Alors que François Bayrou vient d’annoncer la composition de son gouvernement, l’exécutif peut enfin se mettre au travail, estiment les représentants du bloc central au Sénat. Pour cela, il faudra composer avec le Parti Socialiste tout en ménageant LR qui conditionne encore son soutien au gouvernement. Une tâche périlleuse.
Elections régionales : dans les Pays de la Loire, la gauche rêve de reconquête
Par Samia Dechir et Sandra Cerqueira
Publié le
Devant la gare d’Angers, Matthieu Orphelin distribue ses tracts aux voyageurs pressés. « Allez voter dimanche » lance celui qui incarne désormais l’union de la gauche dans la région. Au premier tour, sa liste écologiste, alliée à la France insoumise, a obtenu 18,7 % des voix. Celle de l’ancien ministre socialiste Guillaume Garot a rassemblé 16,3 % des suffrages. Désormais, leurs deux listes n’en forment plus qu’une, qui pèse 35 % des voix.
Laboratoire d’union pour la présidentielle
Cette alliance, prévue dès avant le premier tour, rassemble désormais une vingtaine de formations. Grâce à cette large union, la gauche espère mobiliser les abstentionnistes pour élargir son socle. « Beaucoup de gens m’ont dit ‘ce que vous avez fait là, on veut que ce soit fait en 2022’ » raconte Matthieu Orphelin. « C’est le laboratoire ici en Pays de la Loire, on a ce vent d’optimisme, on va gagner. Ça va être très court la victoire, peut-être 1000, 2000 voix » prédit le candidat. La bataille s’annonce en effet très serrée. Alors les états-majors parisiens envoient des renforts : Yannick Jadot, Eric Piolle ou encore Olivier Faure sont venus s’afficher à ses côtés. La gauche veut faire de cette région une victoire symbolique face à la « droite dure » dénoncée à longueur de meetings.
« On ne veut pas des vegans à la région »
Christelle Morançais dirige les Pays de la Loire depuis 2017, quand Bruno Retailleau, patron des sénateurs de droite, lui a remis les clés de la région qu’il avait conquise deux ans plus tôt. Au premier tour, la présidente sortante est arrivée en tête, avec 34,3 % des voix. Mais cette large avance n’est plus si confortable face aux 35 % d’une gauche désormais rassemblée. Plus le match est serré, plus on tape fort sur le camp d’en face.
« On se bat pour éviter que des vegans soient élus à l’hôtel de région, et donc on a besoin que tout le monde se mobilise », lance Christophe Béchu, devant le stand d’une boucherie chevaline. Dans les allées d’un marché du centre-ville d’Angers, le maire de la ville s’affiche aux côtés de la présidente sortante pour la présenter à tous les habitants qu’il croise. Homme de droite proche d’Emmanuel Macron, il n’est pas vraiment sur la même ligne que Christelle Morançais, mais il a décidé de lui apporter son soutien au second tour. Un ralliement tardif, dicté par la menace d’une gauche soudée dans le camp d’en face. Christelle Morançais, elle, a choisi de ne pas faire d’alliance au second tour. Le seul choix cohérent aux yeux de la présidente sortante. « Aujourd’hui il y a très clairement deux visions pour la région. Celle que je porte, d’une région qui rassemble, et une autre vision portée par l’extrême gauche qui casserait notre économie », lance la candidate. Dans ce duel très ouvert, aucun des deux camps ne dispose d’un réel réservoir de voix pour le second tour. Car outre le duel droite gauche/ gauche, deux autres candidats se maintiennent.
Bataille des outsiders
Candidat de la majorité présidentielle, François de Rugy a tendu la main à la gauche et à la droite. Mais personne n’a accepté son offre d’alliance. L’ancien président de l’Assemblée nationale n’a pas caché sa déception d’avoir obtenu un peu moins de 12 % des voix au premier tour. Mais pas question de se renoncer. « Il n’y a jamais eu de suspens sur le fait que je maintienne ma liste. Je ne comprends même pas que Monsieur Jacob [Christian], président du parti Les Républicains, puisse demander à des listes qui sont qualifiées pour le second tour, de se retirer pour un soi-disant front républicain, alors que lui-même est contre, quand il s’agit d’être face au Rassemblement National. J’y vois en revanche le signe que le parti Les Républicains, dont Mme Morançais est vice-présidente, ne conçoit la vie politique qu’avec deux blocs : un bloc de droite, et un bloc de gauche ».
Fidèle à la devise macroniste, François de Rugy se veut le candidat de l’alternative au traditionnel clivage droite gauche, et espère placer un maximum d’élus pour peser au conseil régional des Pays de la Loire. « Nous souhaitons qu’il y ait une force centrale, d’équilibre, et c’est la majorité présidentielle d’Emmanuel Macron qui peut l’incarner dans la région pendant les années qui viennent ».
Chèque en blanc
Hervé Juvin non plus ne jette pas l’éponge, malgré un score décevant de 12,5 % des voix au premier tour. Pour tenter de regonfler son score, le candidat du Rassemblement National mise sur les abstentionnistes, dans une région où près de 70 % des électeurs ne se sont pas déplacés dimanche 20 juin. « Je renouvelle mon appel à voter, ça compte », lance Hervé Juvin devant les caméras dans le centre d’Angers. « Ne pas voter, c’est donner un chèque en blanc au pouvoir en place […], donc dimanche prochain, votez, il y va de notre démocratie, et de vos conditions concrètes de vie », prévient le candidat d’extrême droite.
Mais quel que soit le nombre d’abstentionnistes qui se remobiliseront au second tour, les deux outsiders sont trop loin derrière les grands favoris de cette bataille. En Pays de la Loire, le vrai match de cette quadrangulaire se jouera entre la gauche et la droite. Mais des incidents sont venus brouiller la fin de la campagne, qui s’avère très tendue. Mercredi, la tête de liste écologiste qui s’était plaint d’avoir été victime de propos homophobes par des militants LR, a échangé vivement avec la tête de liste LR avant un débat sur Télénantes. Débat qui a été annulé suite à cette dispute.