Denormandie, l’ingénieur d’En Marche! devenu artisan de la loi logement
Elève appliqué de la macronie, Julien Denormandie est longtemps resté un mécanicien de l'ombre chargé de façonner En Marche!, avant d'être...
Par Jérémy MAROT
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Elève appliqué de la macronie, Julien Denormandie est longtemps resté un mécanicien de l'ombre chargé de façonner En Marche!, avant d'être propulsé au gouvernement pour l'élaboration et la défense de la loi logement, son premier grand test.
"Ce n'est pas mon rôle", a souvent répondu Julien Denormandie lorsqu'il était invité à s'exprimer durant la campagne présidentielle.
Âgé de 37 ans, ce proche d'Emmanuel Macron, dont l'ADN se confond avec celui d'En Marche! depuis les premières ébauches, est propulsé au front avec la loi Elan (évolution du logement et aménagement numérique), dans la corbeille de son secrétariat d'Etat auprès du ministre de la Cohésion des territoires.
Sa mission: démêler l'écheveau d'un "secteur où les intérêts des uns et des autres sont complètement dissociés", explique-t-il à l'AFP.
La feuille de route vire parfois à la gageure. En témoignent les huées en septembre au congrès des HLM, aux ressources amputées.
Autre moment épineux: il s'est vu accuser en février de minorer le nombre de SDF, après des propos laissant penser que seulement une cinquantaine d'hommes isolés dormaient dans la rue en Ile-de-France.
Lui se revendique "toujours dans la concertation", car "pour transformer un pays, il faut emmener les gens".
Julien Denormandie photographié en mai 2017 avec d''autres membres de l'équipe de campagne d'En marche!
AFP/Archives
"Ceux qui me connaissent savent aussi que je suis profondément déterminé. Je ne lâcherai rien. Constructif, mais ferme", insiste-t-il.
Ceux qui l'entourent louent sa "gentillesse et sa douceur absolues", dixit un cadre du parti. "Tout le monde l'adore", ajoute un autre.
"Il est trop mignon, il est du coup trop lisse et n'imprime pas", nuance un ministre, évoquant l'image "trop techno" de ce "gendre idéal".
Mais la gentillesse, "c'est une force car ça a une puissance de transformation décuplée par rapport à tous les autres modes habituels en politique, la brutalité, la dissimulation, la duplicité", rétorque un ami.
"Il est aussi armé d'une franchise absolue. Personne ne peut dire qu'il a été mené en bateau, trompé par Julien Denormandie", promet ce marcheur de la première heure. Un principe qui prévaut avec le chef de l'Etat, fort de leur "relation particulière": "Je lui dis toujours ce que je pense", affirme Julien Denormandie.
- "Fan de forêt" -
Agacé qu'on le qualifie de "jeune énarque" - "ce que je ne suis absolument pas, ni dans les faits ni dans l'approche" - M. Denormandie tire sa méthode de sa formation d'ingénieur agronome.
Ce "fan de forêt", qui comme "première expérience professionnelle" a construit "un séchoir à bois" pour la scierie de son oncle, n'aime rien tant que "partir du réel, du vivant, et essayer de trouver des solutions qui embrassent tout". "Il accorde une importance déterminante, préalable et finale à la réalité", abonde un ami.
"Quand aujourd'hui vous plantez une forêt (...) vous entrez dans une démarche d'aménagement sur des décennies", appuie-t-il. "Cette approche-là, entre un quotidien et une vision, est pour moi essentielle. La politique doit marcher sur ces deux jambes."
Ancien du cabinet de Nicole Bricq (Commerce extérieur) et de Pierre Moscovici (Economie), Julien Denormandie, qui malgré sa "sensibilité sociale-démocrate" n'a jamais eu d'"engagement partisan", a été tenté de monter sa propre entreprise, dont un projet de start-up en 2014 avec Emmanuel Macron. Et s'il n'avait été rattrapé en juin 2017 pour intégrer le gouvernement, il aurait rejoint un incubateur d'Axa.
"Cette fibre, je l'ai toujours en moi", assure-t-il.
Pour l'instant, il dit avoir pris un risque entrepreunarial en quittant sa fonction de directeur adjoint de cabinet à Bercy en avril 2016, devançant de quatre mois la sortie du gouvernement d'Emmanuel Macron.
"J'ai dû convaincre mes proches que j'allais créer une nouvelle association politique qui allait s'appeler En Marche!. Beaucoup nous regardaient avec des yeux interloqués", se souvient-il.
Issu d'une fratrie de cinq, fils d'un chirurgien investi dans le domaine du handicap, il est père de deux garçons et deux filles, âgés de 1 à 9 ans. Il décrit des nuits courtes et des journées ne lui laissant plus le temps de pratiquer le rugby, "le meilleur sport qui puisse exister".
Alors que François Bayrou souhaite pouvoir avoir le ministre de l’Intérieur sortant dans son équipe, Bruno Retailleau a obtenu les garanties qu’il attendait, selon l’entourage du ministre. Il est prêt à lâcher l’idée d’un grand texte immigration, qui susciterait une levée de boucliers, pour « saucissonner » les sujets via plusieurs propositions de loi. Globalement, les LR sont rassurés et devraient rester au gouvernement.
Alors que le premier ministre a demandé aux partis de se positionner par rapport à l’exécutif selon trois choix, les partis de gauche ne souhaitent pas rentrer pas dans le jeu de François Bayrou. Ils attendent des signaux qui pourraient les amener à ne pas censurer. Mais ils ne les voient toujours pas…
C’est le signe d’ouverture vers la gauche qu’on retient de la réunion, ce jeudi 19 décembre, entre les différents représentants des partis politiques (hors Rassemblement national et La France insoumise) et François Bayrou. Le nouveau Premier ministre propose de remettre en débat la réforme des retraites, pour aboutir à un nouveau compromis avec les partenaires sociaux d’ici septembre. Sans nouvel accord, c’est la réforme adoptée en 2023 qui continuerait à s’appliquer. « Lorsque François Bayrou met tous les représentants de partis et de groupes autour de la table, je pense qu’il envoie un signal d’ouverture qui va le légitimer. Il est conscient de la situation politique inédite et il tend des mains », salue la députée Renaissance Eléonore Caroit, sur le plateau de Parlement Hebdo, au lendemain de la rencontre. « Au lieu d’avoir cette posture de contestation permanente, travaillons ensemble ! » « La première des choses, c’est de suspendre l’application de cette réforme, pour permettre aux 50 000 salariés qui devaient partir en retraite et qui en ont été empêchés cette année de pouvoir le faire », rétorque le sénateur communiste Ian Brossat. Une position partagée par l’ensemble des partis de gauche, à la sortie de la rencontre à Matignon la veille. Tous attendent davantage de compromis de la part du Premier ministre, avant de s’engager à ne pas le censurer. « Pour l’instant, il n’y a absolument rien qui garantisse à François Bayrou d’échapper à une motion de censure, parce que tout ce qu’il dit va dans le sens d’une perpétuation des politiques macronistes menées depuis 7 ans », fustige le sénateur communiste. Une position que dénonce vivement la députée Renaissance : « S’il faut revenir sur cette réforme, s’il y a des choses à améliorer, je suis tout à fait prête à ce qu’on en discute. Mais je pense qu’il faut qu’on arrête de polariser le débat. Au lieu d’avoir cette posture, cette attitude de renfermement et de contestation permanente, travaillons ensemble ! » Ian Brossat dénonce un « déni de démocratie » Ce n’est pas la première fois que le débat des retraites revient sur la table ces derniers mois. À la fin du mois de novembre, La France insoumise avait profité de sa niche parlementaire à l’Assemblée pour introduire une proposition de loi visant à abroger la réforme. Après des débats houleux, le texte n’avait pas pu être voté en raison du trop grand nombre d’amendements déposés par les groupes de la droite et du centre. « Lorsqu’ils ont eu la possibilité de voter aux dernières élections, les Français ont massivement soutenu des partis politiques qui s’engageaient à abroger la réforme. Quand ce sujet a, à nouveau, été débattu à l’Assemblée, les députés macronistes ont pratiqué l’obstruction pour éviter le vote d’une loi d’abrogation », dénonce Ian Brossat. « Si nous étions dans un pays véritablement démocratique, cette réforme serait déjà abrogée », ajoute-t-il, dénonçant un « déni de démocratie ». Une expression qui ne passe pas pour Eléonore Caroit. « C’est une réforme dont l’examen a pris trois semaines, vous pensez qu’elle aurait pu être abrogée dans une niche parlementaire ? C’est fantaisiste », fustige la députée. De son côté, François Bayrou a répété sur le plateau de France 2 après la rencontre à Matignon, qu’il était ouvert à une autre solution que le report de l’âge de départ de 62 à 64 ans pour financer le système des retraites. Le nouveau Premier ministre a notamment rappelé qu’il avait été « un militant de la retraite à points ».
Les chefs de partis et de groupes parlementaires étaient reçus à Matignon par François Bayrou, qui promet de former un gouvernement « avant Noël ». Une rencontre dont les socialistes, écologistes et communistes ressortent sans avoir « trouvé de raison de ne pas censurer » le nouveau Premier ministre, rapporte Olivier Faure.