La ministre de l’Education nationale, Anne Genetet, a présenté ce mardi le deuxième volet de la réforme du « Choc des savoirs », initiée en 2023 par Gabriel Attal, et destinée à renforcer le niveau des élèves. La droite sénatoriale, qui a soutenu cette réforme, regrette des allégements vraisemblablement imposés par le contexte budgétaire. La gauche, en revanche, épingle des annonces faites sans retour sur les dispositifs déjà entrés en vigueur.
Education : le Sénat note sévèrement le bilan de Jean-Michel Blanquer
Par Public Sénat
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A l’origine de la mission d’information du Sénat, il y a un constat. Jean-Michel Blanquer détient le record de longévité d’un ministre de l’Education nationale sous la Ve République. Sous son « quinquennat », plusieurs réformes d’envergure ont été adoptées. « Il ne s’agit pas de faire un rapport à charge mais d’exercer notre mission de contrôle du gouvernement », expliquait, début octobre, le rapporteur de la mission, Max Brisson (LR). A charge ou non, le rapport demeure néanmoins critique.
Mardi soir, lors d’un débat sur les politiques éducatives du quinquennat, « Jean-Michel Blanquer était complètement dans le déni ». « Je lui conseillerai d’écouter davantage les conseils des professeurs, les attentes des parents… Aujourd’hui 80 % des professeurs estiment que l’école est en difficulté […] Oui, il y avait de bonnes orientations dans les axes fixés par Jean-Michel Blanquer. Mais nous avons des résultats en demi-teinte », constate, ce mercredi, le sénateur LR.
« Une politique publique menée dans la précipitation »
Pendant 6 mois, la mission a passé au crible les réformes phares du quinquennat, à savoir : « Le lien entre école et société, l’abaissement de l’âge d’instruction à trois ans, le développement de l’école inclusive, la priorité donnée au primaire à travers les politiques de limitation des effectifs de la grande section au CE1, la réforme du lycée et l’attractivité du métier d’enseignant ».
Et première appréciation globale, des élus, « dans de nombreux cas, la mise en œuvre de ces réformes donne l’impression d’une politique publique menée dans la précipitation, à la mise en œuvre mal accompagnée ». Ils formulent 38 propositions pour y remédier.
Les sénateurs pointent de nombreux objectifs non atteints donnant ainsi le sentiment de « naviguer à vue », de créer des « générations d’élèves cobayes » ou de générer « une déception pour le personnel enseignant ».
Dans le détail, la loi pour « une école de la confiance » adoptée en 2019 avait pour ambition de « renforcer le respect de l’institution scolaire » et instaurer « une relation de confiance entre la société et l’école ».
A la fin du quinquennat, c’est un sentiment « de défiance » qui émerge, note le rapport. « Seulement 4 % des professeurs des écoles considèrent que leur métier est valorisé […] La relation entre les personnels de l’Education nationale et leur ministre est fortement dégradée. La multiplication des injonctions (vade-mecum, « guides », foires aux questions) sont autant de circulaires déguisées qui brident l’autonomie des établissements publics locaux d’enseignement et la liberté pédagogique des enseignants ».
Parmi leurs propositions, les sénateurs souhaitent la mise en place automatique de la protection fonctionnelle pour les enseignants et « la même célérité dans le suivi des dépôts de plainte des enseignants que pour d’autres personnes chargées d’une mission de service public ».
Dédoublement de classes : « Premiers résultats mitigés »
Au sujet du nombre d’accompagnants des élèves en situation de handicap (AESH), le Sénat salue l’augmentation des crédits de 65 % dédiés à l’école inclusive, 3,5 milliards d’euros dans le budget pour 2022. Mais les rapporteurs « appellent à un renforcement de la formation des AESH, en partant de leurs besoins. Il est inacceptable que certains financent sur leurs fonds propres des formations pour prendre en charge les besoins des élèves qu’ils accompagnent ».
Promesse du candidat Macron, le dédoublement des classes de grande section au CE1 en éducation prioritaire a conduit « à des premiers résultats mitigés » et pose des questions « sur les moyens consacrés à la réduction du nombre d’élèves par classe ». Le dédoublement et le plafonnement du (24 élèves par classe) nécessitent 19 300 emplois. « Sur l’ensemble du quinquennat, seuls un peu plus de 7 000 ont été créés », soulignent les élus.
« Jean-Michel Blanquer conteste l’effondrement des mathématiques, mais les chiffres sont là »
Au cœur de l’actualité cette année pour ses conséquences sur l’enseignement des mathématiques, la réforme du baccalauréat est « au milieu du gué » . « L’accompagnement des élèves fait aujourd’hui défaut. 85 % des professeurs principaux et 65 % des proviseurs n’ont reçu aucune formation spécifique pour exercer leur mission d’orientation ». « Faute de dotation horaire globale (DHG) suffisante […] de nombreux élèves ne bénéficient pas de leurs 54 heures d’orientation annuelles ». En conséquence, « La réforme du lycée risque d’accroître les inégalités territoriales entre les lycées ».
Comme Public Sénat l’avait annoncé il y a quelques semaines, la mission préconise « d’introduire pour tous les élèves de première et de terminale un enseignement de mathématiques, pouvant prendre la forme de mathématiques appliquées et de lutter contre les stéréotypes de genre associés à certains enseignements et favoriser l’orientation des filles vers les spécialités et poursuites d’études scientifiques ».
« Jean-Michel Blanquer conteste l’effondrement des mathématiques mais les chiffres sont là. Il y avait 90 % des élèves de terminale qui avaient en enseignement en mathématiques avant sa réforme. On est tombé à 59 %. Il n’a pas tout réussi. Je sais qu’il a le syndrome du bon élève. Mais le nier n’est pas à la hauteur de l’excellent ministre de l’Education nationale qu’il aurait pu être et qu’il ne sera pas », tance Max Brisson.
Enfin en ce qui concerne l’attractivité du métier d’enseignant, les rapporteurs « préconisent une accélération des rendez-vous de carrière, afin d’améliorer la rémunération des enseignants et plaident une action volontariste du ministère afin de s’assurer que l’objectif d’une « meilleure préparation des étudiants à leur futur métier d’enseignant ».