Emprunts toxiques : la décision de Bartolone interpelle à droite…et à gauche

Emprunts toxiques : la décision de Bartolone interpelle à droite…et à gauche

Aux grands maux, les grands remèdes. Claude Bartolone, le président PS du conseil général de Seine-Saint-Denis veut attaquer en justice les banques qui ont négocié des emprunts dits toxiques avec le département, fortement endetté. Une initiative diversement accueillie.
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Par Laurent Berbon

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« Il y a le temps de la diplomatie, là j’ai tout essayé, et celui de la guerre ». Le socialiste Claude Bartolone est déterminé et le fait savoir. Président du conseil général de Seine-Saint-Denis, le député PS a décidé de poursuivre les trois banques avec lesquelles le département a contracté des emprunts. Des contrats passés entre 1997 et 2008, lorsque le département était présidé par des communistes. L’élu socialiste espère faire annuler ces contrats et reproche aux banques de ne pas avoir respecté leurs obligations d’information au moment où elles accordaient ces prêts, alors que la dette du département atteint aujourd’hui 950 millions d’euros, dont 71% en emprunts toxiques. Des emprunts spéculatifs  devenus risqués avec la crise financière, en raison de taux d’intérêt variables indexés sur des valeurs très volatiles. D’après Claude Bartolone, le surcoût pour le département est estimé entre 23 et 28 millions d’euros par an jusqu’en 2036.

« Pas sûr que la justice donne raison au Conseil général »

Ce n’est pas la première fois que le socialiste se distingue dans ce domaine. Dénonçant depuis longtemps le gel des dotations de l’Etat aux collectivités locales, le député avait défié l’Etat il y a quelques mois en faisant voter un budget en déséquilibre.

« La situation de la Seine-Saint-Denis est telle que les emprunts ont impacté le budget de façon considérable. Il est logique que la justice regarde s’il n’y a pas eu un abus de confiance », estime le socialiste Jacques Mahéas. Le sénateur de Seine-Saint-Denis « approuve la démarche » de Claude Bartolone, mais n’est « pas sûr que la justice donne raison au Conseil général ». « Je sais qu’elle amènera les banques à réfléchir pour qu’elles proposent une solution alternative », espère-t-il néanmoins.  

« C’est aussi aux élus d’être vigilants »

Du côté des UMP du département, on regarde cette initiative d’un très mauvais œil. « C’est du réchauffé. Ça fait bientôt trois ans que Monsieur Bartolone nous ressort ce dossier tous les trois mois », s’exaspère Eric Raoult (UMP). Pour le député de Seine-Saint-Denis, Claude Bartolone « oublie que le conseil général communiste avait des vice-présidents socialistes qui ne se sont pas opposés à ces emprunts ». « Il ne peut pas à la fois traîner dans la boue les communistes et essayer de passer des accords avec eux en vue des prochaines élections », ajoute-t-il. « C’est aussi aux élus d’être vigilants », interpelle Eric Raoult, qui ne voit dans la démarche de Claude Bartolone qu’une tentative de « masquer toutes les augmentations d’impôts qu’il s’apprête à faire passer aux habitants du département ».

La faute à DSK ?

Chez les communistes, pointés ici ou là du doigt pour avoir contracté ces emprunts, on fait bloc derrière la derrière la décision du président du département et l’on refuse d’endosser le mauvais rôle. « Notre collectivité comme beaucoup d’autres ont été confrontées au même problème », se défend Gilles Garnier. Président du groupe communiste au conseil général, ce dernier tient à remettre les pendules à l’heure. « A l’époque, nous avions comme offre des banques le choix entre la peste et le choléra, c’est-à-dire entre des taux fixes très très hauts ou des taux variables avec évidemment une part de risque », explique Gilles Garnier. 

Même s’il juge « positive » la démarche de Claude Bartolone, l’élu communiste estime cependant que celui-ci « s’arrête au milieu du gué » et appelle de ses vœux un « vrai pôle bancaire public ». « Pendant un temps, les collectivités n’empruntaient qu’au Crédit local de France à taux fixe. Un jour, un certain ministre de l’Economie qui s’appelle Dominique Strauss-Kahn a décidé de démanteler ce système et de l’ouvrir aux marchés, il devrait s’en mordre les doigts », vilipende l’élu communiste. A bon entendeur…

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