marine Le Pen, qui se défend de toute récupération, a rencontré samedi une délégation de "gilets jaunes". "Je leur dis juste que, dans mes propositions à la présidentielle, il y avait une soixantaine de revendications que j'ai entendues chez les +gilets jaunes+", fait-elle valoir. Derrière elle, une vingtaine de militants à la veste fluo applaudissent.