Emplois présumés fictifs au RN: Jean-Marie Le Pen défie les juges d’instruction

Emplois présumés fictifs au RN: Jean-Marie Le Pen défie les juges d’instruction

Jean-Marie Le Pen était convoqué par les juges qui envisageaient sa mise en examen dans l'enquête sur des soupçons d'emplois...
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Par Anne RENAUT, Nathalie ALONSO, Benjamin LEGENDRE

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Publié le

Jean-Marie Le Pen était convoqué par les juges qui envisageaient sa mise en examen dans l'enquête sur des soupçons d'emplois fictifs au RN. Mais l'eurodéputé leur a opposé une fin de non-recevoir, s'estimant toujours couvert par son immunité malgré un vote contraire du Parlement européen.

Le cofondateur du Front national, devenu Rassemblement national (RN), avait reçu le 26 mars une convocation des juges d'instructions du pôle financier et devait se présenter jeudi au tribunal de Paris, selon son entourage.

Mais dans son courrier en date du 8 avril, consulté par l'AFP, Jean-Marie Le Pen les a informés qu'il ne viendrait pas.

Ce-dernier a justifié son refus en invoquant d'abord le recours qu'il a formé devant le Tribunal de l'Union européenne contre la levée de son immunité parlementaire.

Celle-ci avait été votée le 12 mars par le Parlement européen, ouvrant la voie à cette convocation par la justice française dans cette enquête où près d'une vingtaine de personnes sont mises en examen, dont le parti RN et sa présidente Marine Le Pen.

Le père de Marine Le Pen fait surtout valoir que le juge a demandé la levée de son immunité pour plusieurs infractions - notamment l'abus de confiance, l'escroquerie en bande organisée et le travail dissimulé - mais pas pour les chefs de "détournement de fonds publics et complicité", alors que ces deux dernières infractions sont aussi visées par l'information judiciaire en cours.

La demande de levée d'immunité ne citant pas ces deux infractions, Jean-Marie Le Pen estime donc que son immunité reste valable.

Saisis depuis fin 2016, les juges d’instruction soupçonnent le RN et ses dirigeants d’avoir "de manière concertée et délibérée" mis en place un "système de détournement" des enveloppes allouées par l’UE à chaque député pour rémunérer des collaborateurs parlementaires (21.000 euros mensuels), afin de permettre au parti de faire des économies sur ses salaires.

L'enquête est vivement contestée par le parti d'extrême droite et sa présidente dénonce régulièrement une instrumentalisation de la justice à des fins politiques.

- "Système" enraciné -

Cet automne, les magistrats financiers ont commencé à alourdir les mises en examen, confortés par une jurisprudence de la Cour de cassation qui autorise les poursuites de parlementaires pour "détournements de fonds publics".

A mi-mars, les juges avaient mis en examen 19 personnes dont Marine Le Pen, Wallerand de Saint-Just, le trésorier du RN, et Louis Aliot ainsi que le parti pour "détournement de fonds publics" ou complicité.

Cette liste pourrait encore s’allonger à l’issue de nouvelles convocations, selon une source proche du dossier.

L'information judiciaire est également ouverte pour "escroquerie en bande organisée", ce qui rend envisageable une nouvelle aggravation des poursuites judiciaires.

Le Parlement européen a estimé son préjudice à 6,8 millions d’euros sur la période 2009-2017 mais les investigations qui visent les cas de 17 députés portent sur des faits remontant jusqu’à 2004.

Parmi eux, Jean-Marie Le Pen, 90 ans, qui siège à l’assemblée européenne depuis 1984. Il est notamment suspecté d'avoir rémunéré son ancien garde du corps Thierry Légier et Micheline Bruna, qui fut sa secrétaire particulière, sous couvert de contrats d’assistants parlementaires.

Devant les policiers, un ancien eurodéputé de 2004 à 2009, brouillé avec le parti, avait expliqué qu’un tel "système" était déjà enraciné du temps où le parti était dirigé par sa figure historique, confirmant l’existence pendant son mandat d’une gestion centralisée des contrats d’assistants parlementaires "entre les mains de Jean-Marie Le Pen", selon une autre source proche du dossier.

"C'est Jean-Marie Le Pen qui affectait les assistants sur les enveloppes des députés européens", a-t-il raconté aux enquêteurs en avril 2017, ajoutant qu'il n'avait pas eu son "mot à dire" sur le choix de ses collaborateurs.

Il expliquait ainsi que son enveloppe avait servi à rémunérer Thierry Légier et Micheline Bruna, "sans qu’un travail parlementaire n’ait été réalisé" pour son compte, selon une source proche du dossier.

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